
Document public
Titre : | Délibération n°2009-318 du 14 septembre 2009 relative à l'exclusion de l'accès à l'éducation des jeunes étrangers |
Auteurs : | Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (2004-2011) |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 14/09/2009 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2009-318 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Origine [Mots-clés] Enfant [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Éducation [Mots-clés] Demande de pièce abusive ou répétitive [Mots-clés] Droit à l'éducation [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Documents internes] Recommandation |
Résumé : |
La HALDE a été saisie par un collectif associatif et syndical d'une réclamation relative aux discriminations dans l'accès à l'éducation en G. Il apparaît notamment que les pièces demandées par certaines communes ne pouvant manifestement pas être fournies pour des enfants étrangers, de telles pratiques aboutissent à les exclure de l'accès à l'éducation. La haute autorité recommande aux communes concernées de mettre fin à ces pratiques, et au préfet le cas échéant de mettre en œuvre les pouvoirs issus du code général des collectivités territoriales afin d'obliger les communes à se conformer aux textes en vigueur.
Elle recommande au recteur de réactiver l'observatoire de la non scolarisation, mis en place en 2005 mais qui n'a plus aujourd'hui d'activité concrète. Enfin, le Collège donne mandat à son Président de recommander, conjointement avec la Défenseure des enfants, aux ministres de l'Education nationale et de l'Intérieur de procéder à une évaluation des besoins et des mesures à prendre pour tenter de résoudre la question de la non scolarisation en G. |
Suivi de la décision : |
En juin 2011, ce même collectif a interpelé le Défenseur des droits sur le fait que les objectifs fixés par l’observatoire n’ont pas été atteints. Les difficultés concernent principalement l’inscription à l’école élémentaire et à l’accès à la cantine, certaines municipalités entravant la scolarisation des enfants par le maintien d’un dossier d’inscription dont les exigences sont abusives. En particulier, le collectif déplore l’absence d’alternatives à la preuve de l’identité de l’enfant, telle que l’attestation de notoriété publique, préconisée par l’observatoire et validée par la Halde, en dépit des problèmes d’accès à l’état civil de populations. Il dénonce aussi le maintien d’une liste restrictive des pièces à fournir en guise de justificatif de domicile (facture, attestation CAF, avis d’imposition…), que les familles étrangères ne peuvent fournir, ainsi que le fait que ces documents doivent être aux nom et adresse des parents directs de l’enfant, ce qui écarte le responsable de fait de l’enfant. A ce titre, l’observatoire et la Halde avaient demandé que la preuve du domicile et de la responsabilité puisse être établie par tout moyen, et notamment par la production d’une attestation sur l’honneur. Par ailleurs, les associations réclamantes font état d’un décrochage scolaire à l’entrée du collège et au lycée. Cette situation serait liée au fait que les établissements d’enseignement secondaires de proximité sont rares voire inexistants dans les sites isolés (dans l’ouest notamment) et que l’accès à la scolarisation des enfants primo-arrivants est entravé par des considérations tenant à leur niveau scolaire et à la régularité de leur séjour. De manière plus générale, les associations déplorent que de nombreux enfants n’aient pas accès à l’éducation en raison d’un manque de classes, de personnels ou de moyens de transports (inexistence, coût dissuasif, justificatifs identiques à ceux exigés abusivement pour l’inscription scolaire…). Enfin, le collectif estime que l’inadaptation du système scolaire à la situation plurilingue et pluriculturelle de la Guyane est le principal facteur d’échec scolaire. Ces derniers points, qui avaient déjà été soulevés devant la Halde, n’avaient néanmoins pas été discutés par l’institution qui avait estimé qu’il s’agissait d’un problème politique de développement de cette région qui ne caractérisait pas en lui-même une différence de traitement fondée sur un critère prohibé par la loi. A l’été 2012, une série de courriers a été adressée aux principales communes de Guyane, leur demandant un certain nombre d’éléments concernant les modalités d’inscription en école maternelle et primaire ainsi que les modalités d’accueil et d’intégration des enfants étrangers. Le rectorat a quant à lui été interrogé sur les instructions données relatives aux modalités d’accueil des enfants primo-arrivants à la maternelle, en primaire et au secondaire, sur les refus d’inscription opposés aux élèves étrangers, sur les conditions d’admission en internat ordinaire et d’excellence, sur l’état des lieux de la mise en place du dispositif des Intervenants en langues maternelles en Guyane et sur les suites données aux recommandations de l’observatoire de la non scolarisation sur l’ensemble de ces questions. Enfin, il a été demandé au préfet de Guyane de communiquer les comptes rendus des réunions qu’il aurait tenues avec le rectorat et les différents maires de Guyane à ce sujet, les suites données aux recommandations de l’observatoire depuis sa réactivation et à celles données aux recommandations de la Halde. Il ressort de l’instruction qu’en date du 26 octobre 2011, le préfet de Guyane a adressé un courrier aux communes du département dans laquelle il rappelle leurs obligations relatives à la scolarisation des enfants étrangers. Le préfet y indique que « l’inscription à l’école se fait généralement sur présentation des documents suivants : justificatif d’identité et de domicile et attestation de vaccinations obligatoires » et précise que « l’exigence de tout autre document aboutit à une différence de traitement qui pourrait revêtir un caractère discriminatoire (…) ». Cependant, l’enquête menée par la Halde avait déjà montré que la difficulté ne résidait pas toujours dans la demande de documents supplémentaires à ceux-là, mais bien dans les moyens admis pour établir la preuve de l’identité de l’enfant et celle de son domicile. Les réponses adressées au Défenseur des droits par les municipalités citées viennent confirmer le fait que la liste des documents admis pour justifier de l’identité de l’enfant et de son domicile est variable d’une commune à l’autre, qu’elle ne précise pas toujours, ou bien seulement en partie, la possibilité de produire une attestation de notoriété publique et/ou une attestation de domiciliation et que la mention du représentant de l’enfant autre que le parent direct n’est pas systématiquement indiquée. Les difficultés semblent être les mêmes pour l’accès au transport et à la cantine, auxquelles il faut ajouter parfois une demande de production d’attestation CAF. S’agissant du justificatif de domicile, le maire de Macouria a indiqué que si la collectivité n’exigeait pas en principe qu’il soit obligatoirement établi au nom d’un parent direct de l’enfant en raison des difficultés relatives à la complexité du tissu social local, il arrivait souvent dans la pratique que de nombreuses correspondances soient retournées en mairie avec la mention « adresse incomplète ou « destinataire non identifiable », ce qui complique considérablement l’entrée en relation avec les parents et peut entraîner des conséquences sur la bonne gestion de la scolarité des enfants. Selon lui, cette situation est particulièrement fréquente dans les zones d’habitat spontané. En l’état des éléments transmis, il apparaît que les procédures d’accueil des enfants en Guyane ne sont pas du tout harmonisées et qu’elles ne prennent que partiellement en compte les recommandations faites par l’observatoire de la non scolarisation et par la Halde. En ce qui concerne les autres difficultés d’ordre plus général soulevées par les associations, il faut convenir que l’absence de réponse du rectorat et des différentes communes sur ces points ne permet pas l’exploitation d’informations supplémentaires. D’une manière plus générale, l’étude de ce dossier pointe les limites de l’instruction traditionnelle pour une question très dense qui dépasse, au regard du champ de compétence du Défenseur des droits, celle de l’inscription à l’école et des discriminations qui en résultent et qui nécessite du fait des particularités du territoire concerné et de son éloignement que l’approche qui en est faite soit redéfinie. |
Documents numériques (1)
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