Document public
Titre : | Décision 2024-167 du 6 novembre 2024 relative à un refus de regroupement familial opposé à un réfugié en raison notamment de l’absence de transcription de son acte de mariage dans les registres français |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Droits fondamentaux des étrangers, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 06/11/2024 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2024-167 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Position non suivie d’effet [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Regroupement familial [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Mariage [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Discrimination |
Mots-clés: | Réfugié |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative au refus de l’autorité préfectorale de faire droit à la demande de regroupement familial formulée par un ressortissant soudanais bénéficiant du statut de réfugié en faveur de son épouse.
L’autorité préfectorale a en effet refusé la demande de regroupement familial aux motifs que le réclamant ne fournissait pas la preuve formelle de sa comparution par-devant l’autorité étrangère ayant célébré le mariage et que son mariage n’avait pas été transcrit en France. À titre liminaire, la Défenseure des droits précise que le litige soulève la difficulté relative à l’impossibilité dans laquelle se trouvent les réfugiés dont le mariage a été célébré dans un pays tiers à leur pays d’origine d’obtenir la transcription d’un acte de mariage en France, difficulté l’ayant conduit à formuler des recommandations dans une décision n°2022-077 du 24 février 2023. Constatant que cette difficulté a pour effet, en l’espèce, de faire obstacle à l’exercice du droit du réclamant de vivre en famille, le Défenseur des droits estime nécessaire de présenter des observations devant la juridiction saisie afin de rappeler le cadre d’analyse. En l’espèce, la préfecture estime que l’exigence de transcription d’un acte de mariage sur les registres de l’état civil français imposée aux Français pour le rendre opposable aux tiers en France a également vocation à être opposée aux réfugiés en vertu de l’article 12.1 de la Convention de Genève selon lequel le statut personnel d’une personne réfugiée est régie par la loi du pays de son domicile ou de sa résidence. Or, l’instruction menée par le Défenseur des droits dans le cadre de la décision n°2022-077 du 24 février 2023 auprès de la division de la protection de l’Office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), de la direction générale des étrangers en France (DGEF) et du service central d’état civil (SCEC) du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) a permis d’établir qu’une personne réfugiée en France était dans l’impossibilité d’obtenir d’aucun service administratif français un acte de mariage transcrit ou un certificat de mariage, puis un livret de famille, lorsque le mariage a été célébré dans un pays tiers à celui de son pays d’origine. La Défenseure des droits estime donc que subordonner le droit du réclamant au regroupement familial à la production d’un acte de mariage transcrit sur les registres d’état civil français revient à subordonner l’exercice de droit à l’accomplissement d’une formalité impossible et qu’une telle exigence apparaît dès lors de nature à porter une atteinte excessive à son droit de vivre en famille qui est constitutionnellement et conventionnellement garanti. La Défenseure des droits souligne également que subordonner le droit des réfugiés au regroupement familial à la production d’un acte de mariage transcrit revient à faire peser, sur ces derniers, des conditions plus strictes que celles exigées des autres étrangers régulièrement établis en France pour la jouissance d’un même droit. La Défenseure des droits estime donc que l’exigence faite au réclamant de produire, au soutien de sa demande de regroupement familial, un acte de mariage transcrit sur les registres de l’état civil, dès lors qu’elle renvoie à l’accomplissement d’une formalité impossible et que l’intéressé semble par ailleurs justifier de son mariage avec son épouse par la production de plusieurs documents dont la valeur authentique n’apparaît pas sérieusement contestée, est de nature à méconnaître l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales garantissant le droit au respect de la vie privée et familiale, lu seul et en combinaison avec l’article 14 prohibant les discriminations dans la jouissance des droits consacrés par la Convention. |
Suivi de la décision : |
Par jugement du 3 décembre 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête du réclamant au motif notamment qu’il ne démontrait pas avoir tenté de demander la transcription de son acte de mariage sur les registres de l’état civil français aux autorités consulaires françaises du Soudan du Sud, lieu de célébration de son mariage. Le tribunal administratif conclut également que la décision attaquée n’a pas porté une atteinte disproportionnée au droit du réclamant au respect de sa vie privée et familiale en raison du caractère récent de son mariage et du fait qu’il a pu rejoindre son épouse dans des pays tiers à son pays d’origine. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Etrangers - Migrants |
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