
Document public
Titre : | Arrêt relatif au traitement discriminatoire en matière de complément de rémunération au sein de la catégorie des travailleurs handicapés en raison de la date à laquelle ils ont communiqué à l'employeur l’attestation reconnaissant leur handicap : VL (Pologne) |
Accompagne : | |
Auteurs : | Grande chambre, Cour de justice de l'Union européenne, Auteur ; Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 26/01/2021 |
Numéro de décision ou d'affaire : | C-16/19 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Pologne [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Condition d'attribution [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Entreprise [Mots-clés] Rémunération [Mots-clés] Discrimination directe [Mots-clés] Discrimination indirecte [Mots-clés] Égalité de traitement |
Résumé : |
Une employée au sein d'un hôpital a obtenu en 2011 une attestation de reconnaissance de handicap, qu’elle a transmise à son employeur le même mois. Afin de diminuer le montant des contributions de l’hôpital au Fonds national pour la réadaptation des personnes handicapées, le directeur de cet établissement a décidé, à la suite d’une réunion avec le personnel ayant eu lieu au second semestre 2013, d’octroyer un complément de salaire mensuel aux salariés qui lui remettraient, après cette réunion, une attestation de reconnaissance de leur handicap. Sur la base de cette décision, le complément de salaire a été accordé à treize travailleurs ayant remis leur attestation après cette réunion, tandis que seize autres travailleurs, dont l'intéressée, l’ayant transmise antérieurement, n’en ont pas bénéficié.
Statuant en formation de Grande chambre, la Cour de justice de l'Union européenne considère que la pratique d’un employeur consistant à verser un complément de salaire aux seuls travailleurs handicapés ayant remis une attestation de reconnaissance de handicap après une date qu’il a lui-même fixée est susceptible de constituer une discrimination directe ou indirecte fondée sur le handicap. Elle considère que la pratique litigieuse étant à l’origine d’une différence de traitement entre deux catégories de travailleurs handicapés se trouvant dans une situation comparable, il appartient donc à la juridiction de renvoi de déterminer si la condition temporelle imposée par l’employeur pour bénéficier du complément de salaire en cause, à savoir la remise de l’attestation de reconnaissance de handicap après la date fixée par ce dernier, constitue un critère indissociablement lié au handicap des travailleurs auxquels ce complément a été refusé. La Cour relève à cet égard que, en l’occurrence, l’employeur ne semble pas avoir permis aux travailleurs handicapés ayant déjà remis leur attestation avant cette date de la présenter à nouveau ou d’en déposer une nouvelle, de sorte que cette pratique pourrait avoir placé définitivement dans l’impossibilité de remplir cette condition temporelle un groupe nettement identifié de travailleurs, composé de l’ensemble des travailleurs handicapés dont l’employeur connaissait nécessairement l’état de handicap lors de l’instauration de cette pratique. En effet, ces derniers avaient préalablement officialisé cet état par la remise d’une attestation de reconnaissance de handicap. Dès lors, une telle pratique est susceptible de constituer une discrimination directe lorsqu’elle est de nature à placer définitivement dans l’impossibilité de remplir ladite condition temporelle un groupe nettement identifié de travailleurs, composé de l’ensemble des travailleurs handicapés dont l’employeur connaissait nécessairement l’état de handicap lors de l’instauration de cette pratique. Par ailleurs, la Cour souligne que, si la juridiction de renvoi devait, au contraire, constater que la différence de traitement en cause résulte d’une pratique apparemment neutre, il lui incombera, pour déterminer si cette pratique constitue une discrimination indirecte de vérifier si elle a eu pour effet de désavantager particulièrement des personnes présentant certains handicaps par rapport à des personnes présentant d’autres handicaps et, en particulier, de désavantager certains travailleurs handicapés en raison de la nature particulière de leur handicap, notamment du caractère ostensible de celui-ci ou du fait que ce handicap nécessitait des aménagements raisonnables. En effet, selon la Cour, il pourrait être considéré que ce sont principalement les travailleurs présentant un tel handicap qui se sont trouvés dans l’obligation, avant la date fixée par l’hôpital en cause, d’officialiser leur état de santé auprès de celui-ci, par la remise d’une attestation de reconnaissance de handicap, alors que d’autres travailleurs présentant des handicaps d’une nature différente, par exemple, en raison du fait qu’ils sont moins lourds ou ne nécessitent pas immédiatement de tels aménagements, conservaient un choix d’effectuer ou non une telle démarche. Partant, une pratique telle que celle en cause, bien qu’apparemment neutre, est susceptible de constituer une discrimination indirectement fondée sur le handicap lorsqu’elle entraîne un désavantage particulier pour des travailleurs handicapés en fonction de la nature de leur handicap, sans qu’elle soit objectivement justifiée par un objectif légitime et sans que les moyens pour réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. |
ECLI : | EU:C:2021:64 |
En ligne : | http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=236963 |