Document public
Titre : | Requête relative aux difficultés de signifier les actes et décisions de justice concernant la condamnation d’une personne appartenant à la communauté des gens du voyage qui avait déclaré une boîte postale comme étant son adresse et à la non-admission de son pourvoi en cassation pour tardiveté : Cancy c. France |
Titre suivant : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 05/05/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 35827/17 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Droit à un procès équitable [Mots-clés] Délais anormaux [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Gens du voyage [Mots-clés] Lieu de résidence [Mots-clés] Domicile [Mots-clés] Résidence démontable [Mots-clés] Huissier [Mots-clés] Décision de justice [Mots-clés] Procédure pénale [Mots-clés] Droit à un recours effectif |
Mots-clés: | Boîte postale |
Résumé : |
La requérante appartient à la communauté des gens du voyage. Son conjoint et elle entreprirent des travaux non autorisés sur un terrain situé en zone agricole dont ils étaient propriétaires.
En mai 2013, le tribunal correctionnel a déclaré le couple coupable au pour absence de déclaration préalable de la création d’une aire d’accueil des gens du voyage et de terrains familiaux, pour non-respect du règlement du plan local d’urbanisme, pour installation de caravanes pour une durée de plus de trois mois par an, hors terrain de camping ou parc résidentiel de loisirs, pour réalisation sans autorisation d’une clôture soumise à déclaration préalable en vertu d’une délibération du conseil municipal et poursuite de travaux malgré un arrêté interruptif de travaux pris par le maire. L’avocat de la requérante a interjeté appel du jugement et précisé que l’adresse déclarée de sa cliente était une boîte postale. Plusieurs mois après, l’avocat a été averti que le jugement correctionnel « n’était pas disponible à ce jour ». Il affirme qu’il n’a reçu une copie que deux ans plus tard, en septembre 2015. En novembre 2015, le procureur général a requis un huissier de citer la requérante à comparaître à l’audience du 20 janvier 2016 devant la cour d’appel. Toutefois, l’huissier a informé le procureur qu’il était impossible de délivrer l’acte à une boîte postale. Sur demande du procureur, une nouvelle citation à prévenu, datée du 8 janvier a été signifiée à la requérante. La copie de l’acte de signification a été déposée à l’étude de l’huissier de justice, celui-ci « n’ayant trouvé l’intéressé ou personne n’ayant voulu recevoir l’Acte et vérifications faites que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée ». L’huissier, conformément à l’article 558 alinéa 2 du code de procédure pénale, a adressé à la requérante une lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) lui indiquant qu’elle devait retirer l’acte de signification à l’étude. L’avis de réception de la lettre recommandée adressée par l’huissier mentionne le 18 janvier 2016 comme date de distribution avec la signature de la requérante. Le 11 février 2016, l’huissier a adressé au procureur général l’AR revenu chez lui à la suite de la signification. Par arrêt du 29 février 2016, contradictoire à signifier, la cour d’appel a confirmé le jugement. La cour d’appel a relevé que la requérante avait été citée à l’adresse déclarée dans l’acte d’appel, par acte déposé en l’étude de l’huissier, mais qu’elle n’avait pas comparu et n’était pas représentée à l’audience du 20 janvier 2016. A la demande de la commune, l’huissier a signifié l’arrêt d’appel à la requérante l’adresse déclarée par celle-ci, c’est-à-dire à sa boîte postale. L’acte de signification, indiquant les délais et voies de recours, a été déposé à l’étude, l’huissier indiquant « n’ayant pu trouver l’intéressé ou personne n’ayant voulu recevoir l’Acte et vérifications faites que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée". La requérante a reçu un avis de signification, non daté, apparemment par LRAR (la copie de l’avis constatant la remise de la lettre recommandée ne figure pas au dossier), lui indiquant notamment que « les circonstances rendant impossible la signification à personne, tant en votre domicile que sur votre lieu de travail, personne à votre domicile n’ayant voulu ou pu recevoir copie de l’acte, en application de l’article 558 du code de procédure pénale cet acte a été déposé à mon étude. La copie de cet acte doit y être retirée dans les plus brefs délais (...). La copie de l’acte est conservée en mon Étude pendant trois mois. Passé ce délai, celle-ci en est déchargée. (...) ». La copie de l’avis de signification produite par la requérante porte la mention manuscrite « remis le 11 avril 2016. » Le 15 avril 2016, la requérante, par l’intermédiaire de son avocat, a fait une déclaration de pourvoi en cassation auprès de la cour d’appel puis le 12 mai, elle a déposé un mémoire personnel devant la Cour de cassation. Au visa de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, elle a fait valoir qu’elle n’avait jamais eu connaissance du jugement de première instance, qu’elle avait été convoquée à l’audience d’appel plus de deux ans et huit mois après ce jugement, en hiver, date à laquelle elle ne peut séjourner sur le terrain lui appartenant puisqu’elle n’a ni eau ni électricité et que la citation à prévenu devant la cour d’appel ne s’était pas faite selon la réglementation en vigueur. Elle affirma que le pourvoi ne pouvait être considéré comme tardif car l’avis de signification de l’acte de procédure pénale ne contenait aucune mention des délais pour se pourvoir en cassation. La Cour de cassation a déclaré son pourvoi non admis. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, la requérante soutient que la non admission de son pourvoi en cassation pour tardiveté porte atteinte à son droit d’accès à un tribunal. Introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 5 mai 2017, la requête a été communiquée par la Cour le 13 juin 2019. Question aux parties : Les modalités concrètes de signification de l’arrêt d’appel du 19 février 2016 ont-elles eu pour effet de réduire le délai dont disposait la requérante pour former son pourvoi et de porter ainsi atteinte à son droit d’accès à la Cour de cassation en violation de l’article 6 § 1 de la Convention ? Le Gouvernement français est invité à préciser : - la date à laquelle l’avis de signification de l’arrêt du 19 février 2016 a été envoyé à la requérante et la date à laquelle il lui est parvenu ; - les raisons pour lesquelles les dates de notification inscrites sur l’arrêt d’appel ne sont pas les mêmes que la date de notification prise en compte par la Cour de cassation, soit le 22 mars 2016, pour faire courir le délai de cinq jours, et partant, pour déclarer le pourvoi tardif. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Justice |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-194356 |