Document public
Titre : | Décision 2023-003 du 8 février 2023 relative à un harcèlement sexuel, ayant conduit à son licenciement pour inaptitude |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Discriminations dans le secteur privé, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 08/02/2023 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2023-003 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation [Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Documents internes] Règlement en droit [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Harcèlement sexuel [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Licenciement |
Mots-clés: | Harcèlement d'ambiance ; obligation de sécurité |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative à un harcèlement sexuel, ciblé et environnemental, ayant conduit à un licenciement pour inaptitude.
La réclamante, Madame X, est embauchée par contrat à durée indéterminée en date du 15 mai 2018 au sein de la société mise en cause, en qualité de support client. A compter du 1er décembre 2019, jusqu’au 3 décembre 2020, date de son licenciement, la réclamante exerçait les fonctions de service « delivery manager ». Elle est alors la seule femme dans une équipe d’une vingtaine de collaborateurs. Dans le cadre de son activité professionnelle, la réclamante a fait l’objet de plusieurs propos et comportements sexistes de la part de ses collègues de travail. Au soutien de ses allégations, la réclamante fournit le témoignage d’une de ses anciennes collègues, qui a travaillé avec la réclamante de février 2018 à août 2019 sur le plateau d’appel de la société. Elle produit également plusieurs courriels, envoyés par un de ses collègues de travail, dans lesquels figurent des images ou jeux de mots à caractère sexuel. Lors de l’entretien annuel d’évaluation en avril 2020, la réclamante aurait fait part à son supérieur hiérarchique direct des remarques et propos sexistes dont elle fait l’objet. Par courriel, la réclamante soulève une nouvelle fois le sujet avec son supérieur hiérarchique en lui écrivant que la situation n’a pas évolué et que certaines blagues la mettent mal à l’aise au travail. Quelques jours plus tard, la réclamante écrit à la responsable des ressources humaines, en lui racontant les propos et agissements sexistes dont elle fait l’objet. Madame X dénonce à ce titre « des blagues [qui] sont devenues de plus en plus vulgaires » et illustre ce point en citant certains propos tenus par des collaborateurs de son équipe. Le même jour, elle est placée en arrêt maladie par son médecin traitant. Une enquête interne est menée conjointement par la responsable des ressources humaines et par la référente en matière de harcèlement sexuel au sein de l’entreprise. Quelques semaines plus tard, Madame X reçoit une lettre de la société mise en cause intitulée « conclusions de l’enquête », dans laquelle il est écrit : « il ressort de cette enquête que les propos tenus (jeux de mots à propos d’un client) ne vous visaient pas personnellement et qu’ils ne correspondraient pas exactement à la reproduction que vous en avez donnée, ce qui nous laisse à penser qu’il s’agirait d’une mauvaise compréhension des échanges entre les différents collaborateurs réunis ce jour-là ». Deux mois plus tard, la réclamante est déclarée inapte en une seule visite par le médecin du travail, avec dispense d’obligation de reclassement, pour le motif suivant : « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ». Elle est par la suite licenciée pour inaptitude. Au vu de ces éléments, le Défenseur des droits a décidé d’engager une instruction et a transmis une note récapitulative à l’employeur. Celui-ci se défend en faisant valoir la société mise en cause a mis en place toutes les mesures d’action à la suite de la dénonciation des faits de harcèlement sexuel, et qu’elle a de ce fait respecté son obligation de sécurité. La société a par ailleurs contesté la compétence du Défenseur des droits en matière de harcèlement sexuel, ainsi que la notion de harcèlement sexuel d’ambiance, qu’elle considère comme n’ayant pas été admise par la jurisprudence. Le Défenseur des droits, après avoir rappelé qu’en application de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, la discrimination « inclut » le harcèlement sexuel, considère que la société mise en cause n’a pas rapporté la preuve selon laquelle elle avait respecté son obligation de sécurité et pris les mesures nécessaires à la suite de la dénonciation des faits de harcèlement sexuel par la réclamante. Le Défenseur des droits a ainsi estimé qu’au vu des éléments du dossier, la réclamante avait été victime d’un harcèlement sexuel, ciblé et environnemental. Ce harcèlement ayant conduit à un licenciement pour inaptitude, le Défenseur des droits considère que le licenciement encourt la nullité. Par conséquent, la réclamante n’ayant pas saisi de juridiction, le Défenseur des droits a décidé de formuler des recommandations à la société mise en cause en lui recommandant de modifier ses méthodes en termes de traitement des faits de harcèlement sexuel et d’établir une procédure écrite à tenir en cas de signalements de harcèlement sexuel, ainsi que de se rapprocher de la réclamante pour lui indemniser son préjudice. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Discrimination - Egalité |
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