Document public
Título: | Arrêt relatif au fait que la non application d'une loi pénale potentiellement plus favorable est constitutive d'une violation de l'article 7 de la Convention : Maktouf et Damjanovic c. Bosnie-Herzégovine |
Autores: | Cour européenne des droits de l'homme, Autor |
Tipo de documento: | partitura musical impresa |
Fecha de publicación: | 18/07/2013 |
ISBN/ISSN/DL: | 2312/08; 34179/08 |
Langues: | Francés |
Clasificación: |
[Géographie] Bosnie-Herzégovine [Mots-clés] Discrimination |
Resumen: |
Les requérants ont été condamnés par la Cour d’Etat de Bosnie Herzégovine pour crimes de guerre commis contre des civils pendant la guerre de 1992-1995.
Ils allèguent que la loi applicable au moment de la commission des crimes de guerre dont ils ont été reconnus coupables était le code pénal de 1976 de l’ex-République socialiste fédérative de Yougoslavie, et que sa non-application par la Cour d’Etat à leur cas a violé le principe de non-rétroactivité des peines énoncé à l’article 7 de la Convention. Ils invoquent également l’article 14 combiné avec l’article 7 de la Convention ainsi que l’article 1 du Protocole no 12. Enfin, M. Maktouf invoque la violation de l’article 6 § 1 de la Convention. Les requêtes ont été attribuées à la quatrième section de la Cour. Le 10 juillet 2012, une chambre de la quatrième section s’est dessaisie au profit de la Grande Chambre. M. Maktouf, estime ne pas avoir bénéficié d’un procès équitable devant un tribunal indépendant, du fait notamment que deux de ses membres avaient été nommés par le Bureau du Haut-Représentant pour un mandat renouvelable de deux ans. Selon lui, la durée du mandat des juges internationaux fait peser un doute sérieux sur l’aptitude de ces derniers à rendre des décisions en toute indépendance. Tout d’abord, la CEDH note que l’établissement au sein de la Cour d’État de chambres spécialisées dans les affaires de crimes de guerre composées à la fois de juges nationaux et de juges internationaux était une initiative d’institutions internationales. Puis, elle estime qu’il n’y a pas de raison de douter que les juges internationaux fussent indépendants, puisque leur nomination avait pour but le renforcement de l’apparence d’indépendance des chambres de la Cour d’État chargées de juger les crimes de guerre et d’une restauration de la confiance du public dans le système judiciaire national. Les requérants se plaignent de s’être vus appliquer une loi pénale plus sévère que celle qui était applicable au moment de la commission des infractions pénales dont ils ont été reconnus coupables et invoquent donc la violation de l’article 7 de la Convention. La Cour rappelle que la question de savoir si l’application rétroactive du code de 2003 dans les affaires de crimes de guerre est incompatible avec l’article 7 de la Convention doit être examinée au cas par cas compte tenu des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du point de savoir si les juridictions internes ont appliqué la loi dont les dispositions étaient les plus favorables à l’accusé. Pour la Cour, il faut déterminer quel était le code le plus clément quant à la peine minimale, et elle note que c’est celui de 1976. Elle observe néanmoins que les peines auxquelles ont été condamnées les requérants étaient comprises tant dans le code de 1976 que dans le code de 2003. Ainsi, selon la Cour, il n’est pas certain que si le code de 1976 avait été appliqué les requérants auraient été condamnés à une peine moins importante. Cependant les intéressés auraient pu se voir imposer des peines plus légères si le code de 1976 leur avait été appliqué. Pour la Cour, dès lors qu’il existe une possibilité réelle que l’application rétroactive du code de 2003 ait joué au détriment des requérants en ce qui concerne l’infliction de la peine, il y a violation de l’article 7 de la Convention. Enfin, les requérants soutiennent que le fait que leurs affaires ont été jugées par la Cour d’État alors que d’autres affaires de crimes de guerre avaient été jugées par les juridictions des entités emporte violation de l’article 14 de la Convention et/ou de l’article 1 du Protocole no 12 à la Convention. La Cour souligne que la notion de discrimination fait l’objet d’une interprétation constante dans sa jurisprudence concernant l’article 14 de la Convention. Il ressort de celle-ci que par « discrimination » il y a lieu d’entendre un traitement différencié, sans justification objective et raisonnable, de personnes placées dans des situations analogues. En l’espèce, la Cour note tout d’abord que compte tenu du grand nombre d’affaires de crimes de guerre à juger dans la Bosnie-Herzégovine de l’après-guerre, une répartition de la charge de travail correspondante entre la Cour d’État et les juridictions des entités est inévitable. La Cour relève que les juridictions des entités imposaient en général des peines plus légères que la Cour d’État pendant la période considérée. Toutefois cette différence de traitement ne résultant pas de caractéristiques personnelles, elle ne constitue pas un traitement discriminatoire. La Cour estime donc que seul l’article 7 de la Convention a été violé. |
En línea: | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-123176 |