Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que l’utilisation des preuves obtenues sous la torture empêche tout procès équitable : Othman (Abu Qatada) c. Royaume-Uni |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 17/01/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 8139/09 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Violence [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Preuve [Mots-clés] Torture [Mots-clés] Droit à un procès équitable [Mots-clés] Asile [Géographie] Royaume-Uni [Géographie] Jordanie |
Résumé : |
Le requérant, un ressortissant jordanien, est arrivé au Royaume-Uni en septembre 1993 après avoir été détenu et torturé par les autorités jordaniennes en vue d’obtenir ses aveux concernant deux complots à caractère terroriste. Il a obtenu le statut du réfugié en 1994. En 1999 et 2000, il a été condamné in absentia en Jordanie. En août 2005, un avis d’expulsion dans l’intérêt de la sécurité nationale lui a été communiqué, le gouvernement britannique ayant obtenu de la Jordanie des assurances qu’il ne serait pas soumis à des mauvais traitements et qu’il y serait jugé équitablement.
Le requérant invoque au contraire qu’en cas d’expulsion vers la Jordanie, il serait exposé à un risque réel de mauvais traitements et de procès inéquitable. Après avoir rappelé sa jurisprudence selon laquelle une personne ne peut pas être expulsée vers un pays en cas de risque réel qu’elle y soit torturée ou soumise à un traitement inhumain ou dégradant, la Cour considère que compte tenu des garanties fournie par la Jordanie, le requérant ne risque pas de subir de mauvais traitements en cas d’expulsion. Il n’y a donc pas violation de l’article 3. En revanche, elle estime qu’en l’absence de toute assurance par la Jordanie selon laquelle les preuves obtenues par la torture ne seraient pas utilisées à l’encontre du requérant, l’expulsion vers ce pays, où il sera rejugé, donnerait lieu à un déni de justice flagrant en violation de l’article 6. La torture et l’utilisation de preuves obtenues par ce moyen sont interdites par le droit international. Or, elle constate que la torture et l’utilisation par les juridictions jordaniennes de preuves ainsi obtenues sont des pratiques répandues en Jordanie. Autoriser une juridiction pénale à se fonder sur de telles preuves reviendrait à légitimer la torture de témoins ou de suspects avant un procès. La Cour souscrit à l’avis de la Commission spéciale britannique en matière d’immigration selon laquelle il existe une probabilité élevée que les preuves à charge soient admises au procès du requérant et qu’elles revêtiraient une importance considérable, voire décisive. Pour la première fois la Cour estime qu’une expulsion emporterait violation de l’article 6 (droit au procès équitable) et cette conclusion reflète le consensus international voulant que l’utilisation de preuves obtenues sous la torture empêche tout procès équitable. |
Note de contenu : | Arrêt définitif : rejet de la demande de renvoi devant la Grande chambre de la CEDH, 09/05/2012 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-108630 |