Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que le droit de manifester sa religion sur le lieu de travail est protégé mais doit être mis en balance avec les droits d'autrui : Eweida et autres c. Royaume-Uni |
est cité par : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 15/01/2013 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 48420/10 |
Note générale : | - Vanessa Nivelles, "Limites à la liberté de religion dans l'espace professionnel", Jurisprudence sociale Lamy, 28/03/2013, n°340 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Religion - Croyances [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi public [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Signe religieux |
Résumé : |
L’affaire concerne le droit de manifester la religion sur le lieu de travail de quatre requérants chrétiens :
- une employée d’une compagnie aérienne privée et une infirmière en gériatrie dans un hôpital qui se plaignaient que leurs employeurs respectifs leur avaient interdit de porter de manière visible une croix chrétienne autour du cou sur le lieu de travail ; - un officier d’état civil et un conseiller au sein d’un organisme national de conseil conjugal qui alléguaient avoir été licenciés au motif qu’ils avaient refusé de s’acquitter de certaines de leurs tâches car ils considéraient qu’elles revenaient à reconnaître l’homosexualité, ce qui était incompatible avec leurs convictions. La CEDH énonce que la liberté de religion garantie par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme implique la liberté de manifester sa religion, y compris sur le lieu de travail. Cependant, lorsque la pratique religieuse d’un individu empiète sur les droits d’autrui, elle peut faire l’objet de restrictions et il appartient aux Etats de déterminer les mesures qu’elles estiment nécessaires. La CEDH doit vérifier si les mesures prises au niveau national se justifient dans leur principe et si elles ménagement un juste équilibre entre les divers droits et intérêts en présence. Concernant les deux premières requérantes, la Cour précise que l’absence en droit anglais de disposition protégeant expressément le port de vêtements ou de symboles religieux sur le lieu de travail n’importe pas en soi violation du droit des intéressées de manifester leur religion. Il appartient aux tribunaux internes d’examiner la légitimité du code vestimentaire et la proportionnalité des mesures prises par l’employeur. Dans le cas de l’employée de compagnie aérienne, la CEDH estime que les autorités n’ont pas ménagé un juste équilibre entre, d’une part, le désir de l’intéressée de manifester sa foi et de pouvoir la communiquer à autrui et, d’autre part, le souhait de son employeur de véhiculer une certaine image de marque. Elle note que d’autres employés, avant la requérante, ont été autorisées à porter des vêtements religieux (turban ou hijab) sans aucun effet négatif sur l’image ou la réputation de la société. En outre, la compagnie avait modifié son code vestimentaire pour autoriser le port visible de bijoux religieux quelque temps après, ce qui montre que l’interdiction antérieurement applicable n’était pas d’une importance cruciale. Il y a donc eu violation de l’article 9. Tel n’est pas la conclusion concernant l’infirmière car la Cour estime que l’obligation qui lui a été faite de retirer sa croix pour des raisons de protection de la santé et de la sécurité en milieu hospitalier n’était pas disproportionnée et que l’ingérence dans son droit de manifester sa religion était nécessaire dans une société démocratique. Quant aux deux derniers requérants, la Cour souligne que leurs employeurs poursuivaient un but légitime de protection des droits d’autrui en les obligeant à ne pas avoir de comportement discriminatoire à l’égard des couples homosexuels, ces derniers étant dans une situation comparable à celle de couples hétérosexuels en ce qui concerne leur besoin de reconnaissance juridique et de protection de leurs relations. Les autorités disposent donc d’une ample marge d’appréciation s’agissant de l’équilibre à ménager entre le droit des employeurs de garantir les droits d’autrui et le droit des requérants de manifester leur religion. La Cour estime qu’en l’espèce, un juste équilibre a été ménagé et par conséquent il n’y pas eu de violation des articles 9 ou 14 pris isolément ou combinés. |
Note de contenu : | L'affaire concerne également les requêtes suivantes : 59842/10 ; 51671/10 et 36516/10. |
ECLI : | CE:ECHR:2013:0115JUD004842010 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-115881 |