Document public
Titre : | Arrêt relatif à la torture en garde à vue d’un homme politique membre d’un parti d’opposition arménien et à l’absence d’enquête sur ses allégations : Virabyan c. Arménie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 02/10/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 40094/05 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Violence [Mots-clés] Torture [Mots-clés] Garde à vue [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Opinions politiques [Mots-clés] Absence d'enquête |
Résumé : |
Un membre du principal parti d’opposition arménien a été arrêté en avril 2004 quelques semaines après avoir participé à un rassemblement d'opposants politiques dans la capitale car les policiers l’ont soupçonné, après un coup de fil anonyme, d’avoir porté une arme à feu lors de ce rassemblement. Invoquant l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’intéressé allègue avoir été torturé en garde à vue. En particulier, il affirme avoir reçu des coups de pied et de poing de la part des policiers, à la suite de quoi il a frappé l’un d’eux. D’autres policiers appelés à la rescousse lui ont asséné des coups à la poitrine et l’ont frappé par un objet métallique dans l’aine. Les blessures ont été tellement graves qu’il a dû subir une ablation du testicule gauche.
Le requérant se plaint que l’enquête menée par les autorités sur ces faits a été ineffective, inadéquate et fondamentalement lacunaire et que les mauvais traitements lui ont été infligés en raison de ses opinions politiques. La CEDH considère que l’explication donnée par les autorités arméniennes quant à l’origine des blessures du requérant, à savoir qu’il se serait blessé lui-même en tombant sur une chaise lorsqu’il s’était débattu avec un policier, est improbable et donc insatisfaisante. La Cour conclut que les blessures, corroborées par les certificats médicaux, ont dû être causées par une forme ou une autre de mauvais traitements dont les autorités portent la responsabilité. Elle estime que les sévices infligés au requérant ont dû lui causer une douleur et une souffrance physique et morales aiguës et ont eu des conséquences durables pour sa santé. Eu égard à la nature et à l’intensité des sévices et au fait que ceux-ci ont dû être infligés à l’intéressé de manière intentionnelle pour le punir ou l’intimider, voire les deux, la Cour estime qu’il y a lieu de les qualifier de torture. Concernant l’enquête menée par les autorités, la Cour relève des lacunes, notamment des disparités et des ambiguïtés inquiétantes, qui jettent le doute sur la fiabilité et la crédibilité des conclusions de l’enquête. Elle juge donc à l’unanimité qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme dans son aspect matériel et procédural. En outre, la Cour considère que l’arrestation du requérant intervenue pendant une période sensible sur le plan politique en Arménie, a eu une motivation politique. Cependant, elle estime que cela ne permet pas de conclure que les mauvais traitements en soi ont de même été infligés pour des motifs politiques. Elle conclut donc qu’il n’y a pas eu violation de l’article 14 combiné avec l’article 3. Néanmoins, elle juge qu’il y a eu violation de ces deux articles concernant l’enquête, dès lors que les autorités n’ont pas pris toutes les mesures possibles pour rechercher si la discrimination (fondée sur les opinions politiques) avait pu jouer un rôle dans les sévices subis par le requérant. Par ailleurs, l’Arménie est également condamnée pour violation de l’article 6§2 en raison d’atteinte portée à la présomption d’innocence du requérant. |
ECLI : | CE:ECHR:2012:1002JUD004009405 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-113302 |
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