Titre : | Décision 2022-059 du 7 avril 2022 relative au refus de séjour opposé à un jeune majeur ressortissant guinéen pris en charge par l’aide sociale à l’enfance à l’âge de 16 ans fondé sur l’irrecevabilité des documents d’état civil produits relevée par le référent fraude de la préfecture |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Droits fondamentaux des étrangers, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 07/04/2022 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2022-059 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision en attente [Documents internes] Visa CEDH [Géographie] Guinée [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Titre de séjour [Mots-clés] Aide sociale à l'enfance (ASE) [Mots-clés] Prise en charge [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Âge [Mots-clés] Evaluation [Mots-clés] Jeune [Mots-clés] Refus [Mots-clés] Préfecture [Mots-clés] Mesure d'éloignement [Mots-clés] Interdiction du territoire [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Papiers d'identité [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Fraude [Mots-clés] Preuve [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Convention européenne des droits de l'homme [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Règlementation des services publics [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics |
Mots-clés: | Obligation de quitter le territoire français |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative au refus d’admission au séjour opposé à un jeune ressortissant guinéen pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE) à l’âge de 16 ans.
À sa majorité, l’intéressé a décidé de déposer, en sa qualité d’ancien mineur isolé, une première demande d’admission au séjour sur le fondement de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), devenu L. 435-3 (à compter du 1er mai 2021, conformément à l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020). Dans ce cadre, il a produit des documents d’état civil qui ont été examinés et jugés irrecevables par le référent fraude de la préfecture en charge de l’examen de sa demande. Par arrêté du 20 novembre 2020, le préfet a refusé sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de six mois, considérant que les pièces produites relatives à son état civil ne permettaient pas d’établir qu’il avait été pris en charge par l’ASE alors qu’il était mineur. Par un second arrêté du même jour, le préfet l’a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le réclamant a contesté cette décision devant le tribunal administratif dans le cadre de requêtes en annulation et en référé-suspension. Par deux décisions du 25 novembre 2020, et du 25 février 2021 le juge administratif a rejeté ses demandes. Le réclamant a saisi la cour administrative d’appel aux fins d’infirmer le jugement. Parallèlement, l’intéressé a été placé en centre de rétention administrative et éloigné vers la Guinée le 5 juin 2021. Dans le cadre de son instruction, le Défenseur des droits a rappelé que la justification de l’état civil et de la nationalité était susceptible d’être apportée par tous moyens dans le cadre d’un examen individuel et global du dossier, que le contrôle de l’authenticité des actes d’état civil devait être effectué dans les conditions prescrites par l’article 47 du code civil et qu’en l’espèce, un tel examen aurait dû permettre aux autorités de constater que les documents d’état civil et de nationalité produits par le réclamant comportaient tous les mêmes mentions concernant son identité (nom, prénom, date et lieu de naissance), et de les retenir ainsi comme suffisants pour justifier de son identité, conformément aux dispositions de l’article R. 311-2-2 devenu R. 431-10 du CESEDA. La Défenseure des droits relève que la minorité du réclamant évaluée par l’autorité judiciaire au moment de sa prise en charge par l’ASE n’aurait pas dû être remise en cause par l’autorité préfectorale et qu’ainsi, sa situation aurait dû être examinée au regard des conditions fixées à l’article L. 313-15 – devenu L. 435-3 – du CESEDA qu’il satisfait. La Défenseure des droits considère qu’au regard du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des liens personnels et familiaux développés en France par le réclamant depuis son arrivée en 2018, un titre de séjour « vie privée et familiale » sur le fondement de l’article L. 313-11 7° devenu L. 423-23 du CESEDA aurait également pu lui être délivré. En conséquence, la Défenseure des droits décide de présenter des observations devant la cour administrative d’appel saisie du litige. |
Suivi de la décision : |
Par un arrêt du 11 octobre 2022, la cour administrative d’appel a rejeté les demandes du réclamant. Elle a considéré que pour refuser le titre de séjour sollicité, le préfet s’était uniquement fondé sur les circonstances que l’intéressé n’établissait pas avoir été confié à l’ASE entre l’âge de 16 et 18 ans et qu’il entretenait des liens réguliers avec sa famille. Elle n’a pas estimé que le préfet s’était fondé sur l’inauthenticité des documents d’état civil produits pour remettre en cause la minorité de l’intéressé. Elle a considéré que ce dernier ne contestait pas la circonstance qu’il n’aurait pas été pris en charge par l’ASE entre l’âge de 16 et 18 ans, « motif qui pouvait à lui seul justifier le refus de titre en litige». La cour a relevé que le préfet s’était fondé sur l’inauthenticité des actes d’état civil pour refuser d’accorder un délai de départ volontaire à l’intéressé. Tout en admettant que « contrairement à ce qu’indique la cellule de fraude documentaire, l’existence d’une pluralité de jugements supplétifs, l’impression de ces documents sur du papier ordinaire et l’absence de mentions prévues par l’article 196 du code civil guinéen, qui ne s’appliquent pas aux jugements supplétifs ou à leur transcription, ne suffisent pas à établir le caractère falsifié des documents », elle a néanmoins retenu que l’analyse technique documentaire avait conclu que les documents n’étaient pas conformes à ceux utilisés par les autorités guinéennes et constituaient des contrefaçons et que le requérant n’avait apporté aucun élément de nature à remettre en cause ces constatations. Ce faisant, la cour administrative d’appel n’a pas suivi les observations de la Défenseure des droits et semble avoir inversé la charge de la preuve concernant l’authenticité des actes d’état civil étrangers malgré les dispositions de l’article 47 du code civil et la jurisprudence applicables. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Etrangers - Migrants |
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