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Titre : | Constatations relatives à la prise en charge et la procédure de détermination de l'âge d'un jeune étranger non accompagné : R.K. c. Espagne : Constatations concernant la communication n° 27/2017 |
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Auteurs : | Comité des droits de l'enfant (CRC), ONU, Auteur ; Organisation des Nations unies (ONU), Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 18/09/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | CRC/C/82/D/27/2017 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Espagne [Mots-clés] Droits de l'enfant [Mots-clés] Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Droit à la préservation de son identité [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Papiers d'identité [Mots-clés] Protection de l'enfance [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Prise en charge [Mots-clés] Âge [Mots-clés] Détermination de l'âge osseux [Mots-clés] Examen médical [Mots-clés] Avocat [Mots-clés] Tutelle [Mots-clés] Asile |
Résumé : |
L'affaire concerne la procédure de détermination de l'âge d'un présumé enfant non accompagné demandeur d'asile.
Devant le Comité des droits de l'enfant, le jeune se plaint de plusieurs violations de la Convention des droits de l'enfant (CIDE) par l'Espagne. Le Défenseur des droits est intervenu devant le Comité en qualité de tiers-intervenant. Le Comité constate des violations par l’Espagne des articles 3 (intérêt supérieur de l’enfant), 8 (droit à une identité), 12 (droit d’exprimer son opinion), 20 (droit à une protection de l’Etat) et 22 (protection et assistance humanitaire) de la CIDE ainsi que de l’article 6 du Protocole facultatif à la Convention (mesures provisoires). Le Comité rappelle que la détermination de l’âge d’une personne jeune qui affirme être mineure revêt une importance capitale, puisque le résultat de cette procédure permet d’établir si la personne en question peut ou non prétendre à la protection nationale en qualité d’enfant. De même, et cela est extrêmement important pour le Comité, la jouissance des droits énoncés dans la Convention est liée à cette détermination. Il est donc impératif que l’âge soit déterminé selon une procédure régulière, dont les résultats pourront être contestés par voie de recours. Tant que les procédures susmentionnées sont en cours, il faudrait accorder à l’intéressé le bénéfice du doute et le traiter comme un enfant. Le Comité rappelle que l’intérêt supérieur de l’enfant devrait être une considération primordiale tout au long de la procédure de détermination de l’âge. Le Comité rappelle également qu’en l’absence de documents d’identité ou d’autres moyens appropriés, pour obtenir une estimation éclairée de l’âge, les États devraient procéder à une évaluation complète du développement physique et psychologique de l’enfant, qui soit effectuée par des pédiatres et d’autres professionnels capables de combiner différents aspects du développement. Ces évaluations devraient être faites sans attendre, d’une manière respectueuse de l’enfant, qui tienne compte de son sexe et soit culturellement adaptée, et comporter des entretiens avec l’enfant, dans une langue que celui-ci comprend. Les documents qui sont disponibles devraient être considérés comme authentiques, sauf preuve du contraire, et les déclarations des enfants doivent être prises en considération. Il est également essentiel d’accorder le bénéfice du doute à la personne évaluée. Les États devraient s’abstenir d’utiliser des méthodes médicales fondées sur les analyses osseuses et dentaires, qui peuvent être imprécises, comporter de grandes marges d’erreur, et aussi être traumatisantes et entraîner des procédures juridiques inutiles. En l'espèce, le Comité constate qu'afin de déterminer l'âge du jeune, qui était sans papiers lorsqu'il est entré sur le territoire espagnol, les autorités ont soumis l’intéressé à des examens médicaux consistant en une radiographie du poignet et un panoramique dentaire, sans qu’aucun examen complémentaire, notamment aucune expertise psychologique, ne soit pratiqué et, d’après les informations dont le Comité dispose, sans que le moindre entretien ne soit conduit avec l’intéressé dans le cadre de cette procédure. A l'issue de ces examens, il a été établi que l’âge osseux de l'intéressé était de 19 ans selon l’Atlas de Greulich et Pyle et que, d'après le panoramique dentaire, il avait au moins 18 ans, sans qu’une possible marge d’erreur soit indiquée. Sur la base de ces résultats médicaux, le ministère public a rendu une décision établissant que le jeune était majeur et il n’a pas tenu compte des documents transmis par l’ambassade de l’État d'origine du jeune attestant que ce dernier était mineur, en vue d’un éventuel réexamen de sa décision. Le Comité considère que la procédure de détermination de l'âge à laquelle a été soumis le jeune, qui a affirmé être un enfant et a présenté des preuves à l'appui de ses dires, n'a pas été assortie des garanties nécessaires à la protection des droits que l'intéressé tient de la Convention. Et compte tenu en particulier que l'intéressé n’a pas bénéficié de la présence d’un représentant pendant la procédure, que les documents qu’il a fournis, notamment son passeport, ont été jugés sans valeur probante, et que l’État n’a pas demandé confirmation aux autorités consulaires du pays d'origine comme il aurait pu le faire en cas de doute, le Comité considère que l’intérêt supérieur de l’enfant n’a pas été une considération