Document public
Titre : | Arrêt relatif au caractère justifié du licenciement pour inaptitude d'une salariée de nationalité portugaise, victime de propos vexatoires et injurieux et d'une vidéosurveillance illégale sur son lieu de travail |
Auteurs : | Cour d'appel de Versailles, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 04/03/2021 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 18/02444 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Inaptitude [Mots-clés] Harcèlement [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Discrimination non caractérisée [Mots-clés] Origine [Mots-clés] Licenciement [Mots-clés] Vidéo-surveillance [Mots-clés] Propos déplacés [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Conditions de travail [Mots-clés] Obligation de sécurité de résultat [Mots-clés] Prévention |
Résumé : |
La requérante de nationalité portugaise, a été embauchée en 2008 en qualité de coupeuse mécanicienne. Elle se plaint d'un climat de maltraitance à son encontre en tant que femme portugaise, fondé sur son sexe et son origine, prenant la forme de propos vexatoires et injurieux de la part de son employeur et de certains de ses collègues masculins. Elle a dénoncé, à plusieurs reprises, ces éléments à caractère discriminatoire, à son encontre. Elle invoque également une surcharge de travail et une surveillance excessive par l'intermédiaire de caméras installées par l'employeur de manière illégale.
En janvier 2016, elle a été placée en arrêt maladie pour état dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles, puis licenciée sept mois plus tard pour inaptitude physique. Soutenant avoir été victime de harcèlement moral, la requérante a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale. Statuant en formation de départage, le conseil de prud'hommes a débouté la salariée de sa demande de nullité de son licenciement et a jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse. Le Défenseur des droits a présenté ses observations devant la cour d'appel. II a conclu à l’existence d’un harcèlement discriminatoire en raison du sexe et de l’origine de la salariée. La cour d'appel confirme le jugement prud'homal, sauf en ce qui concerne le harcèlement moral. La cour considère que la salariée présente des faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à l'encontre de la salariée. Elle retient notamment l'existence des propos vexatoires et injurieux ("tu est bien portugaise", "tu es méchante/les femmes portugaises sont méchantes", "tu ne travaille pas assez", "j'en ai marre de toi", je m'en fous de ton enfant malade, le travail passe avant la famille",...) tenus par l'employeur à l'égard de la salariée pour les années 2013 et 2014 et la vidéosurveillance illégale des salariés, en particulier de la requérante, entre 2008 et 2014. En revanche, la cour ne reconnaît pas la surcharge du travail dont se plaignait la salariée. Quant à la dégradation de l'état de santé de la salariée, manifestée par ses arrêts maladie pour dépression, la cour considère que s'il est indéniable que les propos injurieux et insultants ainsi que la surveillance excessive subis entre 2008 et 2014 sont à l'origine d'un préjudice moral, elle constate que les arrêts maladie n'ont débuté qu'en janvier 2016. En outre, elle souligne que le lien de causalité entre l'état dépressif de la salariée et son activité professionnelle, bien qu'affirmé par son psychiatre, ne peut résulter des seuls dires de la patiente. Enfin, la cour relève que la salariée n'a pas hésité à faire embaucher son fils au sein de l'entreprise au cours du mois de juillet 2015. Compte tenu des circonstances du harcèlement subi, de sa durée, et des conséquences dommageables qu'il a eues pour la salariée, telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, la société est condamnée au paiement d'une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts. En outre, l'employeur est condamné à payer à la requérante une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des actes de harcèlement moral. Ensuite, la cour considère qu'aucune discrimination n'est démontrée à l'égard de la salariée et que le harcèlement moral est établi seulement pour une période limitée, aucun fait postérieur à 2014, n'étant démontré. Or, les arrêts maladie qui ont conduit le médecin du travail à conclure à l'inaptitude de la salariée n'ont débuté qu'un an plus tard, en janvier 2016. La cour conclut que, dans ces circonstances, le lien entre le harcèlement moral et l'inaptitude, à l'origine du licenciement, n'est pas suffisamment établi, de sort que la demande de la salariée tendant au prononcé de la nullité de son licenciement, doit être rejetée. Enfin, la cour considère que le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité n'étant pas démontré, la salariée doit être déboutée de sa demande tendant à voir déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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