Titre : | Décision 2019-169 du 9 juillet 2019 relative aux arrêtés portant obligation de quitter le territoire sans délai et interdiction d’y circuler pendant 24 mois prises au regard de considérations d’ordre public à l’encontre d’une ressortissante européenne qui justifiait d’un droit au séjour en France |
Accompagne : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Droits fondamentaux des étrangers, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 09/07/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2019-169 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Position suivie d’effet [Documents internes] Visa CEDH [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Ressortissant UE [Mots-clés] Garde à vue [Mots-clés] Décision de classement sans suite [Mots-clés] Justice pénale [Mots-clés] Préfecture [Mots-clés] Manifestation [Mots-clés] Conventions et traités européens [Mots-clés] Libertés publiques et individuelles [Mots-clés] Liberté d'association et de réunion [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Mesure d'éloignement [Mots-clés] Interdiction du territoire [Mots-clés] Rétention administrative [Mots-clés] Justice administrative [Mots-clés] Absence de motivation d'une décision [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Géographie] Espagne |
Mots-clés: | Obligation de quitter le territoire français |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative aux décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai (OQTF) et interdiction de circulation sur le territoire français pour une durée de 24 mois (ICTF) prises à l’encontre d’une ressortissante espagnole à la suite de son interpellation dans le cadre d’une manifestation sur la voie publique.
La réclamante avait été placée en garde à vue pour des faits de « participation à un groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations, port d’arme prohibé et usage et détention de stupéfiants ». Au vu de ces éléments rapportés par les services de police, le préfet a décidé de prendre les décisions précitées. Considérant que la réclamante ne présentait pas de garanties propres à prévenir un risque de fuite, le préfet a par ailleurs estimé qu’elle devait être placée en centre de rétention administrative pour le temps de l’organisation matérielle de sa reconduite. Dans ces circonstances, la garde à vue de l’intéressée a été levée et il a été procédé à son transfert vers le centre de rétention administrative. La procédure pénale a fait l’objet d’un classement sans suite. Le lendemain, la réclamante a été libérée par le juge des libertés et de la détention. Un recours pour excès de pouvoir contre les décisions d’OQTF et d’ICTF prises à son encontre demeurait toutefois pendant devant le tribunal administratif lorsque le Défenseur des droits a été saisi. Au vu des éléments portés à sa connaissance, le Défenseur des droits a pu constater que la réclamante, qui justifiait d’un emploi en CDI depuis près de deux ans, avait la qualité de travailleur au sens du droit de l’Union européenne. Dès lors, elle justifiait, au moment de son interpellation, d’un droit au séjour qui ne pouvait être limité qu’au regard de considérations d’ordre public. A cet égard, le droit européen (directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres) comme interne (articles L.511-3-1 et L.511-3-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) encadre les circonstances dans lesquelles il peut être procédé, pour des raisons d’ordre public, à l’éloignement d’un ressortissant européen justifiant d’un droit au séjour. Il ressort de l’ensemble de ces dispositions que l’éloignement d’un ressortissant européen en situation régulière doit respecter un principe de proportionnalité. C’est ainsi seulement par décision motivée et à la condition que l’intéressé représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l’encontre d’un intérêt fondamental de la société que l’autorité compétente peut obliger un ressortissant européen en séjour régulier à quitter le territoire. Il en va de même de la décision visant à interdire son retour sur le territoire pour une durée déterminée. En l’occurrence, le Défenseur des droits constate que, d’une part, les décisions prises à l’encontre de la réclamante sont insuffisamment motivées et que, d’autre part, la menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l’encontre d’un intérêt fondamental n’est pas caractérisée au regard des faits de l’espèce. Pour cette raison, le Défenseur des droits estime que l’OQTF et l’ICTF prises à l’encontre de la réclamante portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale. Il décide de porter des observations devant le tribunal administratif. |
NOR : | DFDT1900169S |
Suivi de la décision : |
Par jugement du 23 septembre 2019, après avoir visé les observations du Défenseur des droits, le tribunal administratif a annulé les arrêtés préfectoraux au motif que « pour répréhensibles que soient les faits litigieux, le port d’arme prohibé n’étant en outre pas établi par les pièces du dossier, ces éléments ne peuvent caractériser à eux-seuls une menace suffisamment grave à un intérêt fondamental de la société imputables au comportement personnel de cette citoyenne de l’Union européenne ». Compte tenu de l’issue favorable de cette procédure et de la motivation du jugement rendu, il apparaît que la position du Défenseur des droits a été suivie par la juridiction saisie (le délai d’appel n’étant pas expiré.) |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Etrangers - Migrants |
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