Document public
Titre : | Règlement amiable RA-2023-049 du 24 aout 2023 relatif à la publication d’indications discriminatoires sur une plateforme de mise en relation entre propriétaires et locataires en raison du lieu de résidence des garants |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Discriminations dans le secteur privé, Auteur |
Type de document : | Règlements amiables |
Année de publication : | 24/08/2023 |
Numéro de décision ou d'affaire : | RA-2023-049 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Règlement amiable [Documents internes] Règlement amiable réussi [Mots-clés] Logement [Mots-clés] Location [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Discrimination directe [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Lieu de résidence [Mots-clés] Caution [Mots-clés] Biens et services |
Texte : |
Monsieur X a répondu à une annonce pour un logement situé à A (France) sur le site web Y pour manifester son intérêt pour ce logement et convenir d’une visite.
Dans son message, Monsieur X a précisé que ses parents pouvaient par ailleurs se porter caution solidaire du bail, et qu’il pouvait à défaut souscrire la garantie visale. Par courriel du même jour, la propriétaire du logement, Madame Z, a répondu : « Merci pour l’intérêt porté à notre annonce pourriez-vous vous décrire la situation de vos parents et m’indiquer s'ils résident en France. » Monsieur X a indiqué à Madame Z que ses parents résidaient en Italie. Suite à cette précision, Madame Z a répondu au réclamant : « Je suis désolée mais vos parents résident à l’étranger et en cas d’incidents cela reste compliqué vu la distance. En ce qui concerne la garantie visale, nous ne l’acceptons pas, nous demandons un garant physique qui réside en France. » Interrogée par les services du Défenseur des droits, Madame Z a souligné avoir simplement suivi les recommandations du site web Y. Il ressortait alors de la consultation de la page du site web Y à l’attention des propriétaires utilisateurs de la plateforme relatives au fonctionnement de la caution solidaire qu’il était conseillé à ces propriétaires de « privilégier un garant qui réside habituellement sur le territoire français, afin de faciliter les démarches en cas de contentieux », mettant l’accent sur la difficulté de recouvrer des sommes dues auprès d’un garant étranger. Interrogée par les services du Défenseur des droits, la société Y a fait valoir que les indications précitées ne seraient pas concernées par l’article 22-1 de la loi n°89-462, lequel interdit de refuser la caution présentée par un locataire au motif « qu'elle ne réside pas sur le territoire métropolitain » dès lors que cette prohibition a été ajoutée dans le texte par un amendement du 16 juillet 2006 visant explicitement les situations où un garant serait refusé en raison d’une résidence sur le territoire français outre-mer. Les services du Défenseur des droits ont toutefois souligné, d’une part, l’imprécision de la disposition évoquée relevée à plusieurs reprises depuis son entrée en vigueur, et qu’il convenait d’envisager cette disposition dans le contexte de l’évolution normative du droit de la non-discrimination dans les années suivant l’introduction de la mention concernée par l’amendement du 16 juillet 2006, nommément au travers de la loi n°2008-496 précitée, dont l’article 2 3° prohibe désormais toute discrimination en raison du lieu de résidence dans la fourniture de biens et services. Dans ce contexte, et en l’absence de jurisprudence permettant de trancher la question, ne saurait être écartée l’hypothèse selon laquelle l’article 22-1, alinéa 3 de la loi n°89-462 ne s’applique pas uniquement aux garants résidant en outre-mer, mais également aux garants résidant à l’étranger. Les services du Défenseur des droits ont relevé d’autre part que le fait d’enjoindre les propriétaires utilisateurs de la plateforme Y à refuser les garants résidant à l’étranger laissait présumer l’existence d’une discrimination par association sur le fondement du lieu de résidence au titre des articles 1er 2° et 2 3° de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. En effet, il existe en droit de l’Union européenne des procédures spécifiques de recouvrement de dettes entre États membres, dont des procédures simplifiées et facilement exécutables dans des conditions similaires aux procédures existant au niveau national. Ainsi, en cas de litige relatif à un non-paiement de loyer par un locataire, un créancier dispose de moyens accessibles et standardisés permettant de recouvrir les sommes litigieuses auprès d’un garant dont la nationalité et le domicile relèvent d’un Etat membre de l’Union européenne, fournissant des moyens d’action comparables à ceux existant pour les litiges strictement nationaux. Si la sécurité financière des propriétaires et bailleurs usagers de la plateforme Y répond bien à un objectif légitime, les recommandations de la société visant à remplir cet objectif ne sauraient être qualifiées de nécessaires et appropriées eu égard au respect du principe de non-discrimination en raison de leur caractère non proportionné. Au regard des éléments de faits et de droit précités, les services du Défenseur des droits ont sollicité auprès de la société Y un réexamen en droit de la formulation des recommandations sur le site web Y permettant de refléter plus adéquatement les dispositions en vigueur applicables. En conséquence, la société Y a fait suite à cette demande et a informé les services du Défenseur des droits de la modification des indications concernées sur son site web, en accord avec le principe de non-discrimination : - en supprimant le conseil de refuser tout garant résidant hors de France, - en précisant l’existence de procédures de recouvrement facilitées en cas de litige avec un garant résidant dans l’Union Européenne, - et en mettant en exergue la nécessité pour le bailleur de s'informer sur les éventuelles contraintes liées à la procédure de recouvrement en cas d'impayés avant de refuser un garant en raison de son lieu de résidence. En parallèle, les services du Défenseur des droits ont également rappelé à Madame Z les dispositions légales applicables en matière de lutte contre les discriminations au logement fondées sur le lieu de résidence. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Logement - Hébergement - Domicile |