Document public
Titre : | Arrêt relatif au traitement inhumain et dégradant infligé à une personne lors d'une interpellation par six policiers roumains : Rosioru c. Roumanie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 10/01/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 37554/06 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Roumanie [Mots-clés] Propos déplacés [Mots-clés] Violence [Mots-clés] Interpellation |
Résumé : |
Le soir du 25 janvier 2000, le requérant est entré dans un bar où il a vu six policiers des forces spéciales décagoulés. Après les avoir traité de terroristes, le requérant a été menotté par eux et frappé à coups de bâton et de pied. Les policiers ont continué à le frapper dans le fourgon en le conduisant au siège de la police. Après avoir été libéré le lendemain matin, le requérant s’est rendu directement à l’hôpital où il a été hospitalisé pendant deux jours. Le médecin a constaté « traumatisme thoraco-abdominal, ecchymoses étendues sur la fesse et la cuisse gauches, traumatisme cranio-facial, contusions bilatérales sur les bras ». Le requérant allègue une violation de l’article 3 en se plaignant des agressions qu’il a subi de la part des policiers et de l’ineffectivité de l’enquête menée par les autorités nationales concernant cet incident.
La Cour constate que selon le gouvernement les blessures du requérant ont eu un caractère accidentel, inhérent au processus d’immobilisation du requérant qui aurait été agressif. Elle rappelle que lorsqu’un individu est placé entre les mains des agents de l’Etat alors qu’il se trouve en bonne santé et que l’on constate qu’il est blessé au moment de sa libération, il incombe à l’Etat de fournir une explication plausible quant à l’origine des blessures. Par conséquent, il appartient au Gouvernement de démontrer à l’aide d’arguments convaincants que les lésions dont se plaint l’intéressé sont le résultat d’un recours à la force rendu nécessaire par le comportement du requérant et que ce recours à la force n’a pas été excessif. Il appartient à la Cour de rechercher si la force utilisée était proportionnée et à cet égard elle attache une importance particulière aux blessures occasionnées et à l’attitude du requérant, telles qu’elles ont été établies par les autorités internes. En l’espèce, la Cour constate d’une part, la gravité des blessures du requérant et d’autre part le fait qu’il n’est pas établi que lors de l’incident, le requérant a eu un comportement violent ou physiquement agressif ou qu’il a constitué une menace pour les six policiers qui l’interpellaient. Elle rappelle que l’impossibilité d’établir les circonstances exactes dans lesquelles une personne a été blessée, alors qu’elle se trouvait sous le contrôle des agents de l’Etat, ne l’empêche pas de parvenir à un constat de violation matérielle de l’article 3 de la Convention, à défaut pour le gouvernement défendeur d’avoir établi le déroulement des faits de manière satisfaisante et convaincante, éléments de preuve à l’appui. En l’espèce, elle estime que la Roumanie n’a pas fourni d’arguments convaincants ou crédibles pouvant servir à expliquer ou à justifier le degré de force utilisé par les policiers lors de l’interpellation du requérant. La force employée a été excessive et injustifiée au vu des circonstances. Par ailleurs, la Cour souligne que l’état avancé d’ivresse d’un particulier ou son vocabulaire abusif à l’égard des policiers ne peut pas justifier le recours à la force au delà de ce que l’interpellation de l’intéressé exige. Elle conclut donc qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention du fait du traitement inhumain et dégradant auquel le requérant a été soumis lors de son interpellation mais également sous l'aspect procédural. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-108416 |