Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus injustifié d’accorder la protection fonctionnelle à une gardienne de la paix, victime de harcèlement moral et sexuel dans le cadre de ses fonctions |
est cité par : |
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Auteurs : | Cour administrative d'appel de Marseille, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 15/01/2019 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 17MA00578 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi public [Mots-clés] Fonction publique d'État [Mots-clés] Police nationale [Mots-clés] Harcèlement [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] Harcèlement sexuel [Mots-clés] Fonctionnaire [Mots-clés] Agent public |
Mots-clés: | Protection fonctionnelle |
Résumé : |
Affectée à compter du mois de février 2011 à la brigade spécialisée de terrain au sein d’un commissariat de police, la requérante, gardienne de la paix, a sollicité, en vain, en septembre 2014, la protection fonctionnelle en vue d’engager une action pénale à l’encontre de deux de ses supérieurs pour des faits de harcèlement sexuel et moral. Le tribunal administratif a rejeté le recours de l’intéressée pour excès de pouvoir contre la décision portant rejet de sa demande de protection fonctionnelle.
Le Défenseur des droits a présenté ses observations devant la cour administrative d’appel. Il estime que l’intéressée a été victime d’agissements à connotations sexuelle et sexiste et de mesures de représailles et qu’ainsi, elle aurait dû obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle. La cour administrative d’appel annule le jugement attaqué et enjoint au ministre de l’intérieur d’accorder à la requérante le bénéfice de la protection fonctionnelle. La cour énonce que les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 établissement à la charge de la collectivité publique et au profit des fonctionnaires, lorsqu’ils ont été victimes d’attaques à l’occasion de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général. Elle considère qu’il résulte des dispositions de l’article 6 ter de la même loi que sont constitutifs de harcèlement sexuel et, comme tels, passibles d’une sanction disciplinaire, des propos ou des comportements à connotation sexuelle, répétés ou même, lorsqu’ils atteignent un certain degré de gravité, non répétés, tenus dans le cadre ou à l’occasion du service, non désirés par celui ou celle qui en est le destinataire et ayant pour objet ou pour effet soit de porter atteinte à sa dignité, soit, notamment lorsqu’ils sont le fait d’un supérieur hiérarchique ou d’une personne qu’elle pense susceptible d’avoir une influence sur ses conditions de travail ou le déroulement de sa carrière, de créer à l’encontre de la victime, une situation intimidante, hostile ou offensante. Enfin, aux termes du premier alinéa de l’article 6 quinquies de la loi susvisée, aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. La cour considère que pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique. Il appartient à l’agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement, lorsqu’il entend de contester le refus opposé par l’administration à une demande de protection fonctionnelle, de soumettre au juge des éléments de fait susceptible d’en faire présumer l’existence. De son côté, l’administration doit produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. En l’espèce, la requérante soutient avoir fait régulièrement l’objet, en 2012, dans l’exercice de ses fonctions, d’attaques verbales injurieuses et obscènes, de propositions à caractère sexuel ainsi que de harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique. Quant au deuxième supérieur de la requérante, celui-ci l’aurait notamment dénigré publiquement sur un réseau social par la mise en cause de la réalité de son accident du travail et intimidée par la menace d’une mutation au service des plaintes. En première instance, la requérante a produit ses courriers et plaintes, la lettre du procureur de la République procédant au classement sans suite de sa plainte, ainsi que sa nouvelle plainte, avec constitution de partie civile. La cour considère, qu’il ressort des nouveaux éléments produits pour la première fois en appel, que dans le cadre d’une enquête diligentée par l’inspection générale de la police nationale (IGPN), quatre collègues ont témoigné en faveur de la requérante en relatant de manière particulièrement circonstanciée certains faits commis à son encontre en tant que fonctionnaire de police et imputés à ses deux supérieurs. La cour considère que la requérante apporte ainsi à l’appui de ses dires des éléments suffisants pour faire présumer de la matérialité des faits d’attaques dont elle se dit victime à la date de la décision attaquée, contrairement à ce que fait valoir le ministre de l’intérieur en défense qui, par ailleurs, ne renverse pas une telle présomption. Dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que, s’agissant de telles agressions de harcèlement, tant sexuel d’abord, que moral ensuite, l’administration a méconnu les dispositions de l’article 11 de la loi de 1983, en ne lui accordant aucune protection. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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