
Document public
Titre : | Arrêt relatif à la condamnation de la France pour la détention en établissement pénitentiaire d’une personne souffrant de troubles mentaux : G. c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 23/02/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 27244/09 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] État de santé [Mots-clés] Accès aux soins [Mots-clés] Handicap mental [Mots-clés] Établissement pénitentiaire |
Résumé : |
Le requérant, atteint d’une psychose chronique de type schizophrénique générant des troubles hallucinatoires, des délires et des conduites agressives et additives, a alterné des périodes d’incarcération et d’hospitalisation en milieu psychiatrique entre 1996 et 2009. En 2005, à la suite d’une dégradation commise en hôpital psychiatrique, il a été incarcéré en centre pénitentiaire où il a causé un incendie dans sa cellule entrainant la mort de son codétenu. Il a été poursuivi pour ces faits devant la cour d’assises en novembre 2008 qui l’a condamné à 10 ans de réclusion criminelle. En septembre 2009, il a été déclaré irresponsable pénalement par la cour d’assises statuant en appel qui a ordonné son hospitalisation d’office en établissement psychiatrique. Invoquant l’article 3 de la Convention, le requérant estime qu’il n’a pas eu de traitement approprié entre 2005 et 2009 alors que ses troubles mentaux nécessitaient un traitement adapté en hôpital psychiatrique. Il se plaint également de la violation de l’article 6§1 en estimant que sa mise en examen et sa comparution devant la cour d’assises alors qu’il était atteint des troubles mentaux ne répondaient pas aux exigences d’un procès équitable.
La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle le placement d’un détenu souffrant de troubles mentaux graves et chroniques, dont la schizophrénie, dans un établissement inapte à l’incarcération des malades mentaux pose de graves problèmes au regard de la Convention. Constitue un traitement inhumain et dégradant, le défaut de traitement spécialisé, en particulier d’une surveillance psychiatrique constante combinée à des conditions matérielles de détention inappropriées. En l’espèce, l’alternance des périodes d’incarcération et de séjours en hôpital psychiatrique faisait obstacle à la stabilisation de l’état de santé du requérant qui souffrait d’une grave maladie mentale, démontrant de ce fait son incapacité à la détention au regard de l’article 3 de la Convention. Les conditions matérielles de la détention au service médico-psychologique régional du centre pénitentiaire où le requérant a effectué plusieurs séjours, qualifiés d’indignes par les autorités nationales, n’ont pu qu’aggraver ses sentiments de détresse, d’angoisse et de peur. La Cour estime donc que le maintien en détention du requérant sur une période de quatre ans a entravé le traitement médical que son état de santé exigeait et lui a infligé une épreuve qui excède le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention. Elle juge, à l’unanimité, que le requérant a donc subi un traitement inhumain et dégradant prohibé par l’article 3 de la Convention. Concernant l’article 6§1, la Cour estime que les moments de désaffection voire de souffrance au moment du procès entrainés par la maladie et le traitement ne suffisent pas à conclure l’altération de la capacité du requérant de se défendre au point de l’empêcher d’être conscient de l’enjeu de la procédure devant la cour d’assises, ni de pouvoir y participer. Le procès du requérant n’était donc pas contraire à l’article 6§1 de la Convention. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-109218 |