Document public
Titre : | Arrêt relatif au maintien de longue durée d’une personne atteinte de troubles mentaux dans un établissement pénitentiaires belge inadapté à sa pathologie et à son reclassement : L.B. c. Belgique |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 02/10/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 22831/08 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Belgique [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Handicap mental [Mots-clés] Administration pénitentiaire [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Établissement pénitentiaire |
Résumé : |
Le requérant, souffrant de troubles mentaux, est actuellement interné à l’annexe psychiatrique d’une prison belge. Il a été condamné à plusieurs reprises entre 1986 et 1995 à des peines de prison pour vol et port d’armes. En mai 1997, un rapport psychiatrique a conclu que l’intéressé souffrait d’un sérieux trouble de la personnalité et qu’il en résultait un danger constant pour la société, avec risque de récidive. En novembre 1997, il a été condamné à une peine d’emprisonnement de 5 ans pour viol sur sa fille mineure. Trois ans plus tard, la commission de libération conditionnelle a autorisé l’intéressé à subir sa peine en dehors de la prison sous condition de faire l’objet d’un suivi psychiatrique. Depuis la décision du ministre de la Justice belge prise en janvier 2004, le requérant est interné à l’annexe psychiatrique de la prison dans l’attente de trouver une solution résidentielle ou ambulatoire. Devant la CEDH, le requérant se plaint d’être privé de liberté dans un établissement inapproprié à la détention des personnes atteintes de troubles mentaux en violation de l’article 5§1e) de la Convention européenne.
La Cour rappelle qu’il doit exister un lien entre le motif censé justifier la privation de liberté et le lieu et les conditions de la détention. En principe, la « détention » d’une personne souffrant de troubles mentaux ne peut être considérée comme « régulière » conforment à l’article 5§1e) que si elle s’effectue dans un hôpital, une clinique ou un autre établissement approprié. Toutefois, la Cour a déjà jugé que le seul fait qu’un intéressé ne soit pas intégré dans un établissement approprié n’avait pas pour effet automatique de rendre sa détention irrégulière et qu’un équilibre raisonnable devait être ménagée entre les intérêts opposés en cause (un poids particuliers doit être accordé au droit à la liberté). En l’espèce, les autorités belges ont régulièrement affirmé depuis 2005 que l’internement du requérant dans les annexes des deux prisons s’effectuait à titre provisoire dans l’attente qu’une structure adaptée soit trouvée. En 2011, les autorités avaient constaté que l’établissement où était interné le requérant n’était pas un lieu approprié pour les soins requis par l’état de l’intéressé en vue de sa réintégration dans la société. La Cour constate également que la prise en charge thérapeutique et le suivi médical individualisé qui ont été mis en œuvre au sein de la prison en vue de faire évoluer la situation du requérant étaient très limités. Elle note l’existence d’un problème structurel concernant cette question en Belgique. En effet, nombreux autres internés sont dans l’attente d’un transfert dans un établissement adapté et se trouvent privés des soins thérapeutiques pouvant contribuer à leur réintégration dans la vie sociale. Elle conclut donc que le maintien du requérant pendant sept ans dans un établissement pénitentiaire alors que tous les avis médicaux et psycho-sociaux et les décisions de l’autorité compétente concordaient pour constater son caractère inadapté à la pathologie et au reclassement du requérant a eu pour effet de rompre le lien entre le but de la détention et les conditions dans lesquelles elle a eu lieu. En conséquence, il y a eu violation de l’article 5 § 1. |
ECLI : | CE:ECHR:2012:1002JUD002283108 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-113295 |