Document public
Titre : | Arrêt relatif à la violation de l’article 8 de la Convention en raison de la collecte et conservation, par l’Établissement français du sang, de données personnelles reflétant l’orientation sexuelle supposée du requérant mais dépourvues de base factuelle avérée : Drelon c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 08/09/2022 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 3153/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Technologies du numérique [Mots-clés] Données personnelles [Mots-clés] Fichier [Mots-clés] Informatique et libertés [Mots-clés] Santé - soins [Mots-clés] Don de sang [Mots-clés] Identité de genre [Mots-clés] Orientation sexuelle [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Préjudice [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Responsabilité [Mots-clés] Responsabilité de l'Etat |
Mots-clés: | préjudice moral |
Résumé : |
Dans cet arrêt de chambre, la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme.
Les requêtes concernent d’une part, la collecte et la conservation, par l'Établissement français du sang, de données personnelles reflétant l’orientation sexuelle supposée du requérant ainsi que le rejet, par les juridictions pénales, de la plainte pour discrimination qu'il avait déposée et, d’autre part, les refus opposés à ses candidatures au don du sang ainsi que le rejet, par le Conseil d'État, de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du 5 avril 2016 modifiant les critères de sélection des candidats au don de sang. S'agissant de la première requête, la Cour considère que la collecte et la conservation de données personnelles sensibles constituent une ingérence dans le droit au respect de la vie privée du requérant. Elle juge que cette ingérence était fondée sur une base légale prévisible, le pouvoir d’appréciation laissé aux autorités concernant la création de fichier de santé étant, en la matière, suffisamment encadré par la loi du 6 janvier 1978 alors applicable. Après avoir considéré que la collecte et la conservation de données personnelles relatives aux résultats des procédures de sélection des candidats au don du sang contribuent à garantir la sécurité transfusionnelle, elle précise que, pour autant, il est particulièrement important que les données sensibles concernées par ce traitement soient exactes, mises à jour, adéquates, pertinentes et non excessives par rapport aux finalités poursuivies, et que leur durée de conservation n’excède pas celle qui est nécessaire. Or, la Cour relève en premier lieu qu'alors que le requérant avait refusé de répondre aux questions relatives à sa sexualité lors de l’entretien médical préalable au don, le traitement de données a été renseigné par la contre-indication au don propre aux hommes ayant eu un rapport sexuel avec un homme. Elle en déduit que les données collectées, fondées sur de simples spéculations, ne reposaient sur aucune base factuelle avérée. En second lieu, après avoir relevé que le Gouvernement ne démontrait pas que la durée de conservation des données litigieuses, (jusqu'en 2278 à l’époque des faits litigieux), était encadrée de telle sorte qu’elle ne puisse pas excéder celle nécessaire aux finalités pour lesquelles elles avaient été collectées, la Cour juge que la durée excessive de conservation des données litigieuses a rendu possible leur utilisation répétée à l’encontre du requérant, entraînant son exclusion automatique du don de sang. Il y a donc eu violation de l’article 8 de la Convention en raison de la collecte et de la conservation des données personnelles litigieuses. La Cour dit que la France doit verser au requérant 3 000 euros pour dommage moral, et 9 000 euros pour frais et dépens. |
ECLI : | CE:ECHR:2022:0908JUD000315316 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Technologies du numérique |
En ligne : | https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-219069 |