Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que l’interdiction d’exporter des gamètes ou des embryons dans un pays qui autorise l’insémination post mortem ne méconnaît pas le droit au respect de la vie privée protégé par l’article 8 de la Convention : Baret et Caballero c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 14/09/2023 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 22296/20, 37138/20 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Géographie] Espagne [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Assistance médicale à la procréation (AMP) [Mots-clés] Décès |
Mots-clés: | Embryon |
Résumé : |
Dans son arrêt de chambre, rendu dans l’affaire Baret et Caballero c. France, la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu non-violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme.
Les deux affaires concernent l’interdiction d’exportation des gamètes du mari défunt de la première requérante et des embryons du couple que formaient la seconde requérante et son mari décédé vers l’Espagne, pays qui autorise la procréation post mortem. La Cour reconnaît tout d’abord que l’interdiction litigieuse affecte la vie privée des requérantes, dès lors que la possibilité pour une personne d’exercer un choix quant au sort à réserver à ses embryons ou gamètes relève de son droit à l’autodétermination, et constitue une ingérence dans leur droit de tenter de procréer en recourant aux techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP). La Cour admet ensuite que l’ingérence litigieuse qui découle de la conception de la famille telle qu’elle prévalait à l’époque et vise à garantir le respect de la dignité humaine et du libre arbitre et à atteindre un juste équilibre entre les intérêts des différentes parties prenantes à une AMP, répond aux buts légitimes de la « protection des droits et libertés d’autrui » et de la « protection de la morale ». S’agissant de la nécessité de l’ingérence litigieuse, la Cour constate que l’interdiction absolue de l’insémination post mortem en France relève d’un choix politique et que, s’agissant d’une question de société portant sur des enjeux d’ordre moral ou éthique, il y a lieu d’accorder une importance particulière au rôle du décideur national. Elle relève par ailleurs que l’interdiction d’exportation des gamètes ou embryons, qui revient à exporter l’interdiction de la procréation post mortem sur le territoire national, vise à faire obstacle au risque de contournement des dispositions du code de la santé publique posant cette interdiction. Elle note également que, jusqu’à l’intervention de la loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique, le législateur s’est efforcé de concilier la volonté d’élargir l’accès à l’AMP et le respect des préoccupations de la société quant aux questionnements éthiques délicats soulevés par la perspective de la conception posthume. La Cour considère que les constats qui précèdent sont également pertinents en ce qui concerne l’interdiction du transfert d’embryon post mortem après avoir rappelé qu’elle ne reconnaît pas à l’embryon la qualité de sujet de droit autonome. La Cour souligne que le Conseil d’État a exercé son contrôle sur les refus litigieux conformément à la méthodologie qu’il avait arrêtée dans sa décision Gonzalez Gomez et que, dans les circonstances des espèces, elle n’a pas lieu de se départir des solutions retenues par le juge interne. Elle en conclut que les autorités internes ont ménagé un juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu, que l’État défendeur n’a pas outrepassé la marge d’appréciation dont il disposait et, partant, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la Convention. La Cour reconnaît néanmoins que l’ouverture, depuis 2021, par le législateur de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules pose de manière renouvelée la pertinence de la justification du maintien de l’interdiction dénoncée par les requérantes. |
ECLI : | CE:ECHR:2023:0914JUD002229620 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Bioéthique |
En ligne : | https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-226475 |
Cite : |
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