
Document public
Titre : | Règlement amiable RA-2020-037 du 15 mai 2020 relatif au refus de séjour opposé à une mère d’un enfant français sans examen préalable de l’impact de cette décision sur l’intérêt supérieur de son autre fille, ressortissante britannique |
Auteurs : | Défenseur des Droits, Auteur ; Droits fondamentaux des étrangers, Auteur |
Type de document : | Règlements amiables |
Année de publication : | 15/05/2020 |
Numéro de décision ou d'affaire : | RA-2020-037 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Règlement amiable [Documents internes] Règlement amiable réussi [Géographie] Cameroun [Géographie] Royaume-Uni [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Titre de séjour [Mots-clés] Refus [Mots-clés] Préfecture [Mots-clés] Enfant [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Erreur de droit |
Texte : |
Le Défenseur des droits a été saisi de la réclamation d’une ressortissante camerounaise relative au refus qu’elle s’est vue opposer lors de sa demande de titre de séjour en qualité de parent d’enfant français.
Le Défenseur des droits a sollicité du préfet un réexamen de la situation de la réclamante, rappelant que : - La réclamante remplissait les conditions prévues par l’article L.313-11 6° du CESEDA en vigueur depuis le 1er mars 2019 pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire. La réclamante apportait en effet de nombreux éléments de nature à démontrer que le père de sa fille française participait à l’entretien et à l’éducation de sa fille et remplissait donc la condition d’investissement sur le plan éducatif, financier ou sentimental envers l’enfant (contribution alimentaire fixée par le juge aux affaires familiales, relevés de son compte bancaire sur lesquels apparaissent des virements réguliers du père de l’enfant, attestation de la responsable de crèche, photographies) ; - La circonstance que le père déclarant ait reconnu un autre enfant trois mois avant la naissance de l’enfant de la réclamante ne suffit pas à établir le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité à l’égard de celui-ci. Le Défenseur des droits avait donc conclu que l’autorité préfectorale, sur qui repose la charge de prouver le caractère frauduleux de la demande de titre de séjour, procédait à une erreur de droit en considérant que la réclamante ne remplissait pas les conditions d’obtention de plein droit d’une carte de séjour sur le fondement de l’article L.313-11 6° du CESEDA en sa qualité de mère d’un enfant français. Il a par ailleurs été souligné que la décision de refus de séjour opposé à la réclamante ne faisait état ni de l’existence de l’autre fille de la réclamante, ressortissante britannique, ni d’un examen des conséquences du refus de séjour opposé à sa mère l'obligeant à quitter le territoire de l'UE, et impliquant ainsi que sa fille – dont elle a la charge exclusive – soit contrainte également de quitter le territoire de l'Union pris dans son ensemble. Or, l’article 20 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose pourtant que les citoyens de l’Union ont le droit de circuler et de séjour librement sur le territoire des États membres. Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), les enfants peuvent, en tant que ressortissants d’un État membre, se prévaloir également de ces droits. La Cour considère donc que l’article 20 TFUE s’oppose à des mesures nationales, y compris des décisions refusant le droit de séjour aux membres de la famille d’un citoyen de l’UE, qui ont pour effet de priver les citoyens de l’UE de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par leur statut. La Cour affirme par ailleurs qu'il revient aux juridictions nationales de vérifier si le refus opposé à un parent d'un enfant mineur, citoyen européen, l'obligeant à quitter le territoire de l'UE, impliquerait que cet enfant soit contraint également de quitter ce territoire. Dans ce cadre, il importe de déterminer le parent qui assume la garde effective de l’enfant et s’il existe une relation de dépendance entre eux puisque c'est cette relation de dépendance qui est susceptible de mettre en cause l'effet utile de la citoyenneté de l'Union dans la mesure où elle aboutit à ce que le citoyen de l'Union se voie dans l'obligation, de quitter non seulement le territoire de l'État membre dont il est ressortissant mais également de l'ensemble du territoire européen. Enfin, dans des circonstances proches au cas d’espèce, le juge français avait relevé que la mère assumait seule la charge de l'enfant, scolarisé et intégré en France et avait estimé par conséquent que le préfet avait commis une erreur de droit en ne prenant pas en compte l'intérêt supérieur de l'enfant, dès lors que celui-ci serait contraint de quitter le territoire européen en cas de refus de reconnaissance d'un droit au séjour à sa mère (TA Strasbourg, 24 octobre 2017, n° 1705059). Le Défenseur des droits a considéré que l’intérêt supérieur des enfants, notamment de la fille de la réclamante, ressortissante britannique, âgée de 6 ans qui est née en France, y a toujours vécu, y suit une scolarité normale, n’avait pas suffisamment été pris en considération par les autorités préfectorales. Au vu des éléments de droit qui lui étaient ainsi soumis, le préfet a réexaminé la situation de la réclamante et l’a convoquée rapidement en vue de la délivrance d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». |
ELI : | https://juridique.defenseurdesdroits.fr/eli/decision/2020/05/15/00037/aa/texte |