Document public
Titre : | Décision 2019-075 du 23 avril 2019 relative à des mesures de rétorsion contre une déléguée du personnel, pour avoir dénoncé des faits de discrimination et la tentative de la licencier à la suite de son inaptitude |
est cité par : | |
Accompagne : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Emploi, biens et services privés (2016-2023), Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 23/04/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2019-075 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Position suivie d’effet [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] État de santé [Mots-clés] Activité syndicale ou mutualiste [Mots-clés] Maladie [Mots-clés] Inaptitude [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Congé [Mots-clés] Comité d'entreprise (CE) [Mots-clés] Discrimination indirecte [Mots-clés] Indemnisation [Mots-clés] Harcèlement [Mots-clés] Harcèlement moral |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation d’une élue titulaire à la délégation unique du personnel au sujet de faits survenus à l’issue d’un contentieux l’opposant son employeur.
La salariée avait en effet été affectée d’office sur un poste en inadéquation avec son état de santé et avait saisi le conseil de prud’hommes.Ce dernier avait jugé que le contrat de travail avait été exécuté de mauvaise foi et que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité en ne respectant pas les prescriptions de la médecine du travail. A la suite de ce jugement devenu définitif, la réclamante ne bénéficie plus de cadeaux d’entreprise et ne perçoit peu ou plus ses primes. Interpelé par les délégués du personnel sur cette situation, l’employeur reproche publiquement à la réclamante d’avoir « empoché » plus de 9000 euros de dommages et intérêts et estime que le coût du litige s’élevant à 18000 euros vient ainsi en déduction du calcul des primes. Il déclenche également une pétition à son encontre qui adopte les mêmes termes. L’inspection du travail estime ces propos tendancieux et discriminatoires à l’encontre de la réclamante et conclut à l’existence d’« un traitement nettement différencié et défavorable » dans l’attribution de ses primes. En arrêt de travail compte tenu de son état anxio-dépressif, la réclamante est déclarée inapte à tout poste par la médecine du travail. L’employeur décide de la licencier après avoir estimé tout reclassement impossible. Toutefois, le ministère du travail refuse l’autorisation de la licencier au motif qu’il existe un lien entre la mesure de licenciement et le mandat de la réclamante. Le Défenseur des droits conclut que l’absence ou le caractère extrêmement réduit du versement des primes, le refus de lui accorder des cadeaux d’entreprises ainsi que la stigmatisation dont la réclamante a fait l’objet sont constitutifs de mesures de rétorsion pour avoir relaté, de bonne foi, des faits de discrimination fondés sur son état de santé et prohibées par l’article L. 1132-3 du Code du travail ainsi que l’article 3 de la loi n° 2008-496. Ces diverses formes de discrimination, prises dans leur ensemble et dans un contexte général d’entrave à l’exercice du droit syndical, se concluant par la décision de l’employeur de la licencier, caractérisent une situation ayant eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant en lien avec l’état de santé et les activités syndicales de la réclamante, au sens de l’article L.1132-1 du Code du travail et de l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 auquel il renvoie. Le Défenseur des droits rappelle également que l’employeur ne saurait se prévaloir de l’inaptitude du salarié pour le licencier lorsque celle-ci est la conséquence d’un harcèlement. S’appuyant expressément sur les observations du Défenseur des droits (développées dans sa décision n°2018-097), le conseil de prud’hommes a jugé le 3 juillet 2018 que la réclamante avait subi des faits de discrimination et de harcèlement moral contraires aux articles L. 1132-1 et L. 1152-1 du Code du travail et a condamné son employeur à lui verser la somme cumulée de 32 000 euros pour ces faits. Il l’a toutefois déboutée de sa demande concernant le versement d’un chèque cadeau de 120 euros au motif de son congé maladie. Bien que le Défenseur des droits n’ait pas été saisi sur ce point, il tient à rappeler que le refus de ce type d’avantage est susceptible de caractériser une discrimination indirecte liée à l’état de santé, sauf si l’employeur démontre qu’il est « objectivement justifié[s] par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but [sont] nécessaires et appropriés ». Or, ce contrôle n’a pas été effectué par le conseil des prud’hommes. Dans un cas similaire, le Défenseur des droits a considéré que faute d’avoir démontré que les ressources du comité d’entreprise étaient insuffisantes et de pouvoir expliquer en quoi une autre gestion des ressources du comité était impossible, le fait de refuser des chèques vacances aux salariés en longue maladie ou en congé parental était discriminatoire en raison de l’état de santé et de la situation de famille (décision n°MLD-2014-018 du 24 février 2014). Le Défenseur des droits décide de présenter des observations devant la Cour d’appel saisie de l’affaire. |
NOR : | DFDO1900075S |
Suivi de la décision : |
la Cour d’appel a confirmé, le 5 décembre 2019, le jugement de première instance dans son intégralité, y compris les montants de dommages et intérêts s’élevant à un montant cumulé de 32000 euros. Il rejette tous les arguments de l’employeur et reprend in extenso les paragraphes 79 et 80 de la décision du Défenseur des droits en particulier dans sa qualification des faits, à savoir que la réclamante a subi : - des mesures de rétorsion discriminatoires en lien avec son état de santé au sens de L. 1132-3 du Code du travail ainsi que l’article 3 de la loi n° 2008-496 ; - des mesures indirectes de discrimination fondée sur son état de santé en ce qui concerne le refus de chèques cadeaux ; - des mesures de harcèlement discriminatoire en lien avec son état de santé et ses activités syndicales au sens de l’article L.1132-1 du Code du travail et l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 A ce jour, l’employeur n’a pas indiqué s’il souhaitait se pourvoir en cassation. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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