
Document public
Titre : | Requête relative au refus d'accès aux archives présidentielles concernant le rôle de la France dans le génocide au Rwanda : Graner c. France |
Titre suivant : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 14/12/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 84536/17 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Géographie] Rwanda [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Communication avec les services publics [Mots-clés] Communication de documents administratifs [Mots-clés] Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) [Mots-clés] Personnel politique [Mots-clés] Liberté d'expression [Mots-clés] Droit à un recours effectif [Mots-clés] Refus |
Résumé : |
Parallèlement à son activité de recherche scientifique au CNRS, le requérant conduit depuis plusieurs années un travail d’enquête sur le rôle joué par la France au Rwanda avant, pendant et après le génocide des Tutsis en 1994. En 2014, il a publié un ouvrage consacré à ce sujet. A la suite de la décision du secrétaire général de la présidence de la République française de « déclassifier des archives des documents de l’Élysée relatifs au Rwanda entre 1990 et 1995 », le requérant, qui préparait un autre livre, a demandé au directeur des Archives de France l’autorisation de consulter dix-huit dossiers faisant partie des archives de la présidence. Le requérant a été autorisé à consulter seulement deux des dix-huit dossiers au motif que ceux-ci étaient « susceptibles de porter une atteinte excessive aux intérêts protégés par la loi » et contenaient un ou des documents classés « secret », « secret défense » ou « confidentiel défense ». La commission d'accès aux documents administratifs a rendu un avis défavorable à la demande du requérant en considérant que les archives demandées sont des archives présidentielles versées sous protocole signé antérieurement à la publication de la loi du 15 juillet 2008 et qu'en l'espèce, la mandataire des archives du président n'a pas souhaité autoriser la consultation de ces archives par dérogation. Par la suite, le ministre de la culture et de la communication, après accord de la mandataire, a autorisé le requérant à consulter cinq des seize dossiers litigieux.
Dans le cadre du recours tendant à l'annulation de refus qui lui a été opposé, le requérant a présenté une question prioritaire de constitutionnalité de l'article L. 213-4 du code du patrimoine en soutenant qu'il confère au mandataire le pouvoir de s’opposer, seul et sans explication, au droit des citoyens d’accéder librement aux archives publiques. Il ajoutait que le caractère discrétionnaire du refus opposé par le mandataire joint à la situation de compétence liée dans laquelle se trouve le ministre pour refuser l’accès aux archives publiques concernées dans un tel cas ne permettait pas l’exercice du droit à un recours effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution. En mai 2018, le tribunal administratif a jugé notamment que le requérant n'apportait aucun élément de nature à démontrer que l'intérêt que présenterait la consultation de ces archives avant l’expiration du délai prévu par le code du patrimoine, qui expire en l’espèce en janvier 2021, serait supérieur aux intérêts liés notamment au respect de la vie privée, de la sécurité de l’État et de la prévention de troubles à l’ordre public que la loi a entendu ainsi protéger. La procédure devant le Conseil d’État est pendante. Devant la Cour européenne des droits de l'homme, le requérant invoque l'article 10 de la Convention et dénonce une restriction arbitraire de son droit à consulter des archives publiques en vue d’effectuer un travail de recherche historique et du droit du public à recevoir des informations d’intérêt général. Par ailleurs, invoquant l’article 13 de la Convention, le requérant se plaint de ce qu’il ne disposait pas d’un recours effectif permettant de faire valoir son droit à la liberté d’expression. Introduite devant la CEDH le 14 décembre 2017, la requête a été communiquée par la Cour le 2 mai 2019. Questions aux parties : 1. La procédure interne étant pendante devant le Conseil d’État, le requérant a-t-il épuisé les voies de recours internes conformément aux exigences de l’article 35 § 1 de la Convention ? Quelles conséquences convient-il de tirer à cet égard de la décision n° 2017-655 QPC du Conseil constitutionnel du 15 septembre 2017, et du fait que, selon l’avis de la commission d’accès aux documents administratifs du 3 mars 2016, l’administration se trouvait dans une situation de compétence liée ? 2. Y a-t-il eu violation de l’article 10 de la Convention du fait du rejet partiel de la demande du requérant tendant à la consultation de dossiers faisant partie des archives présidentielles ? 3. Le requérant a-t-il eu accès à un recours effectif, au sens de l’article 13 de la Convention, pour faire valoir son grief tiré de l’article 10 de la Convention ? |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-193407 |