Document public
Titre : | Décision 2019-081 du 29 mars 2019 relative à une discrimination à compter de l’annonce de la grossesse et au retour de congé maternité d’une salariée licenciée par la suite pour motif économique |
Voir aussi : | |
est cité par : |
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Accompagne : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Emploi, biens et services privés (2016-2023), Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 29/03/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2019-081 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Position partiellement suivie d’effet [Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Carrière [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Licenciement économique |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative à des faits de discrimination à compter de l’annonce de la grossesse et au retour de congé maternité d’une salariée.
Au vu des éléments présentés par la réclamante, le Défenseur des droits a engagé une enquête auprès de la société mise en cause. Les éléments recueillis au cours de l’enquête ont permis de constater que la salariée a subi, à compter de l’annonce de sa grossesse et à son retour de congé maternité au sein de la société, une discrimination en raison de son sexe, de sa situation de famille et de sa grossesse qui s’est traduite par un retrait de fonctions non objectivement justifié par l’employeur et par l’existence d’agissements ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant au sens de l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 auquel renvoie l’article L.1132-1 du code du travail. L’enquête a également permis de constater que le licenciement pour motif économique de la réclamante, dont la réalité n’est pas suffisamment démontrée par l’employeur, s’inscrit dans ce contexte et caractérise un détournement du statut protecteur des représentants du personnel, encourt la nullité, par application des dispositions de l’article L.1134-2 du code du travail. En conséquence, le Défenseur des droits décide de présenter ses observations devant la cour d’appel saisie du litige, conformément à l’article 33 de la loi organique n°2011-333 du 29 mars 2011. |
NOR : | DFDO1900081S |
Suivi de la décision : |
Par arrêt en date du 18 juin 2019, la Cour d’appel a réformé le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que la réclamante a fait l’objet d’une discrimination. La Cour d’appel constate que la réclamante a été remplacée par une autre personne en contrat à durée déterminée pour un poste d’analyse finance interne et qu’elle a continué à assurer pour partie les fonctions de la requérante jusqu’en mars 2012 soit plusieurs mois après son retour en janvier 2012. Le remplaçant de la réclamante a lui-même été remplacé par un autre individu en avril 2012. La Cour d’appel constate que les attributions de la requérante ont été fortement réduites et que les contrôles dont elle était en charge avant sa grossesse ne lui ont pas été restitués mais confiés à d’autres salariés. Dans sa décision, la Cour d’appel a, dans un premier temps, relevé que la lettre de licenciement se bornait à invoquer des résultats en France en déclin, démenti par les bilans produits, que le groupe était de dimension internationale et qu’il ne résultait d’aucun élément que la réorganisation était destinée à sauvegarder la compétitivité du secteur d’activité du groupe puis a relevé dans un second temps que ce licenciement prononcé à l’issue de la période de protection de candidat aux fonctions de représentant du personnel, laissait supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en raison de l’état de grossesse, le sexe, la situation de famille. Afin de statuer sur les indemnités dues à la salariée à ce titre et après avoir relevé qu’elle sollicitait sa réintégration, la Cour considère que la salariée a droit au paiement d’une somme correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s’est écoulée entre son licenciement et sa réintégration. La Cour d’appel précise qu’il convient de déduire les revenus de remplacement que la salariée a perçu durant cette période. Elle justifie cette déduction en raison de l’absence du principe de non-discrimination en raison de l’état de grossesse, du sexe, et de la situation de famille reconnu comme une liberté fondamentale consacrée par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ou par la Constitution du 4 octobre 1958. Son analyse semble critiquable au vu de l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 garantissant l’égalité des sexes, le principe de non-discrimination étant une simple application de ce droit. L’absence de discrimination en raison de l’état de grossesse, du sexe, de la situation de famille devrait alors revêtir la qualification de liberté fondamentale constitutionnellement reconnue au même titre que l’action en justice, le droit de grève, les activités syndicales et l’état de santé. Cette analyse a déjà été appliquée indirectement par la Cour de Cassation qui a considéré que constituait une « liberté fondamentale au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'exercice par une salariée d'une action en justice tendant à faire reconnaître une discrimination à l'embauche fondée sur son état de grossesse » (Cass soc 20 octobre 2009 n°08-44.660). Par ailleurs, elle ne retient pas l’existence d’un détournement du statut protecteur de candidat aux fonctions de représentant du personnel, car elle considère qu’il n’est pas établi que le licenciement ait été décidé avant l’expiration de sa période de protection. Ce faisant, la Cour d’appel reprend le raisonnement du Défenseur des droits et confirme la discrimination. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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