Document public
Titre : | Décision 2023-169 du 27 juillet 2023 relative à un refus discriminatoire en raison de l’état de santé d’intégrer le corps des ingénieurs de l’armement en lien avec le diabète du réclamant |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Fonction publique, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 27/07/2023 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2023-169 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation [Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Mots-clés] Emploi public [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Embauche [Mots-clés] État de santé [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Armée [Mots-clés] Maladie chronique [Mots-clés] Carrière |
Résumé : |
La Défenseure des droits a été saisie par un élève à l’École Polytechnique à la date des faits, diabétique de type 1 (insulino-dépendant).
Le classement de sortie du réclamant lui permettait d’intégrer le corps des ingénieurs de l’armement, à statut militaire. Le réclamant fait état d’une discrimination en raison de son état de santé eu égard à la déclaration d’inaptitude pour une intégration dans le corps des ingénieurs de l’armement dont il a fait l’objet, dès lors que sa capacité réelle à exercer les missions postulées n’aurait pas été prise en compte. Le juge administratif (voir, notamment, CE, 6 juin 2008, n° 299943) a précisé les modalités d’appréciation de la condition d’aptitude des candidats aux emplois publics, y compris les emplois militaires, en posant le principe selon lequel seule la capacité réelle à exercer les missions postulées au moment de l’admission dans le corps doit être retenue dans le cadre d’une procédure de recrutement, les exclusions a priori de personnes affectées notamment d’une maladie évolutive étant ainsi proscrites. Il résulte de cette jurisprudence que l’appréciation des conditions particulières d’aptitude des candidats à des fonctions publiques (militaires inclus) doit se faire : - au vu de la capacité de chaque candidat au moment de l’admission ; - in concreto, au regard des fonctions auxquelles le candidat est destiné ; - et en cas de maladie évolutive, en tenant compte de l’existence de traitements permettant de guérir l’affection ou de bloquer son évolution, ou de l’absence de nécessité de tels traitements. Cette exigence a été reprise par la loi n° 2021-1575 du 6 décembre 2021 relative aux restrictions d'accès à certaines professions en raison de l'état de santé, dont l’article 2 entré en vigueur le 1er décembre 2022. En l’espèce, la capacité réelle du réclamant à exercer les missions postulées n’a pas été prise en compte. Le médecin-chef qui a examiné l’aptitude du réclamant s’est cru lié par la classification du SIGYCOP et en a fait une application systématique, conduisant à une exclusion a priori du candidat atteint d’un diabète insulino-dépendant. Or, dans un certificat, son diabétologue-endocrinologue avait précisé que son état de santé était stabilisé et qu’il présentait un diabète de type 1 parfaitement équilibré sous traitement par pompe à insuline, ne présentant aucune complication micro ou macroangiopathique. Ce médecin a ajouté que les effets secondaires liés au traitement (hypoglycémies) sont peu fréquents, ressentis et corrigés de manière adéquate. En outre, le réclamant a réussi les tests d’aptitude physique et sportive pour l’accès à l’École Polytechnique, ce qui atteste également de sa très bonne condition physique et de sa capacité à exercer les missions postulées. Enfin, si les ingénieurs de l’armement ont un statut militaire, ils exercent principalement des fonctions sédentaires et n’ont pas vocation à intervenir sur le terrain dans le cadre d’opérations militaires. Par ailleurs, si l’administration indique que l’aptitude médicale au recrutement dans les armées s’apprécie non au regard d’un poste ou d’un corps particulier mais au regard des exigences induites par l’état de militaire, il n’en demeure pas moins qu’il résulte de la jurisprudence (notamment celle précitée du Conseil d’État), que l’appréciation des conditions particulières d’aptitude des candidats à des fonctions publiques (militaires inclus) doit se faire in concreto, au regard des fonctions auxquelles le candidat est destiné. À défaut de procéder ainsi, comme cela a été le cas en l’espèce, la discrimination peut être retenue. Par conséquent, la Défenseure des droits a considéré que le refus opposé au réclamant d’intégrer le corps des ingénieurs de l’armement en raison de son diabète constituait une discrimination en raison de son état de santé en méconnaissance des articles 1er et 2 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, sa capacité réelle à exercer les missions postulées n’ayant pas été prise en compte. Par conséquent, la Défenseure des droits a recommandé au ministre des armées d’adresser une note de service au service de santé des armées rappelant que lors de l’examen de l’aptitude médicale d’un candidat, l’appréciation des conditions particulières d’aptitude doit se faire au regard de la capacité réelle à exercer les fonctions et non pas in abstracto sans lien avec ces dernières. Elle lui a également recommandé d’examiner la possibilité de modifier la cotation prévue par l’arrêté du 29 mars 2021 relatif à la détermination du profil médical d’aptitude en cas de pathologie médicale ou chirurgicale, attribuée au sigle G du référentiel SIGYCOP aux candidats atteints de diabète de type 1 ou 2 afin d’éviter leur exclusion systématique de l’accès aux emplois militaires. La Défenseure des droits a enfin recommandé d’indemniser le réclamant des préjudices subis, dès lors que celui-ci lui aura adressé une demande préalable indemnitaire. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Discrimination - Egalité |
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