Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que le refus d'octroi de document de voyage à des jumeaux nés en Inde d'un père français et d'une mère indienne est contraire à l'intérêt supérieur des enfants |
est cité par : |
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Auteurs : | Conseil d'État |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 04/05/2011 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 348778 |
Note générale : | - F. Miloudi, "La gestation pour autrui : les hésitations du Conseil d'État", AJ Famille 2011, p.328 - J. Hauser, "Droit et fait en matière familiale : l'avenir de la distinction", RTD civil, 2011, p.530 - M. Sakalova, Commentaire de la décision, Chronique juridique n°12, mai-juin-juillet 2011, p. 21 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Géographie] Inde [Mots-clés] Gestation pour autrui (GPA) [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant |
Résumé : |
Le ressortissant français, père génétique de jumelles nées en Inde en décembre 2010 et dont la mère a consentie à ce qu’elles soient élevées en France en abandonnant ses droits parentaux, se voit opposer un refus de transcription des actes de naissance de ses enfants par le consulat général de France à Bombay. Celui-ci soupçonne le recours à une mère porteuse et saisi le procureur de la république près le tribunal de grande instance de Nantes. Ce dernier s’oppose par la décision du 17 mars 2011 à la transcription des actes de naissance sur les registres de l’état civil français.
Le père saisit le juge des référés du tribunal administratif de Lyon qui par l’ordonnance du 22 avril 2011 enjoint à l’administration de faire bénéficier les enfants d’un document de voyage. Le Ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE) a affirmé que le refus de délivrer un tel document ne porte pas atteinte à l’intérêt supérieur des enfants, ni au droit à mener une vie familiale qui pourrait être tout autant respectés par le choix d’une vie commune en Inde, auprès de leur mère. Il s’appuie également sur le principe constitutionnel de la dignité de la personne humaine et sur l’atteinte que porte la pratique de la GPA à l’ordre public international français. Outre l’annulation de l’ordonnance, le MAEE en demande le sursis à l’exécution car celle-ci risque selon lui d’entrainer des conséquences difficilement réparables. Après avoir rappelé les conditions de l’article L521-2 du code de justice administrative concernant le référé-liberté, le Conseil d’Etat relève qu’il n’est pas contesté que les actes de naissance sont réguliers, authentiques ou que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité. De même, n’est pas remise en cause l’authenticité ni la portée de ces documents. Le Conseil d’Etat estime que la circonstance que la conception des jumelles aurait pour origine un contrat entaché de nullité au regard de l’ordre public français serait, à la supposer établie, sans incidence sur l’obligation, faite à l’administration par les stipulations de l’article 3-1 de la Convention relative aux droits de l’enfant, d’accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Il précise qu’il appartient au juge judiciaire de se prononcer sur le bien-fondé du refus opposé par le procureur de la République à la transcription des actes de naissance des jumelles sur les registres de l’état civil français ainsi que de trancher une éventuelle contestation portant sur le droit des enfants à bénéficier des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel « est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ». Quant au juge des référés, juge d’ordre administratif, qui s’est borné à enjoindre à l’administration de délivrer un document de voyage leur permettant d’entrer sur le territoire national et non un passeport, il n’a pas empiété sur les compétences réservées par la loi à l’autorité judiciaire. Le Conseil d’Etat approuve donc le juge des référés d’avoir décidé que l’administration, en refusant de fournir un document de voyage aux jumelles, qui peut prendre la forme du laissez-passer, et donc de les empêcher d’entrer sur le territoire français, a porté une atteinte grave et manifestement illégale à leur intérêt supérieur. Il précise que les circonstances de la conception des enfants sont sans incidence sur l’obligation de l’administration d’accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant, intérêt qui commande que ces enfants puissent rentrer sur le territoire français avec leur père biologique. |
En ligne : | http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000023958677 |