Document public
Titre : | Règlement amiable RA-2018-119 du 16 juillet 2018 relatif à un refus de délivrance d’une carte de résident à une ressortissante comorienne au motif de l’insuffisance de ses ressources |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Droits fondamentaux des étrangers |
Type de document : | Règlements amiables |
Année de publication : | 16/07/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | RA-2018-119 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Règlement amiable [Documents internes] Règlement amiable réussi [Documents internes] Pas de suite attendue [Géographie] Outre-mer [Géographie] Comores [Géographie] Mayotte [Géographie] Union européenne (UE) [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Règlementation des services publics [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Erreur [Mots-clés] Protection de l'enfance [Mots-clés] Titre de séjour [Mots-clés] Condition de ressources [Mots-clés] Vulnérabilité économique [Mots-clés] Santé - soins [Mots-clés] Protection et sécurité sociale [Mots-clés] Allocation familiale |
Texte : |
Une mère comorienne d’un enfant lourdement handicapé rencontrait des difficultés pour se voir délivrer une carte de résident sur le fondement de l’article L.314-8° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).
La réclamante était arrivée à Mayotte en 2001 pour que son fils, âgé de six mois, puisse être soigné et ait accès à un traitement adapté à sa pathologie. La réclamante avait sollicité une carte de résident mais s’était vu opposer un refus car le montant de ses ressources n’atteignait pas le niveau minimum requis pour subvenir aux besoins de sa famille. Or, contrainte de prendre en charge son enfant lourdement handicapé, elle ne pouvait qu’occuper un poste à temps partiel et ne pouvait dès lors remplir cette condition de ressources. Le Défenseur des droits a demandé un réexamen du droit de la situation de la réclamante afin que lui soit délivrée la carte de résident prévue par l’article L.314-8°du CESEDA quand bien elle-même elle ne remplissait pas la condition de ressources. A cet égard, il a été rappelé que la formulation retenue par le législateur pour fixer la condition de justification de ressources au moins égales au SMIC – est plus stricte que ce qu’exige le droit européen en la matière. En effet, la directive 2003/109/CE relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée précise uniquement que : « Les États membres évaluent ces ressources par rapport à leur nature et à leur régularité et peuvent tenir compte du niveau minimal des salaires et pensions ». Cette directive est bien applicable à Mayotte, région de l’Union européenne depuis le 1er janvier 2014. Le niveau minimal des salaires est donc, aux termes du droit de l’Union, un indicateur pertinent du niveau de ressources du demandeur et non un niveau à atteindre impérativement. Le Défenseur des droits a souligné qu’en tout état de cause, le seuil de ressources exigé à Mayotte parait particulièrement inadapté à la situation économique de l’île. Le SMIG mensuel qui est exigible s’élève en effet à 1 245,53€ par mois dans un pays où le PIB s’établit en 2013 à 8 000 euros par habitant, soit le quart seulement du PIB par habitant français. Ainsi, il a relevé que sans examen particulier de la situation de la réclamante, le montant des ressources ne pourra jamais être atteint. Le Défenseur des droits a estimé que le refus de carte de résident, en maintenant la réclamante dans une situation précaire, pourrait dès lors revêtir un caractère discriminatoire fondé, d’une part sur le handicap de l’enfant qui ne permet pas à sa mère de travailler à temps complet et, d’autre part, sur la vulnérabilité économique. Le Défenseur des droits a relevé par ailleurs que le refus de délivrance de carte de résident opposé à l’intéressée était de nature à porter une atteinte grave et manifeste au droit au respect de leur vie privée et familiale tel que garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH), de même qu’à l’article 3.1 de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE). C’est ainsi que le Défenseur des droits a eu, à plusieurs reprises, l’occasion de constater qu’un refus de carte de résident était susceptible d’entrer dans le champ de l’article 8 de la Convention européenne dès lors que la possession d’une carte de séjour temporaire implique pour son détenteur des difficultés d’ordre pratique et juridique dans de nombreux domaines (voir, par exemple, les décisions du Défenseur des droits n° MLD-2012-77, MLD-2014-100). La réclamante, en l’absence de carte de résident, rencontrait davantage de difficultés à conclure un bail en vue d’accéder à un logement plus adapté. Or, la réclamante et son fils vivent actuellement dans un logement très précaire constitué de tôle. D’après les éléments portés à la connaissance du Défenseur des droits, aucun matériel orthopédique ou encore fauteuil roulant, équipements nécessaires au handicap de son enfant ne peuvent être utilisés au vu de l’étroitesse du logement. En outre, le Défenseur des droits a rappelé qu’à Mayotte les prestations familiales ne peuvent être accordées aux personnes étrangères que si elles possèdent une carte de résident de dix ans, conformément à l’article 4 de l’ordonnance du 7 février 2002. La réclamante ne pouvait donc ni percevoir les allocations familiales, ni l’allocation éducation pour l’enfant handicapé (AEEH), prestations toutes deux indispensables au vu de l’état de santé de l’enfant. Le Préfet a informé le Défenseur des droits qu’il avait décidé à titre exceptionnel d’accueillir favorablement la demande de la réclamante afin de lui permettre d’accéder à un logement plus pérenne et de ne pas aggraver les difficultés financières ou matérielles qu’elle pourrait rencontrer dans ses démarches pour la prise en charge de l’état de santé de son enfant. |
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