
Document public
Titre : | Décision relative à la radiation du rôle d'une requête portant sur la remise d'une famille kosovare aux autorités hongroises sur la base du règlement Dublin III : A.S. et G.S. c. France |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 29/01/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 4409/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Géographie] Hongrie [Mots-clés] Traitement inhumain et dégradant [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Asile [Mots-clés] Règlement Dublin [Mots-clés] Reconduite à la frontière [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Mesure d'éloignement |
Résumé : |
Les requérants, un couple de kosovars, font l'objet d'une décision de remise aux autorités hongroises. La requérante était enceinte de plus de 7 mois au jour prévu pour l'exécution de la décision de remise aux autorités hongroises (le 21 janvier 2016).
Invoquant le risque de traitement inhumain ou dégradant en cas de transfert vers la Hongrie puisqu'ils risquaient d'être refoulés vers la Serbie, ils ont saisi, le 19 janvier 2016, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) d'une mesure provisoire en se prévalant de l'état de grossesse avancée de la requérante et du fait qu'elle souffrait de diabète gestationnel. La Cour a décidé d'indiquer au gouvernement français de ne pas renvoyer les requérants avant le 28 janvier et l'a invité notamment à fournir toute observation pertinente sur l'état de santé actuel de la requérante. Le gouvernement a confirmé que l'intéressée se trouvait dans l'incapacité de voyager. En conséquence, le préfet a informé l'avocate des requérants que le transfert avait été annulé et que les deux requérants étaient invités à se présenter, après la naissance de leur enfant, à la préfecture pour réexamen de leur demande d’asile et qu’ils ne seraient pas transférés tant qu’un examen de leur situation n’aurait pas été réalisé. A la suite du rejet de leur demande d'asile, ils ont fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire. Selon les dernières informations communiquées en novembre 2018 par l'avocate des requérants, ce derniers résidaient toujours en France et avaient sollicité un titre de séjour. Leur demande était actuellement en cours d'instruction. Le Défenseur des droits a présenté ses observations dans cette affaire. S'appuyant sur les rapports e plusieurs ONG, sur les observations du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe ainsi que sur les décisions de juridictions administratives françaises, il souligne les défaillances systémiques constatées en Hongrie dans les conditions d’accueil des demandeurs d’asile et dans l’examen de leurs demandes d’asile. Le Gouvernement estime qu’en examinant la demande d’asile des requérants, il a satisfait leurs revendications. En effet, il précise que depuis l’examen de leur demande d’asile par les autorités françaises, les requérants ont cessé de relever du règlement Dublin III. Ils ne seront donc pas réacheminés vers la Hongrie et leurs craintes en cas de retour vers ce pays ne sont donc plus fondées. Le Gouvernement indique, par ailleurs, qu’au regard de l’obligation de quitter le territoire du 3 janvier 2017 dont ils font l’objet les requérants, s’ils devaient être renvoyés, le seraient vers le Kosovo, pays où ils sont légalement admissibles. Le Gouvernement précise que la décision du préfet de prendre en charge l’examen de la demande d’asile des requérants a entrainé implicitement mais nécessairement l’abrogation de la décision de transfert vers la Hongrie. Les requérants s’opposent à cette thèse et soutiennent en particulier qu’ils n’ont pas obtenu l’annulation de la décision de transfert vers la Hongrie. La Cour observe que dans certaines affaires, elle a estimé qu’il ne se justifiait plus de poursuivre l’examen de la requête, au sens de l’article 37 § 1 c) de la Convention, et décidé de la rayer du rôle car il ressortait clairement des informations dont elle disposait que le requérant, bien que n’ayant pas obtenu de permis de séjour, ne risquait plus, ni à ce moment-là ni avant longtemps, d’être expulsé, et qu’il avait la possibilité de contester devant les autorités nationales, et le cas échéant devant la Cour, une éventuelle nouvelle mesure d’éloignement. Elle prend acte du fait que les requérants ont bénéficié d’un examen de leur demande d’asile par les autorités françaises, qu’ils font désormais l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire à destination du Kosovo ou de tout autre pays où ils seraient légalement admissibles et que leur demande de titre de séjour est actuellement en cours d’instruction. Elle énonce qu'il ne lui appartient pas de spéculer sur le comportement futur des autorités françaises. Ainsi, l’affirmation du Gouvernement selon laquelle les requérants ne seront pas reconduits vers la Hongrie suffit à la Cour pour conclure que ces derniers ne risquent pas d’être expulsés vers ce pays, ni pour le moment ni dans un avenir prévisible. La Cour observe que si la mesure de renvoi vers la Hongrie devait être mise à exécution, les requérants pourraient saisir la Cour d’une nouvelle requête, ainsi que d’une nouvelle demande d’application de l’article 39 du règlement. Dans ces conditions, et compte tenu de la nature subsidiaire du mécanisme de contrôle institué par la Convention, la Cour estime qu’il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête. La Cour est en outre d’avis qu’il n’existe pas en l’espèce de circonstances spéciales touchant au respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles qui exigeraient la poursuite de l’examen de la requête. La Cour tient par ailleurs à rappeler qu’après avoir rayé une requête du rôle, elle peut à tout moment décider de l’y réinscrire si elle estime que les circonstances le justifient. Par ces motifs, la Cour, à l'unanimité, décide de rayer la requête du rôle. Adoptée le 29 janvier 2019, cette décision a été rendue publique le 21 février. |
ECLI : | CE:ECHR:2019:0129DEC000440916 |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-191437 |
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