Document public
Titre : | Décision 2022-126 du 9 juin 2022 relative à la recevabilité de l’attestation de demande d’asile présentée comme justificatif d’identité dans le cadre d’une demande d’établissement d’un acte de reconnaissance de paternité |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Justice et libertés, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 09/06/2022 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2022-126 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction [Mots-clés] Convention européenne des droits de l'homme [Mots-clés] Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Asile [Mots-clés] Papiers d'identité [Mots-clés] Paternité [Mots-clés] Filiation [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant |
Résumé : |
La Défenseure des droits a été saisie d’une demande d’intervention suite au refus qui a été opposé à un demandeur d’asile, par les services de l’état civil, d’enregistrer sa reconnaissance de paternité au motif que l’attestation de demande d’asile qu’il a présentée ne constituerait pas un justificatif d’identité valable. L’intéressé a notamment été invité à produire un titre de séjour ou un passeport.
La Défenseure des droits a d’abord rappelé que l’attestation de demande d’asile est un document officiel prévu par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui remédie à la situation factuelle et juridique dans laquelle les demandeurs d’asile sont placés. En outre, l’attestation de demande d’asile est un document qui satisfait aux exigences de l’article 316 du Code civil aux termes duquel « l’acte de reconnaissance est établi sur déclaration de son auteur, qui justifie : 1° De son identité par un document officiel délivré par une autorité publique comportant son nom, son prénom, sa date et son lieu de naissance, sa photographie et sa signature ainsi que l'identification de l'autorité qui a délivré le document, la date et le lieu de délivrance ». La circulaire du 20 mars 2019 de présentation des dispositions destinées à lutter a priori contre les reconnaissances frauduleuses ayant été invoquée par les services de l’état civil, la Défenseure des droits a notamment rappelé qu’une circulaire ne peut ni retrancher ni ajouter à un texte de niveau supérieur. La circulaire précitée ne peut donc écarter de la liste des pièces susceptibles de justifier de l’identité des documents qui remplissent les conditions de l’article 316 du Code civil. Aussi, la circulaire ne saurait fonder le refus opposé à l’intéressé de prendre en compte l’attestation de demande d’asile comme justificatif de son identité. Par ailleurs, selon la Cour européenne des droits de l’homme, le respect de la vie privée, tel que garanti par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, « exige que chacun puisse établir les détails de son identité d’être humain, ce qui inclut sa filiation ; un aspect essentiel de l’identité des individus est en jeu dès lors que l’on touche à la filiation ». Enfin, la Défenseure des droits rappelle que l’intérêt supérieur de l’enfant prévu par l’article 3 § 1 de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) suppose que ce dernier soit rattaché juridiquement à ses deux parents, afin qu’il puisse bénéficier de la protection et de l’éducation du couple parental, de la stabilité des liens familiaux et affectifs, et d’une intégration complète dans sa famille. De plus, la CIDE dispose en son article 8 que « Les États parties s’engagent à respecter le droit de l’enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales tels qu’ils sont reconnus par loi, sans ingérence illégale ». En conséquence, l’attestation de demande d’asile présentée à l’occasion de la demande d’enregistrement d’un acte de reconnaissance de paternité paraît constituer un justificatif d’identité valable au sens de l’article 316 du code civil. En outre, le refus de prendre en compte l’attestation de demande d’asile au titre des pièces permettant à l’auteur de la reconnaissance de l’enfant de justifier de son identité pourrait être considéré comme portant atteinte aux droits de l’enfant garantis par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et par les articles 3 et 8 de la CIDE. |
Suivi de la décision : |
Par ordonnance du 18 juillet 2022, le président du tribunal a rejeté les demandes du réclamant. Cela étant, l’officier d’état civil a de nouveau convoqué l’intéressé et établi un acte de reconnaissance de paternité le 8 septembre 2022. Mention en a été portée le jour même en marge de l’acte de naissance de l’enfant. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Etrangers - Migrants |
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Documents numériques (1)
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