Document public
Titre : | Arrêts relatifs à la violation de l'article 8 de la Convention du fait du refus systématique de la Russie de rendre les dépouilles du président Tchétchène et des insurgés tchétchènes aux membres de leur famille : Maskhadova et autres c. Russie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 06/06/2013 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 18071/05 |
Note générale : | Affaire connexe : Sabanchiyeva et autres c/ Russie 38450/05 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Russie [Mots-clés] Religion - Croyances [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Terrorisme [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale |
Résumé : |
Ces deux affaires concernent le refus des autorités russes de rendre les corps du Président séparatiste Tchétchène et des insurgés tchétchènes à leurs familles.
Dans le premier arrêt, les requérants sont : la femme et les enfants de Aslan Maskhadov qui fût un des dirigeants politiques et militaires du mouvement séparatiste tchétchène et accusé de différents actes terroristes. Par décision en date du 25 mars 2005, les autorités ont décidé d’enterrer le corps et en avril de la même année ont rejeté la demande des requérants de rendre le corps, se fondant sur un décret de 2003 relatif à l’inhumation de terroristes et la loi relative à l’abolition du terrorisme. Les autorités ont ainsi expliqué que les corps des terroristes morts suite à leurs actions terroristes ne devaient pas être rendus à leurs familles et que le lieu où ils étaient enterrés devait rester secret. Dans le second arrêt, les requérants sont 50 ressortissants russes dont les proches étaient 55 insurgés tués dans une attaque menées par les forces de police. Juste après les attaques certains requérants ont demandé le retour des corps de leurs proches pour l’inhumation mais sans succès. Par une décision de mai 2006, les autorités ont décidé de ne pas rendre les corps et les ont incinérés. Les requérants dans la première affaire ont invoqué l’article 2 de la Convention (droit à la vie) et ont allégué que Mr Maskhadov avait été piégé, détenu,tué par les forces de sécurité Russes et n’avait pas été trouvé mort comme ce qui avait été prétendu. Les requérants dans la seconde affaire ont invoqué l’article 3 (relatif aux traitements inhumains et dégradants), et se sont plaints des conditions dans lesquelles les autorités ont gardé les corps de leurs proches pour l’identification. La Cour n’a pas fait droit à leur demande. Dans les deux affaires, les requérants se sont plaints du refus des autorités de leur rendre les corps de leurs proches et que la législation en cause était discriminatoire car elle visait exclusivement les adeptes de la religion musulmane et la communauté Tchétchène. Ils se sont ainsi fondés sur les articles 8 (droit à la vie privée et familiale) et 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention. La Cour considère qu’il y a bien eu violation de l’article 8 en ce que le refus automatique de rendre les dépouilles à leur familles ne permettait pas un juste équilibre entre d’un côté le but légitime de prévenir tout trouble qui aurait pu exister lors des enterrements de même que de préserver les sentiments des proches des victimes du terrorisme et d’un autre côté le droit des requérants de présenter leur respect lors d'un enterrement ou sur une tombe. Pour la Cour, le refus automatique de rendre les dépouilles contrevenait au devoir des autorités de prendre en compte les circonstances individuelles de chaque défunt et des membres de la famille. En l’absence d’une telle approche individuelle, la mesure a transféré la responsabilité des défunts pour leurs activités de terrorisme sur les requérants. La Cour a estimé qu’il n’y avait pas de violation de l’article 14 car elle n’a trouvé aucune indication permettant de conclure que la législation visait exclusivement les fidèles musulmans ou les membres de la communauté tchétchène. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-120068 |