Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que le refus de délivrance d’un visa national aux fins du regroupement familial au parent d’un mineur réfugié non accompagné devenu majeur au cours de cette procédure est contraire au droit de l’Union : |
Auteurs : | Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 01/08/2022 |
Numéro de décision ou d'affaire : | C‑273/20 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Allemagne [Géographie] Syrie [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Titre de séjour [Mots-clés] Visa [Mots-clés] Refus [Mots-clés] Regroupement familial [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Jeune [Mots-clés] Parent [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Droit européen [Mots-clés] Directive européenne [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Procédure |
Résumé : |
SW ainsi que BL et BC, ressortissants syriens, ont demandé la délivrance d’un visa national en vue du regroupement familial avec leur fils respectif ayant obtenu le statut de réfugié en Allemagne. XC, elle aussi ressortissante syrienne, a, quant à elle, demandé la délivrance d’un visa national aux fins du regroupement familial avec son père, qui a obtenu le statut de réfugié en Allemagne. Leurs demandes ont été rejetées au motif que les fils de SW, BL et BC, ainsi que XC, étaient entretemps devenus majeurs.
Un tribunal administratif allemand a enjoint à l’Allemagne de délivrer respectivement à SW, BL et BC, ainsi qu’à XC, des visas nationaux aux fins du regroupement familial au motif que leurs fils et XC, en application de la jurisprudence établie par la Cour (1), devaient être considérés comme étant mineurs. L’Allemagne a formé des recours en Revision contre ces jugements devant la Cour administrative fédérale, laquelle a soumis à la Cour de justice des questions préjudicielles sur l'interprétation des dispositions de la directive relative au droit au regroupement familial (2). Dans son arrêt rendu le 1er août 2022 dans les affaires jointes C-273/20 et C-355/20, la Cour rappelle que l’objectif poursuivi par la directive relative au droit au regroupement familial est de favoriser le regroupement familial et, également, d’accorder une protection aux ressortissants de pays tiers, notamment aux mineurs. La Cour rappelle également que cette directive doit être interprétée et appliquée à la lumière du droit au respect de la vie privée ou familiale, lu en combinaison avec l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant. Cela étant rappelé, la Cour constate, en premier lieu, que retenir la date à laquelle l’autorité compétente de l’État membre concerné statue sur la demande d’entrée et de séjour sur le territoire de cet État aux fins du regroupement familial comme étant celle à laquelle il convient de se référer pour apprécier l’âge du demandeur ou, selon le cas, du regroupant aux fins d’autoriser le regroupement familial ne serait conforme ni aux objectifs poursuivis par la directive relative au droit au regroupement familial ni aux exigences découlant de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En effet, les autorités et les juridictions nationales compétentes ne seraient pas incitées à traiter prioritairement les requêtes présentées par les parents de mineurs avec l’urgence nécessaire pour tenir compte de la vulnérabilité de ces mineurs et pourraient ainsi agir d’une manière qui mettrait en péril le droit à la vie familiale tant d’un parent avec son enfant mineur que de ce dernier avec un membre de sa famille. En second lieu, selon la Cour, une telle interprétation ne permettrait pas non plus de garantir, conformément aux principes d’égalité de traitement et de sécurité juridique, un traitement identique et prévisible à tous les demandeurs se trouvant chronologiquement dans la même situation, dans la mesure où elle conduirait à faire dépendre le succès de la demande de regroupement familial principalement de circonstances imputables à l’administration ou aux juridictions nationales, en particulier de la plus ou moins grande célérité avec laquelle la demande est traitée ou avec laquelle il est statué sur le recours dirigé contre la décision de rejet d’une telle demande, et non pas de circonstances imputables au demandeur. Dans ces conditions, la Cour considère que, en cas de regroupement familial des parents avec un réfugié mineur non accompagné, la date de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par les parents du regroupant n’est pas déterminante pour apprécier la qualité de mineur du réfugié concerné. Par conséquent, la Cour conclut que, dans une telle situation, le fait que ce réfugié soit encore mineur à cette date ne constitue pas une « condition », dont le non-respect permet aux États membres de rejeter une telle demande. En outre, selon la Cour, la directive en question s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle, dans un tel cas de figure, le droit de séjour des parents concernés prend fin dès que l’enfant atteint la majorité. Suivant un raisonnement en substance analogue, dans l’arrêt qu’elle rend dans l’affaire C-279/20, la Cour conclut que la date à prendre en compte pour déterminer si un enfant d’un regroupant ayant obtenu le statut de réfugié est mineur, dans une situation où cet enfant est devenu majeur avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, est la date à laquelle ce parent a présenté sa demande d’asile. Une telle demande de regroupement familial doit toutefois intervenir dans un délai raisonnable, à savoir dans un délai de trois mois à compter de la date d’octroi du statut du réfugié au parent regroupant. Enfin, la Cour observe que, dans le cas du regroupement familial respectivement d’un parent avec un enfant mineur ayant obtenu le statut de réfugié ou d’un enfant mineur avec un parent ayant obtenu le statut de réfugié, lorsque cet enfant est devenu majeur respectivement avant l’adoption de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par ce parent ou avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, la seule ascendance directe au premier degré ou la seule relation juridique de filiation n’est pas suffisante pour considérer qu’il existe une vie familiale effective entre le parent et l’enfant concernés. Cependant, il n’est pas nécessaire que le réfugié et l’autre membre de la famille concernés cohabitent au sein du même foyer ou vivent sous le même toit pour que le parent ou l’enfant concernés puissent bénéficier du regroupement familial. Des visites occasionnelles et des contacts réguliers peuvent suffire pour considérer que ces personnes reconstruisent des relations personnelles et affectives et pour attester l’existence d’une vie familiale effective. Notes 1 Arrêt du 12 avril 2018, A et S, C-550/16 (voir également le CP no 40/18). 2 Directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial (JO 2003, L 251, p. 12). |
Note de contenu : | Affaires jointes C‑273/20 et C‑355/20. |
ECLI : | EU:C:2022:617 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Mineurs étrangers |
En ligne : | https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=263722 |