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Titre : | Décision relative à l'irrecevabilité des requêtes portant sur le refus de transcription en France de la filiation de la mère d'intention à l'égard des enfants nés dans le cadre d'une gestation pour autrui à l'étranger : C et E c. France |
Voir aussi : |
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Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 19/11/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1462/18 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Gestation pour autrui (GPA) [Mots-clés] Filiation [Mots-clés] Maternité [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Absence d'atteinte à un droit/liberté |
Résumé : |
Les deux affaires (n° 1462/18 et 17348/18) concernent le refus des autorités françaises de transcrire sur les registres de l'état civil français l'intégralité des actes de naissance d'enfants nés à l'étranger dans le cadre de la gestation pour autrui avec des gamètes du père d'intention et d'une tierce donneuse, pour autant qu'ils désignent la mère d'intention comme étant leur mère légale.
Invoquant l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, les requérants se plaignaient d'une violation du du droit au respect de la vie privée des enfants requérants résultant du refus des autorités françaises de transcrire les actes de naissance dans leur intégralité. Par ailleurs, invoquant l'article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l'article 8, les requérants dénonçaient une atteinte discriminatoire au droit au respect de la vie privée des enfants. Statuant en formation de comité de trois juges, la Cour européenne des droits de l'homme déclare, à l'unanimité, les deux requêtes irrecevables pour défaut manifeste de fondement. La Cour souligne que la situation des enfants requérants correspond au cas de figure examiné dans son avis consultatif du 10 avril 2019. Elle relève aussi que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance du lien de filiation entre les enfants requérants et leur mère d’intention par la voie de l’adoption de l’enfant du conjoint. Cela ressort d’arrêts de la Cour de cassation du 5 juillet 2017, et la Cour ne voit aucune raison de douter des assurances fournies à cet égard par le Gouvernement. Certes, cette possibilité n’est établie de manière certaine que depuis le 5 juillet 2017, alors que l'un des enfants requérants avait sept ans et que les deux autres avaient trois ans, soit, selon toute vraisemblance, bien après la concrétisation du lien entre eux et leur mère d’intention. Or, la Cour a précisé dans son avis consultatif qu’un mécanisme effectif permettant la reconnaissance d’un lien de filiation entre les enfants concernés et la mère d’intention doit exister au plus tard lorsque, selon l’appréciation des circonstances de chaque cas, le lien entre l’enfant et la mère d’intention s’est concrétisé. Toutefois, la Cour estime qu’en l’espèce ce n’est pas imposer aux enfants concernés un fardeau excessif que d’attendre des requérants qu’ils engagent maintenant une procédure d’adoption à cette fin. Elle observe notamment qu’il résulte des éléments produits par le Gouvernement que la durée moyenne d’obtention d’une décision n’est que de 4,1 mois en cas d’adoption plénière et de 4,7 mois en cas d’adoption simple. Par conséquent, la Cour conclut que le refus des autorités françaises de transcrire les actes de naissance étrangers des enfants requérants sur les registres de l’état civil français pour autant qu’ils désignent la mère d’intention comme étant leur mère n’est pas disproportionné par rapport aux buts poursuivis. En ce qui concerne l'existence d'une discrimination, la Cour précise que la différence entre « les autres enfants nés à l’étranger » et « les enfants nés d’une GPA à l’étranger » consiste uniquement en ce que les enfants nés d’une GPA ne peuvent obtenir la transcription intégrale de l’acte de naissance étranger et doivent passer par la voie de l’adoption. Elle note qu’il ressort des explications du Gouvernement que cette différence de traitement quant aux modalités d’établissement du lien maternel de filiation permet, en ce qu’il induit un contrôle juridictionnel, de s’assurer au regard des circonstances particulières de chaque cas qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant né d’une GPA qu’un tel lien soit établi à l’égard de la mère d’intention. Elle rappelle aussi qu’elle a indiqué dans son avis consultatif que le choix des moyens à mettre en œuvre pour permettre la reconnaissance du lien enfant-parents d’intention tombait dans la marge d’appréciation des États et que l’article 8 ne mettait pas à leur charge une obligation générale de reconnaître dès le début un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention. Par conséquent, la différence de traitement dénoncée repose sur une justification objective et raisonnable. Adoptée le 19 novembre, la présente décision a été communiquée par la Cour le 12 décembre 2019. Cette décision est définitive. |
ECLI : | CE:ECHR:2019:1119DEC000146218 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Bioéthique |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-199497 |