Document public
Titre : | Décision 2025-044 du 20 mars 2025 relative au traitement inhumain et dégradant infligé à une personne détenue en raison de son maintien pendant plus cinq ans à l’isolement prononcé malgré les nombreuses contre-indications médicales et sans examen évolutif de sa situation |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Justice et libertés, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 20/03/2025 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2025-044 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation [Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Administration pénitentiaire [Mots-clés] Établissement pénitentiaire [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Isolement [Mots-clés] Traitement inhumain et dégradant [Mots-clés] Procédure [Mots-clés] État de santé |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi par Monsieur X, incarcéré, qui contestait son maintien en isolement depuis le 24 mars 2019 malgré les contre-indications médicales formulées par les médecins de l’établissement pénitentiaire.
Le Défenseur des droits a saisi la direction de l’administration pénitentiaire (DAP) afin d’obtenir la communication des différentes procédures de renouvellement de l’isolement de Monsieur X. L’instruction menée a permis de confirmer que le maintien à l’isolement de Monsieur X avait été contre-indiqué par les personnels médicaux à plusieurs reprises et qu’aucun élément récent ne permettait d’établir que son comportement justifiait son maintien à l’isolement. Les différentes décisions de renouvellement de cette mesure ne permettaient pas de garantir que l’administration avait pris ces éléments en considération. Le Défenseur des droits a proposé une médiation à la direction de l’administration pénitentiaire et sollicité le réexamen de la situation de monsieur X afin qu’une levée de l’isolement puisse être envisagée, toutefois l’administration pénitentiaire n’a pas souhaité donner de suite favorable à cette proposition. Le Défenseur des droits, constatant l’échec de la médiation, a interrogé une nouvelle fois la direction de l’administration pénitentiaire, l’invitant à présenter ses observations. Cette dernière n’a toutefois pas répondu à cette procédure contradictoire. Partant, la Défenseure des droits a constaté que : - en maintenant monsieur X à l’isolement pendant plus de cinq ans malgré son bon comportement et l’absence d’éléments nouveaux attestant d’une analyse évolutive des circonstances de la situation et de la conduite de monsieur X, l’administration pénitentiaire n’a pas démontré que son maintien à l’isolement était nécessaire et proportionné ; - en maintenant monsieur X à l’isolement plus de cinq ans, mesure restreignant l’exercice de ses droits, sans établir que cette mesure a réellement pris en compte les multiples contre-indications médicales certifiées par les médecins, l’administration pénitentiaire n’a pas tenu compte de l’état de santé de l’intéressé, en contradiction avec les dispositions de l’article L. 6 du code pénitentiaire. La Défenseure des droits a donc conclu que l’administration pénitentiaire a soumis monsieur X à un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Défenseure des droits a rappelé au ministre d’État, garde des Sceaux, ministre de la justice que : - le maintien à l’isolement d’une personne détenue au-delà de deux ans, mesure décidée par le garde des Sceaux, ne peut être prononcée qu’à titre exceptionnel, si le placement à l’isolement constitue l’unique moyen d’assurer la sécurité des personnes ou de l’établissement ; - le maintien à l’isolement d’une personne détenue sur une longue durée doit impérativement être décidé à l’issue d’un examen évolutif des circonstances, de la situation et de la conduite du détenu, et que la motivation doit être, « au fil du temps, de plus en plus approfondie et convaincante » ; - le maintien à l’isolement d’une personne détenue malgré les contre-indications médicalement attestées ne peut être décidé que s’il est démontré qu’aucune mesure alternative moins restrictive des droits et libertés de la personne n’est susceptible de permettre d’atteindre les objectifs poursuivis par la mesure d’isolement. La Défenseure des droits a recommandé au ministre d’État, garde des Sceaux, ministre de la justice de : - procéder à la réparation du préjudice subi par monsieur X résultant de l’atteinte à ses droits en raison de son maintien à l’isolement pendant plus de cinq ans sans que soit démontrées la nécessité et la proportionnalité de la mesure et malgré les nombreuses contre-indications médicales, dès lors qu’il en aura fait la demande ; - modifier la réglementation en matière d’isolement afin de prévoir explicitement l’obligation pour l’administration pénitentiaire de démontrer par écrit, lorsque le maintien à l’isolement est contre-indiqué médicalement, que d’autres solutions d’aménagement de la mesure n’ont pas pu être mises en œuvre. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Privation de liberté |
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