Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que la Russie n'a pas justifié l'absence de toute possibilité pour les couples de même sexe de faire reconnaître officiellement leur relation : Fedotova et autres c. Russie |
est cité par : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 13/07/2021 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 40792/10 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Géographie] Russie [Mots-clés] Orientation sexuelle [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Famille homoparentale [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Mariage [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Préjudice [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Égalité de traitement [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Responsabilité de l'Etat |
Mots-clés: | LGBTI |
Résumé : |
L’affaire concerne le refus par les autorités russes d'enregistrer les déclarations de mariage des requérants, qui sont des couples de même sexe.
Invoquant les articles 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et 14 (interdiction de discrimination), les requérants se disent, en particulier, victimes d’une discrimination fondée sur leur orientation sexuelle, car ils n’ont aucun moyen de voir leur relation revêtue d’une base juridique, compte tenu du fait qu’il est impossible pour eux, en droit russe, de contracter un mariage ou tout autre type d’union formelle. La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 20 juillet 2010. La Cour estime que la Russie a l'obligation d'assurer le respect de la vie privée et familiale des requérants en leur fournissant un cadre juridique leur permettant de faire reconnaître et protéger leurs relations dans le droit interne. L'absence de toute possibilité pour les couples de même sexe de faire reconnaître officiellement leur relation crée un conflit entre la réalité sociale des requérants et la loi. La Cour rejette l'argument du gouvernement selon lequel les intérêts de la société dans son ensemble peuvent justifier l'absence de possibilité pour les couples de même sexe d'officialiser leur relation. Elle estime qu'en refusant aux couples homosexuels l'accès à la reconnaissance officielle de leur statut, les autorités russes ont outrepassé le pouvoir discrétionnaire (marge d'appréciation) dont elles disposent. La Cour précise que le choix de la forme la plus appropriée d'enregistrement des unions homosexuelles reste à la discrétion de l'État défendeur. La Cour rappelle que l'article 8 n'impose pas explicitement aux États l'obligation de reconnaître formellement les unions entre personnes de même sexe. Toutefois, il implique la nécessité de trouver un juste équilibre entre les intérêts concurrents des couples de même sexe et ceux de la société dans son ensemble. Il existe également une obligation positive de mettre en place un cadre juridique garantissant la jouissance effective des droits consacrés par l'article 8. La Cour note, en particulier, l'impact sur un individu lorsqu'il existe une discordance entre le droit et la réalité sociale, comme dans ce cas. En ce qui concerne les couples de même sexe, la Cour réitère qu'ils sont tout aussi capables que les couples de sexe différent de s'engager dans une relation, avec un besoin de reconnaissance formelle et de protection de leur relation. Il incombe aux États de prendre cela en compte et de trouver un équilibre entre leurs besoins et ceux de la société dans son ensemble. La Cour estime que rien ne justifie que les requérants ne soient pas en mesure de donner une assise juridique à leur union. En particulier, concernant l'argument selon lequel une majorité de Russes désapprouve les unions entre personnes de même sexe, la Cour rappelle que l'accès aux droits pour une minorité ne peut dépendre de l'acceptation de la majorité. La Cour réaffirme en outre que le fait de donner aux requérants l'accès à la reconnaissance officielle du statut de leur couple sous une forme autre que le mariage ne serait pas en conflit avec la « conception traditionnelle du mariage » prévalant en Russie, ni avec les opinions de la majorité auxquelles le Gouvernement se réfère, puisque ces opinions ne s'opposent qu'aux mariages entre personnes de même sexe, et non à d'autres formes de reconnaissance juridique. En conséquence, la Cour estime que la Russie a manqué à ses obligations au titre de l'article 8, entraînant une violation de la Convention. En raison de l'arrêt rendu sur le fondement de l'article 8, il n'a pas été nécessaire d'examiner le grief tiré de l'article 14 combiné avec l'article 8. |
ECLI : | CE:ECHR:2021:0713JUD004079210 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Famille - Enfant - Jeunesse |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-211016 |