Document public
Titre : | Rappel à la loi RAL-2023-001 du 13 septembre 2023 relatif aux conditions d’accès discriminatoires au sein d’un établissement de bowling |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Discriminations dans le secteur privé, Auteur |
Type de document : | Rappels à la loi |
Année de publication : | 13/09/2023 |
Numéro de décision ou d'affaire : | RAL-2023-001 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Rappel à la loi [Mots-clés] Biens et services [Mots-clés] Sports et loisirs [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Discrimination directe [Mots-clés] Religion - Croyances [Mots-clés] Apparence physique [Mots-clés] Moeurs [Mots-clés] Signe religieux |
Mots-clés: | Tenue vestimentaire |
Texte : |
En décembre 2022, l’établissement de bowling géré par la société X a affiché sur sa porte d’entrée un panneau indiquant : « ETABLISSEMENT PRIVE – TENUE CORRECTE EXIGEE SVP – Casquettes, bonnets, survêtements ainsi que tout vêtement exotique et à connotation religieuse INTERDITS – La direction se réserve le droit d’interdire l’entrée ou d’exclure définitivement toute personne susceptible de nuire à la quiétude de l’établissement ».
A la suite de la médiatisation de ces conditions, l’affiche initiale a été retirée et remplacée le 25 janvier 2023 pour supprimer les mentions de « vêtement exotique et à connotation religieuse », interdisant simplement les « casquettes, bonnets, survêtements ». Après l’interpellation de plusieurs usagers, la Défenseure des droits s’est saisie d’office par décision n°2023-026 du 16 février 2023 de ces faits au vu du potentiel caractère discriminatoire de ces conditions d’accès. Interrogé par le Défenseur des droits sur la signification, ou définition, par l’établissement de ce que constitue un « vêtement exotique » et la justification de leur interdiction, l’établissement a précisé entendre que cela recouvre ce « qui (dans la perception occidentale) est perçu comme étrange et lointain et stimule l’imagination » ou « qui provient de pays lointains, notamment tropicaux ». A cet égard, l’interdiction des « vêtements exotiques », dont la qualification repose sur des stéréotypes et préjugés liés à l’origine ethnique, au sein de l’établissement X pourrait être considérée comme discriminatoire en raison de l’origine. Sur la question de l’interdiction du port de vêtements à connotation religieuse, la société indique en réalité avoir ajouté cette condition dans le but de prohiber le port de la « burqa » dissimulant le visage mais avoir visé l’ensemble des signes à connotation religieuse « pour ne pas stigmatiser les personnes portant la burqa ou le niqab ». Un établissement privé commercial ne peut toutefois pas interdire à sa clientèle le port de signes religieux, à moins de justifier cette interdiction par un but légitime, tel que des conditions d’hygiène et de sécurité, et que les moyens de parvenir à ce but sont nécessaires et appropriés. Il sera relevé qu’en l’espèce, le but légitime invoqué, à savoir l’interdiction du port de tenues destinées à dissimuler son visage pour des raisons de sécurité, ne saurait justifier l’interdiction disproportionnée du port de tous les signes religieux, qui pourrait être analysé comme discriminatoire en raison des convictions religieuses, et pourrait être atteint par la seule interdiction de la dissimulation du visage dans l’établissement. Enfin et sur la question de l’interdiction des « casquettes, bonnets, survêtements », l’établissement précise d’une part exiger une « tenue correcte, pantalon de ville, jeans » de la part de la clientèle, organisant régulièrement des soirées dansantes à thème, et ajoute que le port du survêtement serait interdit par le règlement officiel de la fédération de bowling. Il ressort toutefois de l’article 17 du règlement sportif de la Fédération française de bowling et de sports de quilles relatif aux tenues des joueurs que les hommes sont autorisés à porter « tout pantalon à l’exception du Blue jean » et que les femmes peuvent porter « tout pantalon, pantacourt, short habillé ou jupe » à l’exception des « vêtements en Blue-Jean’s, ainsi que les caleçons et autres vêtements collants ». Les restrictions vestimentaires mises en place pourraient de ce fait être considérées comme discriminatoires sur le fondement de l’apparence physique. La société souligne que l’établissement se trouve à proximité de sites de trafic de drogue, engendrant des agressions de la clientèle par des trafiquants sur le trajet entre l’établissement et les transports publics, et que ces agresseurs porteraient des bonnets ou casquettes pour tenir leur visage dissimulé des caméras de surveillance dans l’établissement. Si le maintien de la sécurité de la clientèle constitue un objectif légitime, il apparaît cependant que celui-ci pourrait être atteint de la même manière que le précédent point en interdisant de manière neutre et générale le port de tenues dissimulant le visage. En conséquence et compte tenu du retrait préalable des conditions d’accès discriminatoires relatives aux « vêtements exotiques et à connotation religieuse », le Défenseur des droits a adressé à la société X un courrier lui rappelant les dispositions applicables relatives à l’interdiction des discriminations dans l’accès aux biens et aux services. Il a notamment été souligné que les dispositions d’un règlement intérieur ne sauraient permettre à elles seules d’écarter l’application de la loi ni d’autoriser la mise en œuvre de pratiques discriminatoires illicites. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Discrimination - Egalité |