Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que l'État a manqué à plusieurs égards à son obligation de protéger des femmes originaires d'Asie centrale contre la traite d'êtres humains et la servitude : F.M. et autres c. Russie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 10/12/2024 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 71671/16, 40190/18 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Traite des êtres humains [Mots-clés] Victime [Mots-clés] Enquête [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] genre [Mots-clés] Migrant [Géographie] Russie |
Résumé : |
L’affaire concerne la traite d’êtres humains et l’exploitation par le travail dont trois ressortissantes kazakhes et deux ressortissantes ouzbèkes alléguaient avoir fait l’objet dans des magasins moscovites, et l’attitude des autorités face à cette situation.
La Cour juge en particulier que, dès les premiers signalements qui ont alerté les autorités quant à la situation des requérantes, en 2010, il y avait raisonnablement matière à soupçonner – et il existait même, dans le cas de la quatrième requérante, un commencement de preuve – que les requérantes avaient été victimes de la traite internationale d’êtres humains aux fins de l’exploitation par le travail, ce qui imposait aux autorités russes l’obligation d’intervenir. La Cour estime que le cadre juridique de la Russie était inapproprié, constatant en particulier que son droit pénal n’incriminait pas de manière effective la traite d’êtres humains, le travail forcé et la servitude, et qu’il ne protégeait pas les victimes de la traite. Les autorités n’ont pas pris de mesures pour protéger les requérantes, et ont en revanche considéré les efforts légitimes qui visaient à traduire les auteurs des faits en justice comme inappropriés et potentiellement criminels. Elles ont également manqué à leur obligation d’ouvrir et de conduire une enquête pénale sur les allégations dont elles avaient connaissance et de coopérer avec les autres États concernés. La Cour considère que l’inaction de l’État s’analyse en une approbation répétée de la traite d’êtres humains, de l’exploitation par le travail et de la violence fondée sur le genre, et qu’elle traduit une attitude discriminatoire envers les requérantes liée à leur condition de travailleuses migrantes étrangères en situation irrégulière. Cela a créé un climat propice à la traite et à l’exploitation des requérantes. La Cour conclut aux violations de l’article 4 (interdiction de l’esclavage et du travail forcé) de la Convention européenne des droits de l’homme, à raison : de l’absence de régime législatif approprié visant à interdire et à prévenir la traite d’êtres humains, le travail forcé et la servitude et à en protéger les victimes ; du manquement à l’obligation de prendre des mesures opérationnelles pour protéger les requérantes ; et du manquement à l’obligation de mener une enquête effective, ainsi qu'à la violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination). |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Discrimination - Egalité |
En ligne : | https://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-238319 |