
Document public
Titre : | Arrêts relatifs à l’octroi de dommages et intérêts à un mineur pour le préjudice causé par la publication d’articles mentionnant des détails intimes du litige opposant ses parents sur sa garde : Kurier Zeitungsverlag und Druckerei GmbH et Krone Verlag GmbH c. Autriche |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 19/06/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1593/06 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Géographie] Autriche [Mots-clés] Liberté d'expression [Mots-clés] Dommages-intérêts [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Enfant [Mots-clés] Médias, presse |
Résumé : |
Les requérantes, sont deux sociétés d’édition de deux quotidiens autrichiens à grand tirage. En 2004, ces deux journaux ont publié une série d’articles sur un litige opposant un couple sur la garde de leur enfant et notamment l’intervention des autorités publiques auprès du père pour faire exécuter une décision de justice accordant le droit de garde à la mère. Les articles qu’ils ont publiés révélaient l’identité de l’enfant, donnaient des détails sur sa vie familiale, sa santé et comprenaient des photographies. La mère et l’enfant ont engagé une action en justice contre les deux sociétés d’édition sur le fondement de la loi sur les médias. Le tribunal pénal autrichien a condamné les deux sociétés au paiement des dommages et intérêts (respectivement 9 000 et 130 000 euros). Les juges ont estimé en particulier qu’aucun intérêt public supérieur ne justifiait le fait que l’identité de l’enfant ait été révélée, ni la publication des photographies litigieuses. Invoquant l’article 10 (droit à la liberté d’expression), les sociétés requérantes dénonçaient les décisions de justice par lesquelles elles ont été condamnées au versement de dommages et intérêts.
La Cour considère que l’ingérence (décision les condamnant au paiement des dommages et intérêts) subie par les deux sociétés d’édition dans leur droit à la liberté d’expression était prévue par la loi et qu’elle visait un but légitime (protection de la réputation ou des droits d’autrui) au sens de l’article 10 de la Convention. Il s’agissait donc de savoir si cette ingérence était « nécessaire dans une société démocratique ». La Cour considère que même si les articles litigieux concernaient les questions d’intérêt public (bonne exécution des décisions de justice relatives à la garde des enfants et dans quelle mesure il peut ou doit y avoir un recours à la force public en cas d’inexécution) et faisaient l’objet d’un débat public, la publication de l’identité de l’enfant, les détails extrêmement intimes sur sa vie et une photographie sur laquelle il était reconnaissable n’était pas essentiel à la compréhension de l’affaire étant donné que ni lui ni ses parents n’étaient des personnages publics ou n’étaient précédemment entrés sur la scène publique. La Cour estime que la protection de la vie privée d’un mineur, victime d’un litige entre ses parents et qui n’est pas entré de lui-même sur la scène publique appelle une protection particulière du fait de la situation de vulnérabilité dans laquelle il se trouve. Selon la Cour, l’ingérence faite dans les droits des deux sociétés était proportionnée aux buts visés car elles étaient condamnées à indemniser le préjudice subi par l’enfant, victime d’une atteinte à son droit au respect de sa vie privée. En outre, elle considère que le montant des dommages et intérêts était exceptionnellement élevé, mais que la répétition fréquente des détails sur sa vie privée, son état psychique et sa santé, publiés dans treize articles sur l’affaire, était de nature à créer un climat de harcèlement continu. La circonstance qu’il s’agit d’un journal à très grand tirage a renforcé, selon la Cour, l’atteinte à la vie privée de l’enfant. La Cour conclut donc à l'unanimité que les juridictions autrichiennes n’ont pas outrepassé leur marge d’appréciation lorsqu’elles ont apprécié la nécessité de protéger la vie privée de l’enfant et de lui octroyer une indemnité. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 10 de la Convention. |
Note de contenu : |
Arrêt Kurier Zeitungsverlag und Druckerei Gmbh c. Austriche (no. 2) : 1593/06
Arrêt Krone Verlag Gmbh c. Autriche : 27306/07 |
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