Document public
Titre : | Arrêt relatif à la légalité du refus de remettre en liberté des personnes ayant commis des vols et internées en raison des troubles mentaux persistants, malgré une réforme législative belge ne permettant plus l'internement pour des faits de vol : Denis et Irvine c. Belgique |
Auteurs : | Grande Chambre, Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), Auteur ; Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 01/06/2021 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 62819/17 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Belgique [Mots-clés] Législation [Mots-clés] Respect de la législation et des décisions de justice [Mots-clés] Application [Mots-clés] Application dans le temps des réglementations [Mots-clés] Soins sans consentement [Mots-clés] Santé mentale [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Justice pénale [Mots-clés] Droit à la liberté et à la sûreté [Mots-clés] Sécurité publique |
Résumé : |
L’affaire concerne deux requérants qui ont été internés sur le fondement de la loi de défense sociale du 9 avril 1930 après avoir commis des faits de vol ou de tentative de vol. Depuis, l'entrée en vigueur de la nouvelle loi relative à l’internement, les faits de vol et tentative de vol commis par les requérants ne pourraient plus, à l’heure actuelle, constituer le fondement d’une décision ordonnant l’internement d’une personne en vertu de la loi de 2014,
nonobstant son état de santé mentale. De plus, cette nouvelle loi, qui s’applique en principe à toutes les affaires en cours, ne prévoit pas de mesure transitoire spécifique pour les personnes qui ont été internées sur le fondement de la loi de défense sociale de 1930 et qui ont commis des faits qui n’atteindraient pas le nouveau seuil requis par son article 9. Invoquant l’article 5 § 1 (droit à la liberté et à la sûreté) de la Convention européenne des droits de l’homme, les requérants alléguaient que le maintien de la mesure d’internement depuis l’entrée en vigueur de la loi de 2014 ne reposait plus sur une base légale. Invoquant l’article 5 § 4 (droit de faire statuer à bref délai sur la légalité de sa détention) et l’article 13 (droit à un recours effectif) de la Convention, les requérants se plaignaient de l’impossibilité légale d’obtenir leur mise en liberté immédiate et définitive. Dans son arrêt de chambre du 8 octobre 2019, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait conclu, à l’unanimité, à la non-violation de l’article 5 § 1 et de l’article 5 § 4 de la Convention. Statuant en formation de Grande chambre, la Cour européenne des droits de l'homme juge, à la majorité (14 voix contre 3) qu'il n'y a pas eu violation de ces articles. La Cour relève que la privation de liberté des requérants concerne la détention d’aliénés et que leur internement constitue une mesure de sûreté et non pas une peine, qui relève de l’article 5 § 1 e) de la Convention. La Cour précise que cette disposition exige que l’aliénation ait été établie de manière probante (1ère condition), que le trouble revête un caractère ou une ampleur légitimant l’internement (2ème condition) et que ce trouble persiste pendant toute la durée de l’internement (3ème condition). La Convention n’exige dès lors pas que soit prise en compte, au moment du contrôle de la persistance des troubles mentaux, la nature des faits qui avaient été commis par l’intéressé et qui avaient constitué le fondement de son internement. La Cour constate que c’est au regard de ces conditions que les juridictions internes ont examiné les demandes de mise en liberté définitive des requérants. En l’espèce, elles n’ont pas eu égard à la nature de l’infraction commise par les requérants, mais elles ont vérifié la persistance des troubles mentaux tel qu’exigé par l’alinéa e) de l’article 5 § 1 de la Convention et elles ont estimé qu’il existait encore un risque élevé de récidive violente. La Cour juge donc que la détention des requérants continue de reposer valablement sur une base légale et que leur privation de liberté est régulière. La Cour constate aussi que la loi relative à l’internement met deux conditions cumulatives à la libération définitive d’un interné, et qu’en l’espèce aucune de ces conditions n’est remplie. |
ECLI : | CE:ECHR:2021:0601JUD006281917 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Privation de liberté |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-210368 |