Document public
Titre : | Décision 2018-155 du 29 mai 2018 relative aux circonstances dans lesquelles une personne est décédée à la suite de son interpellation par des fonctionnaires de police, la nuit du 5 au 6 mars 2015 à T. |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Déontologie de la sécurité, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 29/05/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2018-155 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Documents internes] Position partiellement suivie d’effet [Mots-clés] Relation avec les professionnels de la sécurité [Mots-clés] Déontologie de la sécurité [Mots-clés] Police nationale [Mots-clés] Interpellation [Mots-clés] Décès [Mots-clés] Appel police secours [Mots-clés] Usage de la force [Mots-clés] Procédure disciplinaire [Mots-clés] Discernement [Mots-clés] Devoir de protection |
Résumé : |
Le Défenseur des droits, saisi d’office des circonstances dans lesquelles une personne est décédée à la suite de son interpellation par des fonctionnaires de police, la nuit du 5 au 6 mars 2015 à T. :
- Constate que la note de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) du 8 octobre 2008 concernant les prescriptions de l’IGPN relatives à l’usage de la force, applicable à la date des faits, n’a pas été diffusée au sein de chacune des directions dépendant de la préfecture de police de T. ; - Recommande que soit diffusée sur l’ensemble du territoire la note du 4 novembre 2015 relative aux principes d’emploi de la force ou la contrainte pour la maîtrise d’une personne en état de forte agitation en vue de son interpellation ou de son transport, laquelle a remplacé la note IGPN précitée de 2008 ; - Constate que ni l’opérateur du centre d’information et de commandement (CIC) ayant traité l’appel émis au 17 police secours, ni l’opérateur de la salle de commandement du commissariat ayant ensuite reçu la transmission, n’ont sollicité le centre 15 lorsqu’ils ont été alertés de la fragilité psychologique de la personne à appréhender, conformément aux instructions prévues par la note IGPN du 8 octobre 2008 ; - Considère que l’opérateur de la salle de commandement du commissariat ayant sollicité l’intervention des équipages de police sur les lieux a manqué de rigueur en omettant de leur répercuter les informations qui lui avaient été transmises par l’opérateur du centre d’information et de commandement relatives à la fragilité psychologique de M. X. ; - N’ayant pu identifier avec certitude cet opérateur, recommande qu’il soit rappelé à l’ensemble des opérateurs présents au commissariat le soir des faits, la nécessité de répercuter, avec rigueur, l’intégralité des informations leur étant transmises ; - Plus globalement, recommande que l’ensemble des opérateurs radio bénéficient obligatoirement de la « formation des opérateurs CIC (centre d’information et de commandement) – SIC (salle d’information et de commandement) » ; - Considère que le recours à la force par l’équipage primo-intervenant n’était pas nécessaire ; - Recommande de privilégier systématiquement le dialogue en présence d’une personne en état d’agitation, peu importe l’origine de cette agitation (état alcoolique, prise de produits stupéfiants, troubles psychiatriques etc…), laquelle ne saurait être connue précisément des effectifs intervenant au moment de l’intervention ; - Recommande que soit intégré à la formation continue des fonctionnaires de police un module spécifique relatif à l’appréhension des personnes en état d’agitation, au sens large, et de renforcer la formation initiale sur ce point ; - Considère que l’étranglement au sol pratiqué par le gardien de la paix G. sur M. X. relève d’un usage de la force non nécessaire et disproportionné ; - Recommande dès lors que des poursuites disciplinaires soient engagées à son encontre ; - Considère qu’en laissant M. X. en position ventrale, alors qu’il était menotté dans le dos, durant quatre minutes, l’ensemble des fonctionnaires en présence ont manqué à leurs obligations de discernement et de protection ; - Considère qu’au-delà de ce manque de discernement imputable à tous les fonctionnaires, le brigadier-chef F. a fait un usage de la force non nécessaire en maintenant M. X. durant ces quatre minutes ; - Recommande dès lors que des poursuites disciplinaires soient engagées à son encontre ; - Recommande également que des poursuites disciplinaires soient engagées à l’encontre du major C., eu égard à son rôle hiérarchique au cours de l’ensemble de l’intervention ; - Considère que le défaut d’attention porté à l’état de conscience de M. X. durant le trajet le conduisant au commissariat de police constitue un manquement aux obligations de discernement et de protection ; - Recommande que des poursuites disciplinaires soient engagées, sur ce point également, à l’encontre du major C., fonctionnaire le plus gradé et primo-intervenant présent à l’arrière du car de police durant le trajet ; - Considère que la mise en œuvre des gestes de premiers secours par les fonctionnaires de police a été défaillante et que le compte-rendu effectué par les policiers présents sur les lieux à l’opérateur radio afin de solliciter les pompiers n’a pas été suffisamment précis ; - Recommande qu’un recyclage de la formation aux gestes de premiers secours puisse être proposé plus fréquemment aux fonctionnaires de police qui en éprouveraient le besoin, après qu’un premier recyclage obligatoire soit effectué par chacun des personnels, trois ans à fréquence régulière après leur formation initiale ; - Recommande, si tel n’est toujours pas le cas, que chaque commissariat de police soit doté d’un défibrillateur ; - Recommande que l’attention de l’ensemble des effectifs du commissariat W de T. soit attirée sur la nécessité, lors des demandes d’intervention des secours, d’établir un compte-rendu radio détaillé de l’état de la victime auprès de l’opérateur, afin d’assurer une prise en charge de qualité par les personnels de secours a posteriori. |
