Document public
Titre : | Arrêt relatif à l'absence de violation de l'article 3 de la Convention par la France lors de transfèrements, périodes d'isolement ou fouilles corporelles : Khider c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 01/10/2013 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 56054/12 |
Note générale : | SADOUN-JARIN Laura, "Transfèrement d’un détenu et traitement inhumain et dégradant", Dalloz actualité, 13 novembre 2013 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Établissement pénitentiaire [Mots-clés] Isolement [Mots-clés] Fouille à nu [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Traitement inhumain et dégradant [Mots-clés] Transfert de détenu [Mots-clés] Administration pénitentiaire [Mots-clés] Droit des détenus [Géographie] France |
Résumé : |
L’affaire concerne un condamné, ayant fait plusieurs évasions et tentatives d’évasion, inscrit par l’administration au « registre des détenus particulièrement signalés » et qui expose qu’il est soumis à un régime de détention particulièrement rigoureux, régime comportant notamment de nombreux changements d’établissements, des séjours prolongés à l’isolement ainsi que des fouilles corporelles.
Il invoque l’article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention car il estime que le traitement auquel il a été soumis constitue un traitement inhumain et dégradant. La Cour constate que M. Khider a fait l’objet de trente-quatre changements d’affectation d’établissements pénitentiaires, entre juin 1999 et octobre 2011. Elle rappelle que les mesures privatives de liberté s’accompagnent inévitablement de souffrance et d’humiliation. Cette disposition impose néanmoins à l’État de s’assurer que tout prisonnier est détenu dans des conditions compatibles avec le respect de la dignité humaine, que les modalités de sa détention ne le soumettent pas à une détresse ou à une épreuve d’une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrance inhérent à une telle mesure et que sa santé et son bien-être sont assurés de manière adéquate. Les actions répétées et violentes de l’intéressé ont précisément été invoquées par les autorités pour expliquer l’application du régime des rotations de sécurité qu’il a dû supporter. Les transfèrements étaient motivés par des raisons pratiques et non par la volonté d’humilier ou de rabaisser l’intéressé. La Cour note que depuis octobre 2011, M. Khider est détenu dans un centre pénitentiaire où il est placé en « régime normal ». La Cour estime que les conséquences des transfèrements que M. Khider a subies ne sauraient être considérées comme atteignant le seuil minimum de gravité nécessaire pour constituer un traitement dégradant ou inhumain au sens de l’article 3. En ce qui concerne le placement à l’isolement, la Cour souligne que l’interdiction de contacts avec d’autres détenus pour des raisons de sécurité, de discipline et de protection ne constitue pas en elle même une forme de peine ou de traitement inhumain. M. Khider a été placé périodiquement à l’isolement pour une durée totale de sept ans sur les dix-sept années qu’il a passées en détention. Il n’a jamais été soumis à un isolement social total, mais seulement relatif. Il a pu s’entretenir plusieurs fois avec son médecin, a reçu des visites de ses proches, avait conservé son droit à l’information, à la cantine et à la correspondance et bien qu’il n’ait pu avoir accès aux activités organisées de manière collective, il a bénéficié d’une séance de sport quotidienne d’une heure et a pu se rendre en promenade pendant 1 heure 30 le matin et 2 heures l’après-midi. La Cour estime donc que ses conditions de détention à l’isolement n’ont pas atteint le seuil minimum de gravité nécessaire pour constituer un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la Convention. En ce qui concerne les fouilles corporelles, la Cour a déjà jugé que – même intégrales - elles peuvent parfois se révéler nécessaires pour assurer la sécurité dans la prison, pour défendre l’ordre ou prévenir les infractions pénales. La Cour relève que M. Khider n’indique ni dans quels établissements ni à quelles dates, il aurait été soumis à un régime général de fouilles. Il ne précise pas non plus la fréquence et le nombre de fouilles auxquelles il aurait été soumis. La Cour estime par conséquent que M. Khider n’a fourni aucune preuve permettant de conclure qu’il y a eu violation de l’article 3. En ce qui concerne l'article 8, la Cour rappelle que toute détention régulière entraîne par nature une restriction à la vie privée et familiale de l’individu. La Cour observe que M. Khider n’a pas été interdit de visites familiales de la part de l’administration pénitentiaire. Les visites de ses proches ont été limitées en raison du régime de rotations de sécurité auquel il était soumis. En outre, M. Khider n’apporte aucune précision concrète sur les conséquences que les changements d’affectation auraient eues sur la limitation des visites de sa famille. La Cour rejette cette partie de la requête. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-127877 |