Document public
Titre : | Arrêt relatif au placement d’un détenu homosexuel dans une cellule d’isolement pendant huit mois dans des conditions ne respectant pas la dignité humaine : X. c. Turquie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 09/10/2012 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 24626/09 |
Note générale : | Nicolas Hervieu, « L’orientation sexuelle, inédite clef de lecture européenne des conditions carcérales » in Lettre « Actualités Droits-Libertés » du CREDOF, 18 octobre 2012 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Turquie [Mots-clés] Identité de genre [Mots-clés] Orientation sexuelle [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Isolement [Mots-clés] Établissement pénitentiaire |
Résumé : |
L’affaire concerne le placement pendant huit mois en cellule d’isolement d’un détenu homosexuel, par mesure de sécurité, après qu’il se soit plaint d’avoir été intimidé et harcelé par ses codétenus. L’intéressé dénonce devant la CEDH les conditions sévères de sa détention et les effets irréparables sur sa santé physique et mentale. Il soutient que ces traitements lui ont été infligés en raison de son orientation sexuelle, en violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) avec l’article 3 (traitement inhumain et dégradant) de la Convention européenne.
La Cour observe que les conditions matérielles de détention dans la cellule d’isolement, qui était destinée à recevoir des détenus ayant fait objet d’une mesure disciplinaire ou des détenus accusés de pédophilie ou de viol, étaient très insatisfaisantes (cellule très sale, mal éclairée, présence de rats, sans lavabo). En outre, pendant les huit mois de son isolement, il a été privé de toute sortie en plein air et de tout contact avec les autres détenus ce qui illustre le caractère exceptionnel des conditions de détention du requérant. La Cour observe que ces conditions étaient dans certains aspects plus strictes que le régime prévu pour les condamnés à une peine de réclusion perpétuelle aggravée. Elle estime que si les craintes de l’administration pénitentiaires sur le fait que le requérant risquait de subir des atteintes à son intégrité rendaient nécessaire la prise de certaines mesures de sécurité pour le protéger, elles ne suffisent pas à justifier une mesure d’exclusion totale de celui-ci de la collectivité carcérale. Par ailleurs, les recours de l’intéressé devant le juge visant à faire contrôler la mesure d’isolement ont été tous rejetés sans examen au fond. Elle conclut donc que les conditions de détention du requérant en cellule d’isolement ont été de nature à lui causer des souffrances aussi bien mentales que physiques ainsi qu’un sentiment de profonde atteinte à sa dignité humaine. Ces conditions, aggravées par l’absence d’un recours effectif, s’analysent en un « traitement inhumain et dégradant » infligé en violation de l’article 3 de la Convention. Enfin, elle juge que le principal motif de l’isolement imposé au requérant n’était pas sa protection mais son orientation sexuelle, en violation de l’article 14 combiné avec l’article 3 de la Convention. |
ECLI : | CE:ECHR:2012:1009JUD002462609 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-113389 |
Documents numériques (2)
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