NOR : | DFDM1800155S |
Collège Défenseur des droits : | Déontologie de la sécurité |
Nombre de mesures : | 9 |
Suivi de la décision : |
SUIVI DES RECOMMANDATIONS GENERALES : - Le ministre a indiqué que la note de l’IGPN du 4 novembre 2015 relative aux principes d’emploi de la force ou la contrainte pour la maîtrise d’une personne en état de forte agitation en vue de son interpellation ou de son transport avait non seulement été diffusée dans l’ensemble des services relevant de la direction générale de la police nationale (DGPN), mais également au sein de la préfecture de police. Les principes contenus dans cette note sont en outre rappelés aux formateurs des « techniques et de la sécurité en intervention », qui les enseignent ensuite eux-mêmes dans les formations qu’ils dispensent. - Il a été rappelé à l’ensemble des opérateurs de la salle de commandement du commissariat présents le soir des faits, la nécessité de répercuter avec rigueur l’intégralité des informations leur étant transmises. - Le ministre a précisé que la formation dispensée aux opérateurs des centres de commandement, d’assistance et de secours, étaient en cours d’adaptation aux spécificités de la préfecture de police. Il a ajouté que, depuis janvier 2015, elles sont déjà obligatoires pour tous les opérateurs des centres de commandement, d’assistance et de secours relevant de la direction centrale de la sécurité publique de la DGPN. - Le ministre souscrit à la recommandation de privilégier systématiquement le dialogue en présence d’une personne en état d’agitation, peu importe l’origine de cette agitation (état alcoolique, prise de produits stupéfiants, troubles psychiatriques etc…), tout en indiquant qu’il arrive, comme cela a été le cas dans cette affaire, que le dialogue ne suffise pas, et considère que l’équipage primo-intervenant a été contraint de faire usage de la force strictement nécessaire et proportionnée sur M. X. - Le ministre a indiqué qu’au cours de leur formation initiale, les policiers sont formés à « intervenir dans une situation impliquant une personne présentant une altération du comportement » et que, dans le cadre de la formation continue, il existe un stage intitulé « Le comportement du policier face à un malade mental ». - Le ministère a indiqué que depuis juillet 2017, lors de leur formation initiale, tous les fonctionnaires de police suivent un enseignement de secourisme (PSC1, PSI et « utilisation de la trousse de secours d’urgence »). Ces trois formations sont également proposées en formation continue, en plus des formations aux premiers secours en équipe de niveau 1 ou 2 (PSE1 ou PSE2). Le ministre a précisé que d’autres formations portant plus particulièrement sur l’intervention de police intègrent également des objectifs pédagogiques qui traitent de manière transversale des gestes de premiers secours en intervention. - Le ministre a indiqué que la loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque a inséré un nouvel article L. 123-5 dans le code de la construction et de l’habilitation qui dispose qu’un décret déterminera les types et catégories d’établissements recevant du public qui seront tenus de s’équiper en défibrillateur automatique externalisé visible et facile d’accès. A ce jour, le décret n’a pas encore été publié, mais le ministre a indiqué que de tels appareils étaient en cours d’installation dans les commissariats. - L’attention de l’ensemble des effectifs du commissariat du 10ème arrondissement de T. a été attirée sur la nécessité, lors des demandes d’intervention des secours, d’établir un compte-rendu radio détaillé de l’état de la victime auprès de l’opérateur, afin d’assurer une prise en charge de qualité par les personnels de secours a posteriori. SUIVI DES RECOMMANDATIONS INDIVIDUELLES : - Le ministre a indiqué que, dans la mesure où une enquête administrative avait été diligentée sur cette affaire avant même les conclusions du Défenseur des droits, laquelle n’avait révélé aucun manquement déontologique ou professionnel, rien ne fondait aujourd’hui la possibilité de revenir sur ces conclusions pour engager une procédure disciplinaire à l’encontre du gardien de la paix G., du brigadier-chef F. et du major C. Il a toutefois précisé que si le Défenseur des droits disposait d’éléments nouveaux, cela pourrait le permettre. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Relation avec les professionnels de la sécurité |
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