Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait qu’un Etat membre ne peut considérer la demande de protection internationale introduite par un enfant comme étant irrecevable au motif qu’une protection internationale a été accordée aux membres de sa famille par un autre État membre : RO (Allemagne) |
Auteurs : | Grande chambre, Cour de justice de l'Union européenne, Auteur ; Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 01/08/2022 |
Numéro de décision ou d'affaire : | C-720/20 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Allemagne [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Asile [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Enfant [Mots-clés] Droits de l'enfant [Mots-clés] Parent [Mots-clés] Procédure [Mots-clés] Règlement Dublin |
Mots-clés: | protection internationale ; Réfugié |
Résumé : |
Le 19 mars 2012, les parents et les cinq frères et sœurs de la requérante au principal, ressortissants de la Fédération de Russie, ont obtenu le statut de réfugié en Pologne.
Au mois de décembre 2012, ils ont quitté le territoire de cet État membre pour rejoindre l’Allemagne où ils ont présenté des demandes de protection internationale. Le 25 avril 2013, la République fédérale d’Allemagne a demandé à la République de Pologne de reprendre en charge ces personnes sur le fondement de l’article 16, paragraphe 1, sous c), du règlement no 343/2003. Le 3 mai 2013, la République de Pologne a refusé de donner suite à cette requête, au motif que lesdites personnes bénéficiaient déjà d’une protection internationale sur son territoire. Par une décision du 2 octobre 2013, la République fédérale d’Allemagne a rejeté les demandes de protection internationale des mêmes personnes comme étant irrecevables, en raison du statut de réfugié que celles-ci avaient déjà obtenu en Pologne, et leur a ordonné de quitter le territoire allemand, sous peine d’éloignement. Le 7 novembre 2014, cette décision a été annulée uniquement en ce qui concerne l’ordre de quitter le territoire allemand sous peine d’éloignement. Le 7 mars 2018, la requérante au principal, qui est née en Allemagne le 21 décembre 2015 et qui est, à l’instar de ses parents et de ses cinq frères et sœurs, ressortissante de la Fédération de Russie, a introduit une demande de protection internationale auprès des autorités allemandes. Par deux décisions du Bundesamt für Migration und Flüchtlinge (Office fédéral de la migration et des réfugiés, Allemagne) adoptées respectivement le 14 février 2019 et le 19 mars 2019, les parents et les frères et sœurs de la requérante au principal ont fait l’objet d’un nouvel ordre de quitter le territoire allemand sous peine d’éloignement, en raison de la protection internationale dont ils bénéficiaient déjà en Pologne. Le recours introduit contre ces décisions est encore pendant. Par décision du 20 mars 2019, l’Office fédéral de la migration et des réfugiés a rejeté la demande de protection internationale introduite par la requérante au principal comme étant irrecevable, sur le fondement de l’article 29, paragraphe 1, point 1, sous a), de la loi relative au droit d’asile, lu en combinaison avec l’article 20, paragraphe 3, seconde phrase, du règlement Dublin III. La requérante au principal a introduit un recours contre cette décision de rejet devant la juridiction de renvoi. Selon cette juridiction, aucune procédure de détermination de l’État membre responsable, conformément au règlement Dublin III, n’a été entamée en ce qui concerne la demande de protection internationale introduite par la requérante au principal. Dans ces circonstances, la juridiction de renvoi s’interroge sur la question de savoir si la République fédérale d’Allemagne est, en vertu du règlement Dublin III, l’État membre responsable de l’examen de la demande de protection internationale de la requérante au principal et si, dans l’affirmative, cet État membre est néanmoins en droit de rejeter cette demande comme étant irrecevable. C’est dans ce contexte que le Verwaltungsgericht Cottbus (tribunal administratif de Cottbus, Allemagne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes : « 1) Compte tenu de l’objectif du droit de l’Union d’éviter les mouvements secondaires, mais aussi du principe général de l’unité de la famille qui s’exprime dans le règlement Dublin III, faut-il procéder à une application par analogie de l’article 20, paragraphe 3, de ce règlement lorsqu’un enfant mineur et ses parents introduisent des demandes de protection internationale dans le même État membre, mais que les parents bénéficient déjà d’une protection internationale dans un autre État membre tandis que l’enfant est né dans l’État membre dans lequel il a introduit sa demande de protection internationale ? 2) En cas de réponse affirmative à la première question, faut-il s’abstenir d’examiner la demande de protection internationale de l’enfant mineur conformément au règlement Dublin III et prendre une décision de transfert au titre de l’article 26 de ce règlement, au motif, par exemple, qu’est responsable de l’examen de la demande de protection internationale de l’enfant mineur l’État membre dans lequel ses parents bénéficient d’une protection internationale ? 3) En cas de réponse affirmative à la deuxième question, l’article 20, paragraphe 3, du règlement Dublin III appelle-t-il également une application par analogie en ce que, aux termes de sa seconde phrase, il est inutile d’entamer une nouvelle procédure de prise en charge pour l’enfant né postérieurement, bien que l’État membre d’accueil risque alors de ne pas avoir connaissance de l’éventuelle nécessité de prendre en charge l’enfant mineur ou qu’il risque de rejeter, conformément à sa pratique administrative, une application par analogie de l’article 20, paragraphe 3, de ce règlement, faisant ainsi courir à l’enfant mineur le risque de devenir un “réfugié en orbite” ? 4) En cas de réponse négative aux deuxième et troisième questions, un enfant mineur ayant introduit une demande de protection internationale dans un État membre peut-il se voir opposer une décision d’irrecevabilité en vertu d’une application par analogie de l’article 33, paragraphe 2, sous a), de la directive procédures, même si ce n’est pas cet enfant lui–même, mais ses parents, qui bénéficient d’une protection internationale dans un autre État membre ? » La Cour dit pour droit : 1) L’article 20, paragraphe 3, du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, doit être interprété en ce sens que : il n’est pas applicable par analogie à la situation dans laquelle un mineur et ses parents introduisent des demandes de protection internationale dans l’État membre dans lequel ce mineur est né, alors que ses parents bénéficient déjà d’une protection internationale dans un autre État membre. 2) L’article 33, paragraphe 2, sous a), de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, doit être interprété en ce sens que : il n’est pas applicable par analogie à la demande de protection internationale introduite par un mineur dans un État membre lorsque ce n’est pas ce mineur lui-même, mais ses parents, qui bénéficient d’une protection internationale dans un autre État membre. |
ECLI : | EU:C:2022:603 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Mineurs étrangers |
En ligne : | https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=263729 |