Document public
Titre : | Requête relative à l'arrestation et à l'intrusion au domicile d'un homme ayant fait l'objet d'une enquête pour délaissement de sa mère très âgée, personne vulnérable : Jarrand c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 22/09/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 56138/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Domicile [Mots-clés] Interpellation [Mots-clés] Personne âgée [Mots-clés] Tutelle [Mots-clés] Refus [Mots-clés] Parent [Mots-clés] Usage de la force [Mots-clés] Police nationale [Mots-clés] Garde à vue [Mots-clés] Interdiction de la privation arbitraire ou illégale de liberté |
Résumé : |
Le requérant habitait avec sa mère, née en 1920. Un médecin d'un centre hospitalier universitaire où elle avait été hospitalisée en 2009 signala au Procureur qu’elle était dans un état sanitaire et mental très dégradé. À la demande de ce dernier, le juge des tutelles ordonna son placement sous sauvegarde de justice et désigna une association familiale locale comme mandataire spécial aux fins notamment de la faire admettre dans un lieu d’hébergement autre que son domicile. Une enquête a été ouverte contre le requérant pour délaissement de personne vulnérable. La mère du requérant fut placée par l’association mandataire dans un établissement spécialisé. Toutefois, deux mois plus tard, le requérant refusa de l’y reconduire après qu’elle eût passé l’après-midi à leur domicile. Des employés de l’association mandataire se rendirent sur place à deux reprises. Ayant constaté le refus persistant du requérant, ils avertirent le juge des tutelles et les services de police. Le même jour, sur ordre du procureur de la République, une vingtaine de policiers se rendirent sur les lieux afin de prendre en charge la mère du requérant. Portant gilets pare-balles, casques, boucliers et armes, ils défoncèrent la verrière du domicile du requérant et y entrèrent. Ce dernier indique qu’ils braquèrent leurs armes sur lui, qu’il fut arrêté, menotté, fouillé, brutalisé et conduit de force à l’hôtel de police où il fut retenu plusieurs heures. Le rapport établi sur commission rogatoire dans le cadre de l’instruction par l’inspection générale de la Police nationale (« IGPN ») indique que les policiers avaient été informés que le requérant était armé et séquestrait sa mère chez lui. Relâché dans la nuit, le requérant dut rentrer en taxi. Son domicile avait été fouillé de fond en comble alors qu’il était retenu à l’hôtel de police, et sa mère avait été ramenée dans l’établissement spécialisé où elle avait été placée.
Le requérant a porté plainte avec constitution de partie civile pour violation de domicile, violences, menaces avec arme, arrestation illégale, séquestration, vol et dégradations de biens. Le juge d'instruction a pris une ordonnance de non-lieu en retenant qu'il ne pouvait être reproché à quiconque d’avoir commis les faits visés dans la plainte, les acte accomplis n’étant pas manifestement illégaux et ayant été commandés par l’autorité légitime. Cette ordonnance a été confirmée en appel. Devant la Cour de cassation, le requérant soutenait notamment que son arrestation, sa détention et l’intrusion dans son domicile ne reposaient sur aucune base légale, et invoquait en particulier l’article 5 §§ 1 et 5 et l’article 8 de la Convention. La Cour de cassation a rejeté son pourvoi. Introduite devant la Cour européenne des droits de l'homme le 22 septembre 2016, la requête a été communiquée le 8 juillet 2020 et publiée le 27 juillet 2020. Invoquant l’article 5 § 1 de la Convention, le requérant se plaint du fait que son arrestation et la privation de liberté qui s’en est suivie étaient dépourvues de base légale. Invoquant l’article 8 de la Convention, le requérant dénonce une intrusion illégale dans son domicile par les forces de l’ordre. Questions aux parties : 1. Le requérant a-t-il, en déposant une plainte contre X avec constitution de partie civile, épuisé les voies du recours internes, au sens de l’article 35 § 1 de la Convention, s’agissant des griefs tirés des articles 5 § 1 et 8 de la Convention ? 2. L’arrestation du requérant et la privation de liberté qui l’a suivie étaient-elles conformes aux exigences de l’article 5 § 1 de la Convention ? En particulier, se sont-elles déroulées selon les voies légales, comme l’exige cette disposition ? 3. Y a-t-il eu violation de l’article 8 de la Convention du fait de l’intrusion des forces de l’ordre dans le domicile du requérant ? En particulier, cette intrusion était-elle « prévue par la loi », au sens du second paragraphe de cette disposition ? Le Gouvernement est invité à produire une copie des instructions du substitut du procureur qui était de permanence le 12 juillet 2010, mentionnées dans l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Grenoble du 8 avril 2015. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Justice |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-204283 |