primordiale pendant la procédure de détermination de l’âge à laquelle le jeune a été soumis, ce qui constitue une violation des articles 3 et 12 de la Convention. Le Comité note également que le jeune affirme que l’État partie a violé ses droits lorsqu’il a modifié des éléments de son identité en lui attribuant un âge et une date de naissance qui ne correspondaient pas aux informations indiquées sur son acte de naissance, et qu’il n’est pas revenu sur cette décision même après que l'intéressé a soumis des documents délivrés par l’ambassade prouvant qu’il était mineur. Le Comité considère que la date de naissance d’un enfant fait partie de son identité et que les États parties sont tenus de respecter le droit de l’enfant de préserver son identité sans le priver d’aucun des éléments qui la constituent. Il fait observer qu’en l’espèce, bien que l’auteur ait présenté aux autorités espagnoles une copie de son acte de naissance, l’État partie n’a pas respecté son identité car il a refusé d’accorder toute valeur probante à ce document, sans avoir fait examiner au préalable les informations figurant sur l’acte par les autorités compétentes et sans avoir cherché à vérifier ces informations auprès des autorités du pays d’origine de l’auteur. En conséquence, le Comité conclut que l’État partie a violé l’article 8 de la Convention. Le Comité considère également que le fait que les autorités n’ont pas assigné de tuteur à l'intéressé pour qu’il puisse demander l’asile en tant que mineur, alors qu'il était en possession de documents officiels attestant sa minorité, a eu pour conséquence de le priver de la protection spéciale qui doit être accordée aux mineurs non accompagnés demandeurs d’asile et l’a exposé à un risque de dommage irréparable en cas de renvoi vers son pays d’origine, en violation des articles 20 §1 et 22 de la Convention. Enfin, concernant les mesures provisoires, le Comité note que l’État partie affirme que le transfert de l'intéressé dans un centre de protection des mineurs aurait pu faire courir un risque important aux enfants qui se trouvaient dans ce centre. Il fait toutefois observer que cet argument est fondé sur l’hypothèse que l’auteur est majeur. Il estime que le risque encouru est bien plus grand lorsqu’une personne potentiellement mineure est envoyée dans un centre accueillant uniquement des personnes reconnues comme adultes. En conséquence, il considère que la non-application de la mesure provisoire demandée constitue en soi une violation de l’article 6 du Protocole facultatif. L'Espagne est tenu d’accorder à l'intéressé une réparation effective pour les violations subies, y compris de lui donner la possibilité de régulariser sa situation administrative en l'Espagne, en tenant dûment compte du fait qu’il était un enfant non accompagné lorsqu’il a présenté sa demande d’asile pour la première fois. Il a également l’obligation de veiller à ce que de telles violations ne se reproduisent pas. à cet égard, le Comité lui recommande : a) De veiller à ce que toute procédure visant à déterminer l’âge de jeunes gens affirmant être mineurs soit conforme à la Convention et, en particulier : i) qu’au cours de cette procédure, les documents soumis par les intéressés soient pris en considération et que, dès lors qu’ils ont été établis ou que leur validité a été confirmée par l’État concerné ou son ambassade, leur authenticité soit reconnue ; ii) que les jeunes gens concernés se voient assigner sans délai et gratuitement un représentant légal qualifié ou un autre représentant, que les avocats privés désignés pour les représenter soient reconnus et que tous les représentants légaux ou autres représentants soient autorisés à les assister au cours de la procédure ; b) De faire en sorte qu’un tuteur compétent soit désigné dans les meilleurs délais pour veiller aux intérêts des jeunes demandeurs d’asile non accompagnés qui affirment avoir moins de 18 ans, afin que ceux-ci puissent demander l’asile en qualité de mineurs, même lorsque la procédure visant à déterminer leur âge est en cours ; c) De mettre en place un mécanisme de réparation efficace et accessible aux jeunes migrants non accompagnés affirmant avoir moins de 18 ans afin qu’ils puissent contester les décisions des autorités les déclarant majeurs dans les cas où la détermination de leur âge n’a pas été assortie des garanties nécessaires à la protection de leur intérêt supérieur et de leur droit d’être entendu ; d) De dispenser aux agents des services de l’immigration, aux policiers, aux fonctionnaires du parquet, aux juges et aux autres professionnels concernés des formations sur les droits des enfants migrants, et en particulier sur les observations générales conjointes nos 6, 22 et 23 du Comité. Le Comité rappelle qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait ou non violation de la Convention et des deux Protocoles facultatifs thématiques s’y rapportant. Conformément à l’article 11 du Protocole facultatif, le Comité souhaite recevoir de l'Espagne, dès que possible et dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. Il demande en outre à l’État partie d’inclure des informations sur ces mesures dans les rapports qu’il présentera au titre de l’article 44 de la Convention. Enfin, l’État partie est invité à rendre publiques les présentes constatations et à les diffuser largement. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Mineurs étrangers |
En ligne : | https://juris.ohchr.org/Search/Details/2598 |
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