Document public
Titre : | Arrêt relatif au caractère discriminatoire de la différence salariale entre une dessinatrice d’un bureau d’études et ses collègues masculins |
Auteurs : | Cour d'appel d'Orléans, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 04/04/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 16/00114 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Égalité de traitement [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Rémunération [Mots-clés] Carrière [Mots-clés] Mesures de rétorsion [Mots-clés] Égalité femme - homme [Mots-clés] Entreprise [Mots-clés] TPE / PME [Mots-clés] Licenciement [Mots-clés] Inaptitude [Mots-clés] Obligation de sécurité de résultat [Mots-clés] Arrêt maladie |
Résumé : |
Recrutée en septembre 2007 en qualité de dessinatrice projet au sein d’un bureau d’études, la requérante a sollicité à plusieurs reprises, mais en vain, une augmentation de rémunération qui, selon elle, était inférieure à ses collègues masculins occupant le même poste. Quelques jours après avoir dénoncé la dégradation de ses conditions de travail en janvier 2014, en raison notamment de discrimination et de harcèlement, elle a été convoquée par les responsables de la société et placée, à l’issue de l’entretien, en arrêt de travail puis déclarée inapte à tout poste dans l’entreprise pour danger immédiat. Entre temps, elle a saisi la juridiction prud’homale pour voir condamner la société à lui verser diverses sommes et prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur ainsi que le Défenseur des droits.
Le conseil de prud’hommes a débouté la salariée de l’ensemble de ses demandes. La cour d’appel infirme le jugement prud’homal et reconnaît l’existence de discrimination salariale fondée sur le sexe dès l’embauche de la requérante, le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur produisant les effets d’un licenciement nul. La cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté l’employeur de sa demande reconventionnelle visant la condamnation de la salariée pour procédure abusive. La cour considère notamment que l’employeur a mis en œuvre la différence de rémunération entre la requérante et les autres salariés dès le début de la relation contractuelle et qu’il ne pouvait justifier cette disparité par la suite en se fondant sur les tâches et responsabilités confiées aux salariés. Par ailleurs, l’employeur ne produit aucun élément pour démontrer que l’évolution de carrière des salariés hommes était identique à celle de la requérante ni que les salariées de sexe féminin ont pu obtenir à l’embauche le même niveau de rémunération que leurs collègues masculins. La cour ajoute qu’il résulte notamment du rapport du Défenseur des droits, que pendant la relation contractuelle, la différence salariale a augmenté de manière très importante et permanente pour les salariés hommes qui percevait en 2013 le salaire entre 3230 € et 4180 € tandis que la requérante ne percevait que 2160 €. La cour estime que l’expérience professionnelle d’un des salariés ou les diplômes supérieurs d’un autre ne les place pas dans une situation strictement comparable à celle de la requérante mais que cela n’explique pas qu’ils aient reçu un salaire quasiment double par rapport à celui perçu par l’intéressée et ce alors qu’ils avaient une qualification et une classification égales à la sienne. En outre, la cour souligne que le Défenseur des droits a relevé, d’une part, que contrairement aux collègues masculins, les évaluations professionnelles de la requérante comportaient des mentions relevant de sa vie privée (situation familiale et nombre d’enfant à charge). D’autre part, il a relevé qu’il existait une différence importante dans le montant de primes annuelles et qu’enfin, sur les quatre dessinateurs-projecteurs, la requérante était la seule à être subordonnée à un autre. La cour conclut que l’employeur échoue à démontrer qu’il existait des éléments objectifs expliquant ses décisions de traiter différemment les dessinateurs-projecteurs et que la requérante a subi une différence de traitement dans l’évolution de sa carrière, qui ne peut s’expliquer qu’en raison de son sexe. Ensuite, la cour considère que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité. Elle retient que la salariée a été déclarée inapte à son poste en une seule visite à l’issue de l’entretien avec les responsables de l’entreprise après qu’elle a alerté l’employeur sur la discrimination salariale dont elle s’estimait victime et sur la dégradation de ses conditions de travail. Selon la cour, cet entretien n’avait pas une vocation apaisante mais bien une finalité de représailles alors qu’il appartenait à l’employeur de prendre toutes les mesures pour déterminer si la discrimination dénoncée correspondait à la réalité et veiller à la sécurité et à la santé de la salariée dès la réception de son courrier d’alerte. Enfin, la cour prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur qui produit les effets d’un licenciement nul. L’employeur doit verser à la requérante diverses sommes dont 25 000 € en réparation du préjudice résultant de la rupture de son contrat de travail et près de 38 000 € à titre de rappel de salaire. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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