Résumé :
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L'affaire concerne le processus de détermination de l'âge d'un jeune étranger non accompagné, arrivé sur le territoire espagnol sans document d'identité. Il a déclaré être mineur. Il a alors subi un examen médical pour déterminer son âge, consistant en une radiographie de la main gauche, selon l’Atlas Greulich & Pyle. Le test a conclu que l’âge de l’intéressé était supérieur à 19 ans. Aucun autre examen, ni entretien n’a été réalisé. Sur la base des résultats de cet examen médical qui ne mentionne aucune marge d’erreur possible, le parquet a déclaré l’auteur adulte et l’a placé dans un centre de détention pour adultes. Par la suite, l’intéressé a fourni une copie de son acte de naissance que le parquet a refusé de prendre en compte pour revoir sa décision. Il invoque devant le Comité plusieurs articles de la Convention. Le Comité avait adopté des mesures provisoires consistant à ne pas renvoyer l’auteur dans son pays d’origine et à le placer dans un centre de protection de l’enfance.
Le Comité des droits de l'enfant considère qu'il y a eu violation de plusieurs articles de la Convention internationale des droits de l'enfant et du Protocole facultatif.
Le Comité estime que le processus de détermination de l'âge suivi par le jeune, qui déclarait être mineur et qui a ensuite fourni des preuves à l'appui de sa déclaration, n'était pas entouré des garanties nécessaires pour protéger ses droits au regard de la Convention. Dans les circonstances de l'espèce, en particulier l'examen utilisé pour déterminer l'âge de l'intéressé, l'absence d'un représentant pour l'assister au cours de la procédure et le rejet quasi automatique de la valeur probante de l'acte de naissance produit par le jeune, sans même que l'État partie ait formellement évalué les informations et, dans l’éventualité d’une incertitude, faire confirmer l’information par les autorités consulaires algériennes, le Comité considère que l'intérêt supérieur de l'enfant n’a pas constitué une considération principale dans la procédure de détermination de âge à laquelle a été soumis l’auteur, en violation des articles 3 et 12 de la Convention.
Le Comité considère aussi que l'âge et la date de naissance d'un enfant font partie de son identité et que les États parties ont l'obligation de respecter le droit de l'enfant de préserver son identité sans le priver d'aucun élément de cette identité. En l'espèce, le Comité note que, bien que le jeune ait fourni aux autorités espagnoles une copie de son certificat de naissance, qui contenait des données relatives à l'identité de l'enfant, l'État partie n'a pas respecté l'identité de l'intéressé en niant toute valeur probante au certificat de naissance, et ce sans évaluation formelle préalable des données contenues dans ce certificat par une autorité compétente et sans avoir vérifié, alternativement, les données contenues dans ce document avec les autorités de son pays d'origine. En conséquence, le Comité conclut que l'État partie a violé l'article 8 de la Convention.
Par ailleurs, le Comité considère que le fait de ne pas appliquer par l’État partie la mesure provisoire demandée, à savoir le transfert du jeune dans un centre de protection de l'enfance pendant l'examen de sa situation par le Comité, constitue en soi une violation de l'article 6 du Protocole facultatif qui, en prévenant la survenance d’un préjudice irréparable pendant l'examen d'une communication, garantissent l’effectivité de la procédure des communications individuelles.
L’État partie devrait accorder à l'intéressé une réparation adéquate. En outre, l'État partie est tenu de prévenir des violations analogues à l'avenir en veillant à ce que toutes les procédures visant à déterminer l'âge d'éventuels enfants non accompagnés soient menées conformément à la Convention et, en particulier, à ce que durant ces procédures, ils aient rapidement accès à un représentant qualifié à titre gratuit.
Conformément à l'article 11 du Protocole facultatif, le Comité souhaite recevoir de l'État partie, dans les meilleurs délais et sous 180 jours, des informations sur les mesures qu'il aura prises pour donner effet à ses constatations.
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