Document public
Titre : | Arrêt relatif à la violation des droits d'une femme qui alléguait avoir été forcée par un ancien policier à se prostituer et à la notion de " traite des êtres humains " : S.M. c. Croatie |
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Auteurs : | Grande Chambre, Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), Auteur ; Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 25/06/2020 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 60561/14 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Croatie [Mots-clés] Traite des êtres humains [Mots-clés] Violence sexuelle [Mots-clés] Législation [Mots-clés] Absence d'enquête [Mots-clés] Enquête |
Mots-clés: | Prostitution |
Résumé : |
Dans cette affaire, une ressortissante croate se plaignait d’avoir été contrainte à se prostituer. Elle alléguait en particulier que les autorités n’avaient pas apporté de réponse adéquate à son grief et qu’un cadre juridique propre à traiter pareille problématique faisait défaut en Croatie.
Dans son arrêt de chambre du 19 juillet 2018, la Cour européenne des droits de l'homme avait jugé, par six vois contre une, qu'il y a eu violation de l'article 4 de la Convention européenne des droits de l'homme qui interdit l'esclavage et le travail forcé. Le gouvernement croate a demandé le renvoi de l'affaire devant la Grande chambre de la Cour. Par le présent arrêt, la Grande chambre de la Cour juge, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 4 de la Convention. Elle saisit l’occasion que lui fournit cette affaire pour clarifier sa jurisprudence relative à la traite des êtres humains aux fins de l’exploitation de la prostitution. Elle indique en particulier s’appuyer sur la définition donnée par le droit international pour décider si elle peut qualifier une conduite ou une situation de traite d’êtres humains au regard de l’article 4 de la Convention, et donc pour déterminer si cette disposition peut s’appliquer aux circonstances particulières d’une cause. La Cour précise également que la notion de « travail forcé ou obligatoire » au sens de l’article 4 de la Convention vise à assurer une protection contre des cas d’exploitation grave, comme les cas de prostitution forcée, indépendamment de la question de savoir si, dans les circonstances particulières de la cause, ils se sont produits ou non dans le contexte spécifique de la traite des êtres humains. Elle conclut que l’article 4 trouve à s’appliquer dans l’affaire de la requérante car on peut considérer que certaines caractéristiques de la traite et de la prostitution forcée, comme l’abus de pouvoir sur une personne vulnérable, la contrainte, la tromperie et l’hébergement, étaient présentes dans son cas. En particulier, l’auteur présumé des faits était un policier tandis que la requérante avait été une enfant placée dès l’âge de dix ans ; de plus, il est entré en contact avec elle sur Facebook et lui a fait croire qu’il l’aiderait à trouver un emploi. Au lieu de cela, il a pris des dispositions pour qu’elle se livrât à la prestation de services sexuels soit dans l’appartement qu’il avait loué soit chez les clients auprès desquels il la conduisait. Dans cette situation, les autorités de poursuite étaient dans l’obligation d’ouvrir une enquête en réponse aux allégations de la requérante. Néanmoins, elles n’ont pas suivi toutes les pistes d’enquête évidentes, et elles n’ont notamment pas entendu tous les témoins possibles, de sorte que la procédure judiciaire a revêtu la forme d’une confrontation entre la parole de la requérante et celle de l’auteur présumé des faits. Pareilles lacunes ont fondamentalement porté atteinte à la capacité des autorités internes de cerner la véritable nature de la relation qui existait entre la requérante et l’auteur présumé des faits et de déterminer si celui-ci avait véritablement exploité l’intéressée. |
ECLI : | CE:ECHR:2020:0625JUD006056114 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Justice |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-203509 |