Document public
Titre : | Avis relatif à la compatibilité de la règle de l'anonymat des donneurs de gamètes avec la Convention européenne des droits de l'homme |
Auteurs : | Conseil d'État |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 13/06/2013 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 362981 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Règlementation des services publics [Mots-clés] Anonymat [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Don de gamètes [Mots-clés] Accès aux origines [Mots-clés] Bioéthique |
Résumé : |
Dans une affaire relative à l’anonymat des dons de gamètes, le tribunal administratif a décidé, avant de statuer sur la demande d’un requérant, né d’un dons de gamètes, de transmettre le dossier au Conseil d’Etat pour avis. Il s’agit de savoir si les dispositions législatives qui restreignent la possibilité pour les receveurs d’un don de gamète d’avoir accès aux données non identifiantes de nature médicale sont compatibles avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. L’intéressé soutenait qu’elles porteraient une atteinte excessive au droit des receveurs de dons de gamètes au respect de leur vie privée, qui implique le droit pour ceux-ci d’accéder aux informations pertinentes leur permettant d’évaluer les risques pour leur santé et de prendre, le cas échéant, les mesures pour s’en prémunir, et créeraient, entre les enfants ainsi conçus et les autres, une discrimination fondée sur la naissance. De même, le Conseil est interrogé sur la question de savoir si les dispositions législatives interdisant de façon générale et absolue, la communication au bénéfice du receveur d’un don de gamètes d’informations permettant d’identifier l’auteur de ce don, sans prévoir et organiser de dérogation à cette règle notamment dans le cas où ce dernier, ainsi que la famille légale du demandeur, donneraient leur consentement à la transmission de ces données sont compatibles avec les articles 8 et 14 de la Convention précitée dans la mesure où elles porteraient une atteinte excessive au droit des enfants ainsi conçus au respect de leur vie privée, qui implique le droit de ceux-ci à la connaissance de leurs origines. Le Conseil d’Etat répond que les dispositions législatives en cause sont compatibles avec la Convention européenne. Quant à la première question, le Conseil estime que le législateur a entendu assurer, au moyen tant de mesures de prévention que de soins, la protection de la santé des personnes issues d’un don de gamètes, tout en garantissant le respect des droits et libertés d’autrui. Il énonce que s’il est vrai qu’ainsi la plupart de ces données médicales ne sont accessibles qu’au médecin et non à la personne elle-même, la conciliation des intérêts en cause ainsi opérée et la différence de traitement entre le médecin et toute autre personne relèvent de la marge d’appréciation que les dispositions de l’article 8 de la Convention réservent au législateur national, eu égard notamment aux inconvénients que présenterait la transmission de ces données aux intéressés eux-mêmes par rapport aux objectifs de protection de la santé, de préservation de la vie privée et de secret médical. En conséquence, les règles d’accès aux données non identifiantes de nature médicale fixées par le code la santé publique et le code civil ne sont pas, en l’état des connaissances médicales et des nécessités thérapeutiques, incompatibles avec l’article 8 de la Convention. En outre, il estime qu’aucune discrimination au sens de l’article 14 de la Convention, ne frappe l’enfant issu d’un don de gamète en matière d’accès aux données non identifiantes de nature médicale. En effet, l’enfant issu d’un don de gamètes ne se trouve pas dans une situation analogue, et par suite comparable ni à celle des enfants du donneur de gamètes, ni à celle des enfants du couple receveur. Par ailleurs, il n’existe pas, pour ces autres enfants un droit à l’accès à des données non identifiantes de nature médicale. Enfin, concernant la seconde question, le Conseil d’Etat estime qu’en interdisant la divulgation de toute information sur les données personnelles d’un donneur de gamètes, le législateur a établi un juste équilibre entre les intérêts en présence et que, dès lors, cette interdiction n’est pas incompatible avec les dispositions de la Convention. |
En ligne : | http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000027542911 |