Document public
Titre : | Décision relative au fait que les mesures recommandées par le Défenseur des droits et dont l'association requérante a demandé la mise en œuvre, ne soient les seules à même de garantir le respect des obligations qui pèsent sur l'administration pénitentiaire en matière de maintien de liens entre les détenus et leurs familles |
Auteurs : | Conseil d'État, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 13/11/2020 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 433243 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Communication avec les services publics [Mots-clés] Passivité des services publics [Mots-clés] Organisation des services publics [Mots-clés] Règlementation des services publics [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Administration pénitentiaire [Mots-clés] Établissement pénitentiaire [Mots-clés] Parloir [Mots-clés] Maintien des liens [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale |
Résumé : |
Après avoir été saisi par un proche d'une personne détenue dans un établissement pénitentiaire ne parvenant pas à prendre de rendez-vous par téléphone pour accéder au parloir de l'établissement pénitentiaire, le Défenseur des droits a conduit une enquête dans treize établissements pénitentiaires situés sur l'ensemble du territoire. Il a constaté que, sur une période de quinze jours, 31% des appels restaient sans réponse et quatre établissements étaient impossibles à joindre. S'agissant des établissements répondant aux appels, les modalités de prise de rendez-vous par téléphone présentaient une grande hétérogénéité. Par une décision du 27 décembre 2018, le Défenseur des droits a estimé que les difficultés persistantes rencontrées par les proches de personnes détenues pour joindre par téléphone les établissements pénitentiaires afin de prendre rendez-vous pour un accès au parloir ainsi que l'hétérogénéité des dispositifs de prise de rendez-vous portaient atteinte au droit des personnes détenues et de leurs proches au respect de leur vie privée et familiale et caractérisaient une rupture d'égalité devant le service public pénitentiaire. Le Défenseur des droits a recommandé à la garde des sceaux, ministre de la justice, d'évaluer les dispositifs techniques de prise de rendez-vous en vigueur pour l'accès au parloir et de mettre en place un système homogène de prise de rendez-vous par téléphone sur l'ensemble du territoire, permettant de garantir l'égal accès des familles et des proches de détenus aux parloirs.
Le 20 mai 2019, l’association requérante a demandé à la garde des sceaux, ministre de la justice de mettre en œuvre ces recommandations dans les plus brefs délais. Elle demande au Conseil d’État d’annuler pour excès de pouvoir le rejet implicite opposé à sa demande. Le Conseil d’État rejette la requête. Le Conseil d’État considère, en premier lieu, que la décision par laquelle l'administration refuserait de mettre en œuvre des recommandations émises par le Défenseur des droits n'entre dans aucune des catégories de décisions dont l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration exige la motivation. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée doit être écarté. Il considère, en second lieu, que l'article 35 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire dispose que : " Le droit des personnes détenues au maintien des relations avec les membres de leur famille s'exerce soit par les visites que ceux-ci leur rendent, soit, pour les condamnés et si leur situation pénale l'autorise, par les permissions de sortir des établissements pénitentiaires. Les prévenus peuvent être visités par les membres de leur famille ou d'autres personnes, au moins trois fois par semaine, et les condamnés au moins une fois par semaine ". Le Conseil d’État estime qu’il appartient aux seules autorités compétentes de déterminer, parmi les mesures juridiques, financières, techniques ou d'organisation qui sont susceptibles d'être prises, celles qui sont les mieux à même d'assurer le respect des obligations qui leur incombent. Le refus de prendre une mesure déterminée ne saurait être regardé comme entaché d'illégalité au seul motif que la mise en œuvre de cette mesure serait susceptible de concourir au respect de ces obligations. Il ne saurait en aller autrement que dans l'hypothèse où l'édiction de la mesure sollicitée se révélerait nécessaire au respect de l'obligation en cause et où l'abstention de l'autorité compétente exclurait, dès lors, qu'elle puisse être respectée. Le Conseil d’État considère qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les mesures recommandées par le Défenseur des droits et dont l'association requérante a demandé la mise en œuvre soient les seules à même de garantir le respect des obligations qui pèsent sur l'administration pénitentiaire au titre de l'article 35 de la loi du 24 novembre 2009. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, le refus de prendre ces mesures ne saurait être regardé comme entaché d'illégalité au seul motif que leur mise en œuvre serait susceptible de concourir au respect de ces obligations. L'association requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le refus implicite qu'elle attaque méconnaîtrait, par lui-même, le droit au respect de la vie privée et familiale et le principe d'égalité devant le service public pénitentiaire. Le Conseil d’État conclut, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête ou sur les conclusions à fin de non-lieu opposées en défense, que la requête doit être rejetée. |
ECLI : | FR:CECHR:2020:433243.20201113 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Privation de liberté |
En ligne : | http://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2020-11-13/433243 |
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