Document public
Titre : | Arrêt relatif à la discrimination et au harcèlement moral subis par une salariée à son retour de congé maternité |
Auteurs : | Cour d'appel de Versailles, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 27/09/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 17/00574 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Congé de maternité [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Harcèlement [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] Carrière |
Résumé : |
L’affaire concerne les mesures défavorables prises à l’égard d’une salariée à la suite de son absence pour maternité.
En février 2014, la requérante, responsable de grands comptes au sein d’une société depuis seize ans, s’est trouvée en arrêt maladie pour grossesse pathologique puis en congé maternité. Elle a repris son travail neuf mois plus tard. A la suite d’une réorganisation, préparée pendant son congé maternité, l’intitulé des fonctions de la salariée a été modifiée et elle a été placée sous l’autorité d’un collègue ayant une ancienneté moindre qu’elle. Alors que son poste était auparavant sédentaire, la salariée s’est vu confier des fonctions de commerciale et de nouvelles taches jusqu’à alors attribuées à ses subordonnés, avec de nouvelles contraintes de déplacement dans un secteur géographique couvrant le quart de la France. A l’issue d’une réunion de travail présentant la réorganisation commerciale, la salariée, qui n’avait pas accepté les modifications de son poste, a été prise de malaise et placée en arrêt maladie. Déclarée inapte à tout poste dans l’entreprise en mai 2017, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Dénonçant le harcèlement moral de la part de son nouveau supérieur hiérarchique ainsi que sa rétrogradation à la suite de son congé maternité, la salariée a saisi le juge prud’homal. Statuant en formation de départage, le conseil de prud’hommes l’a toutefois débouté de l’intégralité de ses demandes au titre de la discrimination et de harcèlement moral. Le Défenseur des droits a décidé de présenter ses observations en appel. Par le présent arrêt, la cour d’appel suit les observations du Défenseur des droits. Elle infirme le jugement et reconnaît l’existence de discrimination à l’égard de la salariée ainsi que de harcèlement moral subi de la part du supérieur hiérarchique. Elle considère que l’exercice d’un pouvoir de direction n’exclut pas, par lui-même, l’existence d’une discrimination illicite. Or, si l’employeur soutient que l’ensemble des mesures critiquées par la salariée, à savoir la nomination au nouveau poste de hiérarchie qui avait été créé, le nouvel organigramme, la réorganisation de la société, relève de l’exercice normal de son pouvoir de direction, il n’apporte aucun élément permettant d’expliquer que la conjonction de la promotion du collègue masculin ayant une ancienneté moindre que la salariée, de sa nouvelle subordination à celui-ci, de la parte de substance de fonctions de la salariée et des nouvelles contraintes en termes de déplacement géographique qui en résultaient pour une jeune mère, de même que l’absence d’information pendant son congé de maternité sur la réorganisation ou l’absence d’organisation de l’entretien professionnel lors de son retour de congé maternité, reposent sur des éléments objectifs à toute discrimination. L’employeur ne justifie pas davantage que la modification du contrat de travail mise en œuvre unilatéralement et sans l’accord, pourtant nécessaire, de la salariée, est également étranger à une telle discrimination. Quant au harcèlement moral, la cour retient que le nouveau supérieur hiérarchique a bien souhaité exercer une pression sur la salariée afin de lui imposer, soit de se soumettre au projet qu’il mettait en œuvre, soit de démissionner. La cour retient en outre que la notification publique de la rétrogradation de la salariée lors de la réunion de travail, alors qu’elle n’avait pas consenti expressément à la modification de son contrat de travail, constitue une humiliation de nature à affecter la dignité et les conditions de travail de la salariée. Enfin, la cour prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur. Cette rupture produit les effets d’un licenciement nul. L’employeur est condamné à payer à la salariée les sommes de 90 000 € à titre d’indemnité pour licenciement nul et 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination et harcèlement. Le supérieur hiérarchique est quant à lui condamné à verser à la salariée la somme de 2 000 € pour harcèlement moral. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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