Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que les autorités russes n'ont pas protégé la victime de violences domestiques contre la cyberviolence de son partenaire : Volodina c. Russie (no. 2) |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 14/09/2021 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 40419/19 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Géographie] Russie [Mots-clés] Violence [Mots-clés] Violence conjugale [Mots-clés] Technologies du numérique [Mots-clés] Internet [Mots-clés] Informatique et libertés [Mots-clés] Infraction [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Victime [Mots-clés] Indemnisation [Mots-clés] Indemnisation des victimes [Mots-clés] Préjudice [Mots-clés] Absence de solution [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Justice pénale [Mots-clés] Responsabilité de l'Etat |
Mots-clés: | Cybercriminalité ; Cyberviolence ; cyberharcèlement ; Manquement des autorités étatiques ; Réseaux sociaux |
Résumé : |
La requérante est une ressortissante russe née en 1985. Elle a changé de nom en 2018, et son nouveau nom et sa nouvelle adresse ne sont pas divulgués pour des raisons de sécurité.
Après que la requérante s'est séparée de son partenaire, S., un ressortissant azerbaïdjanais, celui-ci a commencé à l'agresser et à la harceler. Le manquement à l'obligation de la protéger contre ces actes de violence a fait l'objet de la première affaire de la requérante devant la Cour européenne, Volodina c. Russie. En plus des agressions, la requérante a subi des actes de harcèlement en ligne. En juin 2016, elle s'est plainte à la police que S. avait utilisé son nom, ses données personnelles et des photos d'elle nue pour créer de faux profils sur les médias sociaux, ajoutant des camarades de classe de leur fils et son professeur d'école comme amis. Elle a également signalé à la police la présence de faux profils sur Instagram et sur un réseau social russe, la découverte d'un dispositif de suivi GPS dans la doublure de son sac, ainsi que des menaces de mort qui lui ont été envoyées via les réseaux sociaux. Les autorités ont d'abord refusé de donner suite aux plaintes, invoquant l'absence de compétence territoriale ou l'absence d'infraction. Une enquête criminelle a finalement été ouverte en mars 2018. En octobre 2020, la police a classé l'affaire en raison de la prescription, alors qu'il était établi que c'était S. qui avait publié des photos dénudées de la requérante - trouvées sur son téléphone – sans son consentement. Aucune enquête pénale n'a été ouverte concernant la découverte d'un traceur GPS ou de menaces de mort. La police n'a pas du tout enquêté sur les menaces de mort en ligne, concluant qu'aucune infraction n'avait été commise car les menaces n'étaient pas "réelles". La Cour rappelle que les États sont tenus de mettre en place et d'appliquer effectivement un système permettant de sanctionner toutes les formes de violence domestique, qu'elles se produisent hors ligne ou en ligne, et d'offrir des garanties suffisantes aux victimes. Tout d'abord, la Cour s'est assurée que le droit russe contenait à la fois des mécanismes de droit civil et des dispositions de droit pénal pour la protection de la vie privée d'un individu. Les autorités ont donc été dotées des outils juridiques nécessaires pour enquêter sur la cyberviolence dont la requérante a été victime. Cependant, le droit russe ne garantit aux victimes de violences domestiques aucune mesure de protection, telle qu'une ordonnance d'interdiction ou de protection. Une ordonnance nouvellement créée pour interdire certains comportements n'offre pas une protection adéquate aux victimes dans la situation de la requérante. De telles ordonnances ne sont disponibles qu'après que des preuves suffisantes pour inculper l'auteur ont été rassemblées mais, dans le cas de la requérante, l'enquête contre S. n'avait pas dépassé le stade des soupçons. La Cour estime que la réponse des autorités russes au risque connu de violence récurrente a été manifestement inadéquate et que, par leur inaction et leur incapacité à prendre des mesures de dissuasion, elles ont permis à S. de continuer à menacer, harceler et agresser la requérante. Enfin, la manière dont les autorités russes ont géré l'enquête, en particulier le retard initial de deux ans dans l'ouverture d'une procédure pénale et la lenteur de la procédure qui a conduit à la prescription de l'action publique, montrent qu'elles n'ont pas réussi à faire en sorte que l'auteur des actes de cyberviolence soit traduit en justice. L'impunité qui s'en est suivie a mis en doute la capacité des mécanismes étatiques à produire un effet suffisamment dissuasif pour protéger les femmes de la cyberviolence. La Cour dit que la Russie doit verser à la requérante 7 500 euros au titre du préjudice moral et 5 386,46 euros au titre des frais et dépens. |
ECLI : | ECHR:2021:0914JUD004041919 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Technologies du numérique |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-211794 |